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ployé quelques unes de mes veilles à rectifier mes écrits dans cette nouvelle édition, qui est, pour ainsi dire, mon édition favorite: aussi y ai-je mis mon nom, que je m'étois abstenu de mettre à toutes les autres. J'en avois ainsi usé par pure modestie; mais aujourd'hui que mes ouvrages sont entre les mains de tout le monde, il m'a paru que cette modestie pourroit avoir quelque chose d'affecté. D'ailleurs j'ai été bien aise, en le mettant à la tête de mon livre, de faire voir par là quels sont précisément les ouvrages que j'avoue, et d'arrêter, s'il est possible, le cours d'un nombre infini de méchantes pièces qu'on répand partout sous mon nom, et principalement dans les provinces et dans les pays étrangers. J'ai même, pour mieux prévenir cet inconvénient, fait mettre au commencement de ce volume une liste exacte et détaillée de tous mes écrits [a], et on la trouvera immédiatement après cette préface. Voilà de quoi il est bon que le lecteur soit instruit.

Il ne reste plus présentement qu'à lui dire quels sont les ouvrages dont j'ai augmenté ce volume. Le plus considérable est une onzième satire que

[a] Cette liste est une table de tous les ouvrages contenus dans l'édition de 1701, suivant l'ordre qu'ils y tiennent. Les notes dont nous accompagnons les pièces qui nous semblent en exiger, nous dispensent de la reproduire. Au surplus, aucun éditeur ne l'a donnée.

j'ai tout récemment composée, et qu'on trouvera à la suite des dix précédentes. Elle est adressée à M. de Valincour, mon illustre associé à l'histoire. J'y traite du vrai et du faux honneur; et je l'ai composée avec le même soin que tous mes autres écrits.. Je ne saurois pourtant dire si elle est bonne ou mauvaise: car je ne l'ai encore communiquée qu'à deux ou trois de mes plus intimes amis, à qui même je n'ai fait que la réciter fort vite, dans la peur qu'il ne lui arrivât ce qui est arrivé à quelques autres de mes pièces, que j'ai vu [a] devenir publiques avant même que je les eusse mises sur le papier; plusieurs personnes, à qui je les avois dites plus d'une fois, les ayant retenues par cœur, et en ayant donné des copies. C'est donc au public à m'apprendre ce que je dois penser de cet ouvrage, ainsi que de plusieurs autres petites pièces de poésie qu'on trouvera dans cette nouvelle édition, et qu'on y a mêlées parmi les épigrammes qui y étoient déja. Ce sont toutes bagatelles, que j'ai la plupart composées dans ma plus tendre jeunesse [b], mais

[a] Dans les éditions les plus récentes, on lit: « que j'ai « vues devenir publiques. » Il n'est pas de règle sur laquelle les grammairiens aient été plus long-temps partagés que sur les participes déclinables. Duclos paroît avoir levé les doutes à cet égard, dans ses Remarques sur la grammaire générale et raisonnée de Port-Royal.

[6] « dans ma première jeunesse ; » ( édition de 1701.)

que j'ai un peu rajustées, pour les rendre plus supportables au lecteur. J'y ai fait aussi ajouter deux nouvelles lettres; l'une que j'écris à M. Perrault, et où je badine avec lui sur notre démêlé poétique [a], presque aussitôt éteint qu'allumé; l'autre est un remerciement à M. le comte d'Ériceyra [b], au sujet de la traduction de mon Art poétique faite par lui en vers portugais, qu'il a eu la bonté de m'envoyer de Lisbonne, avec une lettre et des vers françois de sa composition, où il me donne des louages très délicates, et auxquelles il ne manque que d'être appliquées à un meilleur sujet. J'aurois bien voulu pouvoir m'acquitter de la parole que je lui donne à la fin de ce remerciement, de faire imprimer cette excellente traduction à la suite de mes poésies; mais malheureusement un de mes amis [c], à qui je l'avois prêtée, m'en a égaré le premier

[a] Lettre 95 (1700), tome IV, page 375. [b] Lettre 65 (1697), tome IV, page 292.

[c] François - Séraphin Regnier Desmarais, né à Paris en 1632, mort en 1713. Secrétaire de l'académie françoise, il eut une grande part à la composition de son dictionnaire, et fut chargé par elle de rédiger une grammaire, dans laquelle il n'a traité que les parties d'oraison. Il a traduit de Cicéron le livre sur la divination et celui sur la nature des vrais biens et des vrais maux. On a de lui des poésies françoises, latines, italiennes, espagnoles, et les plus foibles passent pour être celles qu'il a composées dans sa langue. Le titre d'ami que lui donne Despréaux n'empêche

chant; et j'ai eu la mauvaise honte de n'oser récrire à Lisbonne pour en avoir une autre copie [a]. Ce sont là à peu près tous les ouvrages de ma façon, bons ou méchants, dont on trouvera ici mon livre augmenté. Mais une chose qui sera sûrement agréable au public, c'est le présent que je lui fais, dans ce même livre, de la lettre que le célébre M. Arnauld[b] a écrite à M. Perrault à propos de ma

pas celui-ci de parler de ses vers avec une liberté peu flatteuse. Voyez sa lettre du 12 juillet 1700 à Brossette.

Les traits suivants, rapportés par Monchesnay, annoncent qu'il le maltraitoit sous plus d'un rapport. « M. Des<« préaux me disoit à propos du siège de Lille, que cette « ville étoit située dans un terrain acatique. Je lui dis qu'il << me sembloit que M. de Vaugelas prononçoit ce mot d'une << autre façon, et comme dérivé du latin. L'abbé Re

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gnier, dit-il, dans sa nouvelle grammaire, le prononce « ainsi, et je crois que c'est ce qui m'a fait quitter le senti<< ment de Vaugelas. » ( Bolœana, nombre IV [a].)

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« Le même M. Despréaux disoit de l'abbé Regnier qu'il se croyoit un grand homme, parcequ'il avoit hérité de la grimace de Chapelain. ( Bolcana, nombre V.)

[a] Ce dernier motif n'étoit pas le véritable. Voyez la note a, tome IV, page 295.

[6] Antoine Arnauld, docteur de Sorbonne, né en 1612, étoit le vingtième fils de l'avocat qui plaida contre les jé

[a] Saint-Marc a cru que Despréaux prononçoit acatique, pour se conformer à l'opinion de Regnier. Celui-ci veut au contraire que l'on prononce ce mot comme s'il « étoit écrit acouatique.» (Traité de la grammaire françoise, in-4°, page 48.)

dixième satire, et où, comme je l'ai dit dans l'épître à mes vers, il fait en quelque sorte mon apologie [a]. Je ne doute point que beaucoup de gens ne m'ac

suites, en faveur de l'université. Il voulut d'abord se livrer à la jurisprudence; mais les conseils de l'abbé de SaintCyran le décidèrent à préférer la théologie. Son génie ardent ne lui permit pas de connoître le repos; sa vie entière fut un long combat, soit contre les véritables ennemis de la religion, soit contre ceux que, dès l'enfance, il s'étoit habitué à regarder comme tels. Réduit plusieurs fois à se dérober aux coups d'adversaires puissants, il s'exila de sa patrie en 1679, et finit par se fixer à Bruxelles. Il y repoussa les attaques du ministre Jurieu contre les catholiques, eut des discussions très vives avec Malebranche, et mourut en 1694 dans les bras du père Quesnel.

Les immenses travaux de cet homme célèbre embrassent une grande diversité de matières, et supposent une force de tête, une facilité de composition bien extraordinaires, quoiqu'il ait souvent emprunté le secours de ses amis. La perpétuité de la foi, commencée avec Nicole, enleva de nombreux partisans à la religion prétendue réformée; l'Art de penser, composé avec le même écrivain, produisit une révolution dans l'enseignement de la logique; la Grammaire générale, faite en commun avec Lancelot, est la clef de toutes les langues.

[a] Dans l'édition de 1701, après cette phrase, on lit celleci: «J'ai mis cette lettre la dernière de tout le volume, « afin qu'on la trouvât plus aisément. » On a supprimé ces mots dans l'édition de 1713, parceque la lettre d'Arnauld n'y est pas placée de la même manière. Nous l'avons insérée dans notre tome IV, page 216.

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