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« style fut agréable et fin, quelquefois même héroïque [a]. » Cela n'est pas exact : le Lutrin porta le titre de poëme héroïque jusqu'en 1701; à cette dernière époque, il fut intitulé poëme héroï-comique [b]. En parlant ainsi, Voltaire se propose le double objet de faire sentir que la Henriade ne sauroit être comparée au Lutrin, et d'inspirer de la confiance par la justice qu'il semble rendre au style de ce dernier ouvrage. Au surplus, la force de la vérité le ramène quelquefois ailleurs à des jugements plus dignes de son goût, même à l'égard du chef-d'œuvre dont ses ennemis affectoient de vanter la perfection, comme un mérite auquel il ne pouvoit pas atteindre.

OEuvres de Boileau-Despréaux, Paris, Bastien, 1805, 2 vol. in-8°.

Cette édition est précédée d'un éloge par d'Alembert [c], voilà ce qui la distingue. Cet éloge, non moins agréable qu'intéressant, écrit avec toute l'adresse dont l'auteur étoit capable, laisse percer néanmoins des préventions assez fortes contre un poëte dont l'historien de l'académie françoise étoit chargé d'honorer la mémoire. Quelquefois même l'envie de plaire, ainsi que l'esprit de parti l'empêchent d'être exact dans ses récits et dans ses citations [d]. Dans

[a] Article Bouffon, burlesque, tome II du Dictionnaire philosophique, page 262, édition des OEuvres complètes de Voltaire, chez Renouard, 1819,

[b] Voyez notre tome II, page 325, note a.

[c] Jean d'Alembert, de la plupart des académies de l'Europe, né à Paris en 1717, mort en 1784; géomètre célèbre et littérateur très distingué. Le Discours préliminaire de l'Encyclopédie est son chef

d'œuvre.

[d] Voyez le tome II, page 494, note 1, page 569, note a; et le tome IV, page 206, note 1, page 614, note b.

des notes instructives, longues et nombreuses, publiées long-temps après l'éloge [a], et quelques années après sa mort, il cherche plutôt à répandre ses opinions particulières, qu'à se renfermer dans les bornes naturelles de son sujet.

OEuvres poétiques de Boileau-Despréaux, avec des notes de Ponce-Denys-Écouchard Le Brun [b], Paris, Buisson, 1808,

in-8°.

Ces notes courtes et peu nombreuses portent sur les alliances de mots, sur le mécanisme de la versification, très rarement sur le fond de la pensée, presque jamais sur l'ensemble d'un ouvrage. Dans les faits, dans les jugements, elles offrent des méprises qui supposent tout au moins un travail précipité. De grandes beautés y sont omises; des choses ordinaires y sont vantées. Comment Le Brun, chez qui l'audace de l'expression va souvent jusqu'à la témérité, quelquefois même jusqu'à la bizarrerie, peut-il envers le plus correct de nos poëtes classiques exercer une sévérité que n'auroit pas un prosateur qui connoîtroit les priviléges de la poésie? Comment ne pas s'étonner de l'entendre blâmer, comme impropres ou comme trop hardies, des locutions autorisées par l'usage? Il a pourtant des aperçus aussi justes qu'heureusement exprimés; mais, en général, l'in

[a] En 1787, Condorcet publia 6 volumes des éloges des académiciens par d'Alembert. Celui-ci avoit donné les principaux en un seul volume, sans notes, 1779.

Marie-J.-Ant.-Nic. Caritat, marquis de Condorcet, né à Ribemont, en Picardie, en 1743, mort à Bourg-la-Reine, en 1794, victime de principes dont il n'avoit pas prévu les horribles conséquences. Membre de l'académie françoise, secrétaire de celle des sciences, il a composé beaucoup d'ouvrages.

[b] Voyez, sur Le Brun, le Discours au roi, page 49 de ce volume,

note a.

stinct poétique le sert beaucoup mieux que la réflexion : il est plus fait pour sentir que pour discuter.

OEuvres complètes de Boileau-Despréaux, contenant ses poésies, ses écrits en prose, sa traduction de Longin, ses lettres à Racine, à Brossette et à diverses autres personnes, avec les variantes, les textes d'Horace, Juvénal, etc., imités par Boileau, et des notes historiques et critiques; précédées d'un discours sur le caractère et l'influence des œuvres de Boileau, et d'une vie abrégée de ce poëte, stéréotype d'Héran, Paris, 1809 et 1813, 3 vol. in-8o et in-12.

Cette édition jouit d'une estime méritée. Elle est la première où l'on ait inséré les differentes lettres de Despréaux. Le discours qui la précède est une dissertation très instructive, où l'auteur n'a rien négligé pour remplir son sujet, en perfectionnant un premier travail, couronné par l'académie de Nîmes [a], et que La Harpe cite avec éloge dans son Lycée (1821, tome VII, pages 69 et suiv.). Ce discours préliminaire est d'un écrivain qui professe, en littérature, les doctrines les plus saines, et qui sait les défendre avec les armes de la modération. Les notes qui forment le commentaire sont presque toujours solides et judicieuses; mais on regrette qu'elles ne soient ni plus fréquentes ni plus développées.

OEuvres de Boileau-Despréaux, Paris, de l'imprimerie et de la fonderie de P. Didot l'aîné, 1815, 3 vol. in-8°. Cette édition, dont le texte est à-peu-près conforme à celui donné par M. Daunou, fait partie de la Collection des meilleurs ouvrages de la langue françoise, dédiée aux amateurs de l'art typographique ou d'éditions soignées et correctes.

Elle est enrichie de l'éloge de l'auteur, par M. L. S. Auger.

[a] Ce premier travail a pour titre : Influence de Boileau sur la littérature françoise, discours couronné par l'académie royale de Nîmes; par M. Daunou, de l'Oratoire. Paris, chez Fournier, 1787.

En 1805, la classe de la langue et de la littérature françoises de l'Institut de France [a] décerna le prix d'éloquence à ce discours, où la précision d'un style piquant relève la justesse des idées. Si le choix d'un sujet qui ramène à l'attrait des bonnes études ne pouvoit être plus heureux, les effets n'en pouvoient être plus heureusement exprimés. « Dans << un temps, dit l'orateur, où notre littérature, presque au << sortir du berceau, alloit être étouffée sous les mêmes « efforts qui tentoient de la perfectionner, Boileau avoit « combattu et terrassé l'hydre du mauvais goût. Après un « siècle de maturité et d'éclat, cette même littérature, par« venue tout-à-coup au terme de la plus affligeante dégra«<dation, se voit attaquée de nouveau par tous les fléaux « qui ont assailli son enfance. Où est celui qui doit l'en dé« livrer encore?.... L'Institut national évoque l'ombre de << Boileau. A sa voix, ce grand homme reparoît au milieu « de nous. L'ART POÉTIQUE est dans sa main. Il va faire re<«< vivre les lois que jadis il a dictées, ces lois qui ont fait « fleurir le Parnasse françois, et dont l'oubli a précipité sa « décadence [b]. »

On sait que Despréaux ne vouloit pas que, dans sa composition, le second vers parût destiné seulement à tenir compagnie au premier [c]; et que, pour lui donner du sens et de l'effet, il mettoit d'abord tous ses soins à le construire. Ce moyen, fondé sur l'expérience du maître de notre école poétique, n'est point assurément à dédaigner; mais est-il certain qu'il n'ait pas été connu avant lui? Il s'offre si naturellement à l'esprit du versificateur, qu'il n'est guère à présumer qu'on l'ait découvert aussi tard. Sur la foi des

[a] Cette classe a repris l'ancien nom d'Académie françoise. [b] Éloge de Boileau, page 2.

[c] Voyez le tome IV, page 285, note b.

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commentateurs, l'habile panégyriste n'y attache-t-il donc pas une trop haute importance? Je ne puis me persuader que la révélation de ce mystère soit le plus grand service que l'Horace françois ait su rendre à son illustre ami. Au surplus, il étoit impossible de présenter une telle assertion avec plus de vraisemblance. Écoutons M. Auger : «< Dans le « système imparfait de versification suivi jusqu'à Boileau, « souvent tout l'éclat d'une image, toute la force d'une pensée << résidoit dans le premier vers, et le second n'étoit plus alors, << si j'ose m'exprimer ainsi, qu'une vaine et insipide super« fétation. Pour rémédier à cet inconvénient, d'autant plus << grave que le vers qui n'ajoute point à l'idée du vers qui le précède ne manque jamais de l'affoiblir, Boileau érigea « en précepte et consacra par son exemple la nécessité de « FAIRE LE SECOND VERS AVANT LE PREMIER. Ce procédé si simple, et dont l'explication même semble déroger à la « dignité du discours le moins orné; ce procédé n'en fut « pas moins regardé comme un des secrets les plus impor<< tants de l'art de versifier. Le poëte qui le pratique, loin << de détruire l'effet d'un beau vers par un vers plus foible, << parvient à dissimuler plus heureusement les légers sacri«<fices qu'il est quelquefois obligé de faire à la rime; et en << donnant dans le second vers, par l'achèvement de la rime << et de la pensée, la solution du double problème que dans « le premier il sembloit avoir proposé à l'oreille et à l'esprit, «il les satisfait à-la-fois l'un et l'autre; et la réunion de « leurs suffrages, qui est le but de son art, en est aussi la glorieuse récompense. Une tradition constante rapporte que Boileau donna ce secret à Racine, et que c'étoit là ce << qu'il appeloit lui avoir appris A FAIRE DIFFICILEMENT DES «VERS [a]. »

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[a] Éloge de Boileau, page 24.

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