avec la liberté d'un Citoyen Romain. Mais, Mais veux-tu fçavoir l'art de te faire du credit chés les Grands? Il faut qu'ils ne voyent point jouer en ta maifon, ny quelque petit Enée, ny quelque chere-fille plus que luy La fterilité d'une femme donne fouvent des amis. Mais fi tu poffe dois de grands biens, quand ta femme feroit feconde, & que d'un feul accouchement elle te feroit pere de trois enfans, ils ne laifferoient pas de prendre plaifir à leur langage: ils leur donneroient des prefens, lorfqu'ils les viendroient vifiter pendant le repas. Enfin, ces riches traittent leurs pauvres amis avec de mauvais champignons, pendant qu'ils font fervis de ces moufferons, qui eftoient les delices de l'Empereur Claude, jufques à ceux qu'il mangea au dernier repas, dont il mourut. Enfin, l'on met devant eux des pommes fi belles qu'elles peuvent égaller celles du jardin d'Alcinous Roy des Pheaciens, où l'automne duroit toûjours, & fi jaunes qu'on les croiroit eftre celles qu'Hercule emporta du Jardin des Hefperides. On te fervira de ces autres fl tries, à demy gattées, & femblables à celles qu'on porte vendre dans le camp aux foldats, couverts de rondaches & de calques, & qui fous la difcipline d'un Capitaine rude, apprennent à lancer un javelot. Tu te perfuades peut-eftre qu il en ufe de la forte pour épargner la dépenfe; mais tu te trompes fon deffein n'eft autre que de te voir fouffrir: car quelles farces font plus divertiffantes que de voir les poftures d'un homme preffé de la faim? Apprens donc, que toute la joye eft de te voir defefperer, & donner des marques de dépit & de colere. Tu t'imagines encore, de paffer auprés de luy pour un amy convié, ou pour un homme libre; mais ce n'eft pas la pensée. Il croit que Sedtua nunc Mycale pariat licet, & pueros tres · In gremium patris fundat fimul ipfe loquaci Ad menfam quoties parafitus venerit infans. Forfitan impenfa Virronem parcere credas. Hoc agit, ut doleas. nam qua comœdia? mimus Quis melior,plorante gula? ergo omnia fiunt, Si nefcis, ut per lacrymas effundere bilem Cogaris, preffoque diu ftridere molari. Tu tibi liber homo, & regis conviva videris. illum Bis ferat, Hetrufcum puero fi contigit aurum ? Ad nos jam veniet minor altilis. inde parato Finis quinta Satyre. c'eft l'odeur de fa cuifine qui t'attire. Et en effet, il n'a pas mauvaise raison; car quel eft l'homme, qui eftant né libre & paré de cette lifiere d'or, inventée par les Toscans, pour marque de liberté : Quel eft l'affranchy, paré feulement d'une laniere de cuir, qui fouffri. roit deux fois tant d'indignitez ? Au refte, tu te flattes d'une efperance inutile, lors que tu te promets qu'il te donnera bien-toft ce refte de Levraut, ou quelque tranche de fanglier, ou que tu dis en toy melme: peut-eftre qu'il fera paffer jufqu'icy l'une de ces volailles, & dans cette attente, tu ne touches point à ton pain; mais il eft fage, de fe moquer de toy, & de te traiter ainfi, puifque tu le veux bien fouffrir. J'attens qu'il te batte quelque jour, & que tu fois affez docile pour fouffrir fes coups. Je ne te plaindray point; car tu merites bien un repas tel que celuy-cy, & un auffi genereux amy. Fin de la cinquiéme Satyre. |