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sont fort fréquentés par les vaisseaux de Constantinople: c'est ce qui y porta la foi chrétienne dès le v et le vi siècle; et il s'y établit dès lors plusieurs évêchés ou plutôt archevêchés honoraires relevant de Constantinople, dont on trouve les noms dans les notices et les auteurs du 1x siècle.

Les petits Tartares, qui sont mahométans, en sont aujourd'hui les maîtres, el y ont ruiné les églises et les évêchés. Il n'y a plus que Caffa, port de mer assez bon, où l'on voit encore à présent un archevêque grec, et peut-être deux cents familles chrétiennes.

La Valachie est le pays situé entre les bouches du Danube à l'orient, la Transylvanie au couchant, la Bulgarie au midi, et la Pologne au nord, et n'a pas plus de 120 lieues de long et autant de large.

Les peuples qui la ravagèrent dans le 1x et le x siècle sont nommés Patzinaques dans quelques histoires grecques, et Blaques en d'autres c'est ce que nous nommons Valaques aujourd'hui, nom qui est le même que celui de Polaques et de Sclaves, qu'on donnait indifféremment à tous ceux qui venaient du Nord, parce que c'étaient en effet gens de ces cantons qui y firent si rude guerre aux Grecs et trouvèrent moyen de s'y établir.

On les divisa dans la suite en Ungroblaques et Moldaublaques. Les Ungroblaques furent ainsi nommés parce qu'ils sont dans le pays plus voisin de la Hongrie, et furent même quelque temps de sa dépendance: c'est ce qu'on appelle aujourd'hui la Valachie, qui a Tergouisk pour sa capitale, et est le long du Danube au midi, et de la Transylvanie au couchant. Les Moldaublaques prirent leur nom du fleuve Moldau, le long duquel ils s'établirent, el habitent le pays qu'on nomme Moldavie aujourd'hui, et qui a été longtemps tributaire de la Pologne.

Ces peu ples se convertirent à la foi chrétienne dès le siècle; mais il n'y eut pas beaucoup de religion jusqu'au x, et ils se mirent du patriarcat de Constantinople, dont ils prirent la créance et le schisme."

Leurs princes tombèrent sous la puissance des Turcs vers le milieu du xv siècle, et depuis ce temps-là ont été obligés de recevoir leur dignité du Grand Seigneur. Ils ne laissent pas de faire figure, et sont ce qu'il y a dans l'Eglise grecque de plus apparent et de plus indépendant. Leur pays serait bon s'il était cultivé; mais les Tartares le ruinent d'un côté et les Turcs de l'autre ; de manière que les habitants n'ont pas le courage de bâtir des maisons ni de labourer la terre. Ils logent la plupart dans des trous, et vivent de leur miel et de leur laitage, qui font la plus grande richesse du pays.

La capitale de Moldavie est Sotzau, où loge le métropolitain, qui a sous lui les trois évéchés. Il a une cathédrale assez jolie pour le pays, et bâtie à l'italienne, où il fait bonne figure et est fort respecté de son prince et de ses diocésains.

La capitale de Valachie est Tergouisk, et elle est apparemment la résidence de l'arche

DICTIONNAIRE DE GEOGRAPHIE ECCL. 1.

vêque honoraire, à qui les notices, et notamment celles de M. Smith, donnent le nom d'Ungroblachie, et à qui on ne voit nulle part aucun suffragant.

La petite Russie est toute cette étendue de pays qui a la Moldavie au midi, la Pologue au couchant, et la Moscovie au levant et au nord, et qui, ayant entre ses habitants quantité de Russes, c'est-à-dire de chrétiens du rite grec, est depuis longtemps sujette de la Pologne, et en dépend encore presque tout entière à présent.

Volodimir, qui est le premier prince chrétien de celle nation, en était souverain dans le xe siècle. Il avait sa capitale à Kiovie lorsqu'il se fit baptiser, et y fit mettre un archevêque du rite grec avec des évêques de la même communion dans les meilleures villes de sa principauté.

Ses successeurs transportèrent le siége de leur empire à Moscou dans les siècles suivants, et laissèrent ce pays en proie aux Polo ais, qui s'en emparèrent dans le XIII* et

le xiv siècle.

Cet Isidore qui assista au concile général de Florence, el à qui on donne la qualité de patriarche des Russes, n'était qu'un métropolitain de Kiovie. Il fit tout ce qu'il put pour réunir sa nation à l'Eglise romaine, mais il ne put y réussir. Les rois de Pologne n'y ont rien épargné non plus depuis qu'ils en sont les maîtres, et s'y sont employés tantôt par la douceur, tantôt par la force, sans avoir jamais eu beaucoup de succès.

Ils ont mis des évêques catholiques du rite latin dans toutes les bonnes villes de ce pays, comme on a pu le voir ci-dessus; mais les chrétiens du rite grec ont toujours continué d'y avoir les leurs, si bien qu'il y a deux prélats ensemble dans la plupart de ces évéchés.

Le métropolitain de Kiovic, qui prend la qualité d'exarque, est aujourd'hui sujet des Moscovites; ce qui l'a beaucoup endurci dans son schisme, aussi bien que les Cosaques, qui sont ses diocésains et aux environs de sa ville, et qui se sont toujours révoltés dès qu'on a voulu les troubler dans leur religion. Ses suffragants sont dispersés dans les villes de cette province, et sont presque tous sujets des Polonais : ce qui fait qu'ils n'osent pas tant se déclarer contre le pape, et que la plupart même, par politique, entretiennent avec les Latins une espèce d'union. Ils joignent souvent deux ou trois de leurs évêchés

en un.

Des archevêchés et des évéchés de l'exarchat d'Asie.

L'Asie, à qui on a donné le surnom de Mineure, est proprement le pays d'où est venu le nom à la seconde partie de notre continent. Elle s'étend depuis le 37 degré jusqu'au 44'de latitude, et peut avoir 160 lieues de large et une fois autant de long. Ses bornes sont la mer de Chypre au midi, la mer Noire au nord, l'Archipel et la mer de Marmara au couchant, et l'Euphrate, qui la sépare de l'Ar ménie, au levant.

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Les Romains, qui en étaient les maîtres longtemps avant Jésus-Christ, la divisèrent en deux exarchats: l'un vers le levant et le nord, qu'ils nommèrent de Pont; l'autre vers le couchant et le midi, qui conserva le nom d'Asie.

Ce pays reçut la foi par les prédications des apôtres immédiatement après l'ascension de Jésus-Christ. Saint Paul en parcourut les meilleures villes, et y établit des Eglises et des évêchés. Saint Jean fit sa demeure à Ephèse, qui en était capitale, et parle dans son Apocalypse des évêques qui étaient déjà en plusieurs de ses villes, sous le nom d'Anges, à qui il écrit; de sorte que ç'a été autant par la considération qu'on eut pour cet apôtre, que parce qu'Ephèse avait la juridiction civile sur toute l'Asie Mineure, qu'elle y eut aussi juridiction ecclésiastique dès les trois premiers siècles, et qu'elle était exarchat dès le temps du premier concile général.

Le concile de Chalcédoine soumit cel exarchat au patriarche de Constantinople. Il était divisé alors en onze provinces, qu'on subdivisa ensuite jusqu'à quatorze. Il y eut jusqu'au x siècle une quantité de bonnes villes et des prélats sans nombre.

Les Sarrasins commencèrent à le ravager dans le Ix siècle, et y établirent dans le xi et le su plusieurs principautés, qui y mirent la religion chrétienne dans une grande désolation.

Les Turcs vinrent peu après; et, ayant mis leur capitale à Brousse, ruinèrent de là Foute l'Asie Mineure, renversèrent les meilleures villes, ou en changèrent tellement le nom et la situation, qu'il est presque impossible de les reconnaître.

Aussi faut-il avouer que le christianisme, particulièrement pour le rite grec, y est presque éteint, si vous en exceptez les îles, où il se soutient encore passablement. Voici en peu de mots ce qu'on peut dire sur chaque province de plus particulier et de plus assuré.

L'Asie proconsulaire et l'Hellespont sont ee qu'il y a de meilleur pour la terre ferme, et cependant il n'y a comme rien. Ephèse, qui était capitale de la Proconsulaire, est aujourd'hui toute ruinée; et son archevêque, qui prend la qualité d'Illustrissime et d'exarque de toute l'Asie, n'est en quelque façon que titulaire, et n'a plus de suffragants. Smyrne est une bonne ville, fort hantée des marchands d'Europe, et où il y a bien quafre mille Grecs et un métropolitain qui fait la meilleure figure de tout le canton; mais Pergame, Thyatire, et les autres de cette province, dont il est fait mention dans l'Apocalypse, ou qui ont été si bonnes autre fois, ne sont au plus que des villages. Cyzique, métropole de l'Hellespont, ne vaut pas aujourd'hui qu'on en parle, et on ne voit pas qu'il y ait aujourd'hui dans sa province au

eun évêché.

Pour ce qui est des deux provinces des îles Cyclades, elles sont encore à présent en assez bon état, comme on vient de le dire. Les

Grecs ne logent pas dans la ville de Rhodes, métropole de la première; mais ils sont ré pandus dans toute l'ile, et y sont en trèsgrand nombre. Il faut dire la même chose de Mételin, métropole de la seconde, et des autres iles où sont leurs suffragants. Ce n'est que Grecs en tous ces endroits, et qui même y sont plus libres qu'en aucun lieu de la Turquie. Il y a aussi quantité de Latins qui y ont même leurs évêques.

Quant aux autres provinces de cet exarchat, elles sont si chétives pour le rite grec, qu'on ne saurait presque qu'en dire. Philadelphie n'est qu'un bourg où il peut y avoir quatre ou cinq cents chrétiens de cette communion. Antioche en a aussi quelques-uns, mais en petite quantité. Cogni, qui est une assez bonne ville, en a encore moins. Les campagnes n'en sont pas tout à fait si dégar nies; mais ce sont gens si pauvres et tellement dispersés de côté et d'autre, qu'on ne voit pas qu'il y ait aucun évêché.

Des archevêchés et des évêchés de l'exarchat de Pont.

Le Pont est la partie de l'Asie Mineure située vers l'orient et le nord en tirant du côté de l'Euphrate et de la mer Noire, el était le royaume du célèbre Mithridate, qui soutint contre les Romains un si grand nombre de batailles.

Les empereurs en firent dans le ur siècle un exarchat, dont ils mirent le gouverneur à Césarée, qui devint alors capitale du pays. Le concile de Chalcédoine le soumit pour le spirituel au patriarche de Constantinople.

La foi chrétienne ne paraît guère y avoir élé prêchée que vers le commencement du I siècle, puisque, lorsque saint Grégoire qui fut surnommé Thaumaturge y alla, on la connaissait encore assez peu dans le pays; mais elle s'y répandit en peu de temps, de sorte qu'au commencement duivce n'étaient qu'évêchés par toutes les villes, qui reconnaissaient celui de Césarée pour leur exar

que.

On les multiplia encore beaucoup dans la suite, et on en partagea même quelques provinces en deux ou trois; ce qui augmenta le nombre des métropoles jusqu'à seize.

Les Sarrasins y firent de terribles ravages dans le 1x et le xe siècle, et y établirent plusieurs petites principautés, qui ruinèrent la religion en bien des endroits. Les Turcs fi rent encore pis dans le xiret le xin, et y substituèrent presque partout le mahométisme à l'Evangile. Ils l'ont réduit en plusieurs provinces, dont il est difficile de déterminer bien précisément l'étendue et la situation.

Ce qu'on peut en dire à présent pour l'état ecclésiastique, c'est qu'il y a très-peu de chrétiens du rite grec, et que tout y est reduit à dix ou douze métropoles avec quel ques archevêchés honoraires; mais, aulaul qu'on l'a pu remarquer, sans aucun suffragant. Il en est tout autrement des chrétiens et des évêques du rite arménien, qui y soul en très-grande quantité, particulièrement en tirant vers l'Euphrate. Cependant, afin qu'on

en puisse avoir une idée un peu plus distincte, voici à peu près ce qu'on doit penser de chaque province.

Hn'y a presque plus de Grecs dans les trois Cappadoces. Césarée, qui en était capitale, et qui préside encore aujourd'hui à tout cet exarchat, n'est plus qu'un méchant bourg; et son archevêque, qui prend le titre d'Illustrissime des illustrissimes, n'est que l'ombre de ce qu'il était autrefois, et ne parait pas avoir de suffragants. Les quatre Arménies n'ont jamais eu beaucoup de chrétiens du rite grec, et en ont encore moins à présent. Sébaste, qui en était la principale métropole, est une bonne ville qui a son archevêque grec; mais on ne lui voit point d'évêchés. Il y a un peu plus de Grecs vers Trébisonde, parce que, durant les guerres que les infidèles firent aux empereurs d'Orient dans le x siècle, il s'y sauva une branche de la famille impériale, et il s'y forma un démembrement de l'empire grec, qui y a subsisté quelque temps. Il peut y en avoir aussi vers Néocésarée et Amasie, mais peu. Où l'on en trouve davantage, c'est dans la Galatie et dans la Bithynie, comme étant plus proches de Constantinople. Ainsi il y en a encore beaucoup sur le bordage de la mer, à Nicomédie, à Nicée, à Chalcédoine, à Brousse, qui sont ou des métropoles ou des archevêchés honoraires. C'est auprès de cette dernière qu'est le mont Olympe, habité de caloyers pour l'Asie, à peu près comme le mont Athos l'est pour l'Europe.

Toutes ces villes qui ont servi de siéges à tant de grands évêques, qui ont fourni tant de martyrs et de saints, où l'on a tenu tant de conciles, ne sont plus que des amas de ruines, et leurs édifices somptueux sont changés en de pauvres maisons, qui ne sont que de terre ou de brique mal cuite. Les esprits y sont encore, si j'ose ainsi dire, plus ruinés que les villes; et ces Asiatiques que l'on disait si délicats et si polis, sont ensevelis dans une misère et dans une ignorance qu'on peut dire excessives.

l'empire qui résidait à Antioche et prenait le titre de préfet au prétoire de l'Orient; el, parce que la juridiction ecclésiastique s'accommodait en ce temps-là avec la civile, toutes ces provinces reconnurent dès lors l'évêque de cette ville pour leur patriarche, ainsi que le concile de Nicée le rapporte l'an 325.

Les archevêques de Constantinople, qui cherchaient dans le ve siècle à étendre leurs droits, eussent bien voulu se l'assujettir; mais cela ne put réussir, on lui conserva son indépendance. Tout le tort qu'on lui fit, c'est qu'on lui enleva quatre de ses provinces, savoir, les deux Palestines et les deux Arabiques, pour les donner à Jérusalem, qui fut érigée en patriarcat; si bien qu'il ne lui en restait plus que onze, auxquelles peu de temps après on ajouta la Théodoriade, en la séparant de la première et de la seconde Syrie; ce qui en fit douze. Quelques notices latines lui en donnent quinze; mais ce ne sont pas des pièces auxquelles on doive s'arrêter; et, pour fournir ce nombre, elles mettent des métropoles qui n'ont jamais été qu'archevêchés honoraires, et leur assignent des suffragants qu'on ne connaît point ou qui sont d'ailleurs.

Les originaires du pays, qu'on nomme Syriens, avaient toujours retenu une antipathie secrète contre les Grecs, qui en avaient été les dominants depuis Alexandre le Grand, et prirent occasion du concile de Chalcédoine pour la faire éclater.

Ils regardèrent les décisions de cette assemblée comme extorquées des évêques par l'autorité de l'empereur; et, donnant le nom de melchites, c'est-à-dire de royaux, à ceux qui y adhéraient, ils rompirent de communion avec eux et s'établirent un patriarche sous le nom de patriarche syrien. La plupart des villes firent de même: on y voyait deux évêques, l'un melchite, et l'autre syrien; ce qui fit un très-grand tort au rite grec.

Les Sarrasins, conduits par les califes successeurs de Mahomet, se jetèrent sur ce pa

Des archevéchés et des évéchés du patriarcat triarcat vers le milieu du vir siècle, et en fi

d'Antioche.

Le patriarcat d'Antioche est le pays situé entre les 30 et 40° degrés de latitude, et les 67 et 80 de longitude. Il a la partie de la Méditerranée qu'on nomme mer de Phénicie, au couchant; l'Euphrate, qui le sépare de la Perse, au levant; la Palestine au midi; et l'Asie Mineure avec l'Arménie au nord.

Les apôtres y portèrent les lumières de la foi immédiatement après l'ascension de Jésus-Christ. Saint Pierre y baptisa le premier païen en la personne du centurion Corneille, à Césarée; et saint Paul y fit de si grands progrès pour la religion à Antioche, que ce fut là où les disciples du Fils de Dieu commencèrent à porter le nom de Chrétiens; de sorte que dès le et le siècle, tout y était plein d'évêchés.

Les notices romaines partagèrent tout ce pays en quinze provinces, sous un officier de

rent leur première proie; ce qui obligea la plupart des Grecs de s'en retirer. Les Syriens, qui étaient déjà accoutumés à l'oppression, et qui ne cherchaient qu'à se délivrer des melchites, subirent plus aisément le joug, et devinrent ainsi en peu de temps presque les seuls chrétiens du pays.

Le x siècle y fit encore un autre changement par le moyen des croisades; car ies Latins, étant venus pour en chasser les infidèles, y établirent plusieurs petites principautés à Antioche, à Tripoli, à Edesse et ailleurs; et en même temps ils y mirent plusieurs prélats de leur communion. Bohémond, qui avait celle d'Antioche, avait promis aux Grecs en se saisissant de la ville, qu'ils n'auraient d'autre patriarche que celui qui leur serait envoyé par l'archevêque de Constantinople : cependant, à peine il y fut établi, qu'il en fit sacrer un latin, auquel il assigna six métropolitains et quelques suf

fragants du même rite dans les meilleures villes.

Mais tout cela ne fut pas de longue durée; car les Sarrasins, ayant repris bientôt après ce que nos croisés leur avaient ôlé, donnèrent moyen aux Grecs non-seulement de se rétablir, mais même de se venger de ce qui leur avait été fait. Ces schismatiques ne furent pas plutôt rentrés à Antioche, qu'ils prirent le nommé Chrétien, patriarche latin, et le scièrent par le milieu du corps sur l'autel même de sa cathédrale, et firent main basse ensuite sur tout ce qui restait de Latins dans ce patriarcat.

Les Turcs, qui s'étaient rendus maîtres de Constantinople dans le xv siècle, voulurent avoir tout ce qui avait été de cet empire, et harcelèrent tellement les Sarrasins, qu'ils mirent enfin toute l'étendue de ce patriarcat sous leur joug l'an 1516, par la prise de Damas, qui depuis longtemps était la capitale du pays.

Quant à l'état où le rite grec y est à présent, ce qu'on en peut dire de certain, c'est qu'il est bien différent de ce qu'il y a été durant les huit premiers siècles. Tout y était plein alors de métropoles et d'évêchés, parce que le pays est très-bon; mais, après tant de changements qu'on vient de remarquer, il y est réduit presque à rien.

La ville d'Antioche, qui en était autrefois le siége patriarcal, et qui en est encore le titre aujourd'hui, a été tellement renversée par les tremblements de terre et les guerres, que ses grandes églises et ses palais, qui la rendaient l'admiration de tout l'Orient, ne sont plus que des monceaux de pierres; ce qui a obligé le patriarche de transférer son siége à Damas, qui est une ville de deux cent mille âmes, où il y peut avoir sept à huit mille Grecs et quelques églises. Il y en a une dont on a fait la cathédrale, et les autres servent de paroisses; mais ce ne sont que les plus chétives, parce que celles qui avaient quelque apparence ont été changées en mosquées depuis longtemps.

Ce patriarche est élu, comme à Constantinople, par le clergé de sa juridiction, moyennant une certaine somme que l'on donne au bacha pour avoir son agrément, et qui ne va pas moins qu'à dix mille écus, ce qui est environ ce que sa dignité lui peut valoir par an. Cependant on en a vu jusqu'à sept ou huit, en moins de dix ans, se supplanter l'un après l'autre par l'argent qu'ils donnaient, et dont ils se récompensaient ensuite par les extorsions et les simonies qu'ils exercent impunément, n'y ayant personne audessus deux pour y remédier. Il prend pour titre celui de Patriarche de la grande ville de Dieu Antioche et de tout l'Orient.

Son clergé est composé de quelques ecclé siastiques et de quelques moines résidant à Damas, qu'il hovore des mêmes offices qu'on a vus dans le patriarcat de Constantinople, et qu'il envoie en qualité d'exarques pour faire la levée de ses droits; d'une trentaine ou environ de métropolitains et archevêques honoraires, et des papas ou curés, tant de

sa capitale que des villes, bourgs el villag qui sont dans les provinces de sa juridiction.

Ces provinces sont encore les mêmes qu'autrefois, quoiqu'elles aient la plupart changé de nom. Il y en a plusieurs qui sont des plus peuplées et des plus fertiles que le Turc ait en toute l'Asie; mais le rite grec y est tellement délabré, qu'on ne saurait presque plus où en trouver.

Dans tout le pays que l'on nomme Sourie, et qui comprend les deux Syries et la Théodoriade, il n'y a que les villes d'Alep et de Hama qui aient aujourd'hui des prélats de cette communion. Alep est l'ancienne Berrhée, et vaut encore mieux en quelque façon que Damas. Son archevêque fait bonne figure et a quantité de paroisses sous lui: Hama n'est pas à lui comparer, n'est qu'un bourg.

Pour la Caramanie, où sont les deux Cilicies et l'Isaurie ancienne, et que Bélon dit un pays à peu près comme la Beauce pour être fertile et découvert, il n'y a guère que les villes de Tarse, d'Adena et de Mamistra qui aient des évêques; encore ne sont-elles que des bourgades, où le moindre nombre des chrétiens est du rite grec.

La Phénicie a, outre Damas, quelques villes qui ne sont pas mauvaises pour le trafic, comme Barut, Séide, Tripoli et Emèse, où il y a quelques Grecs avec leurs évêques. A l'égard de Tyr, qui a été fameuse autrefois et qui en était la première métropole, tout y est renversé; et l'archevêque, quand il y en a, n'est que titulaire. Ptolémaïde, si célèbre dans les croisades, fait voir dans ses ruines jusqu'où Dieu a châtié les iniquités des dix sortes de nations chrétiennes qui s'y étaient établies. Il y a peu de Grecs par toute celle province; mais il y a quantité de Syriens aussi bien que dans les précédentes el dans les deux qui vont suivre. Le mont Liban, qui est la principale demeure des Maronites, y est situé; ce qui fait qu'on y trouve beaucoup de chrétiens de ce rite.

La Tsirie, qui comprend l'Osroène et l'Ea phratèse, est une province située en tiraal vers l'Euphrate, et toute peuplée de Cardes et de Turcomans. Il n'y a qu'Edesse qui me rite qu'on en parle. C'est une grande ville a demi-ruinée, où il peut y avoir vingt mille habitants, mais peu de Grecs. Son nom a ee si fameux dans l'histoire ecclésiastique, qui's y ont conservé un archevêque. Ce qu'il y a de chrétiens dans le pays sont syriens, ar méniens et nestoriens.

Il faut dire la même chose du Diarbek, çui est la Mésopotamie ancienne, et serait us très-bon pays s'il n'était point sur les limi tes du Persan et du Turc. On y trouve de ces trois sortes de chrétiens en assez grande quantité; mais, pour des Grecs, il n'y en a jamais eu beaucoup, et il n'y en a presque point à présent, si ce n'est à Amid, qui ea est capitale, et à Nisbin, qui sont deux asser bonnes villes.

L'Arménie majeure, qui est différente de celle qu'on a vue dans le patriarcat de Constantin> ple, est proprement la patrie de ces chretiens

que nous nommons Arméniens; de sorte que les Grees, à le bien prendre, n'y ont jamais eu d'évêques. Les notices du patriarcat d'Antio che le constatent; parce qu'en effet, quoiqu'elle ait eu de tout temps une liturgie en sa langue, elle ne laissait pas d'ètre originairement de sa dépendance et de sa communion; mais il y a bien de l'apparence qu'il n'y a jamais eu d'évêques dans les Leux qui y sont spécifiés, puisqu'on n'en voit rien dans aucun auteur.

Enfin l'ile de Chypre, qui est dans la Méditerranée, a 35 licues de la côte de Syrie, a environ 80 lieues de long sur 25 de large. Son métropolitain résidait à Salamine durant les neuf premiers siècles, avait un grand nombre de suffragants, et était si considéré, qu'il voulut se dire archevêque autocéphale et indépendant d'Antioche.

Les Latins s'en emparèrent dans le x siè cle, et y établirent un royaume et une province ecclésiastique de leur communion, qui y a subsisté jusqu'à l'an 1570, qu'elle fut prise par les Turcs, auxquels elle est demeurée jusqu'à présent.

L'archevêque grec transféra son siége de Slamine à Famagouste dans le x1 siècle, et de là à Nicosie dans le XIII; il a trois suffragants, avec quantité de Grecs dans les bourgs et dans les campagnes; de sorte que sa dignité ne lui coûte pas moins de quatre mille écus, et lui vaut par an environ autant. Les trois évêchés qui lui restent, et qui ont le titre d'achevêchés honoraires, sont assez bons aussi.

peupler; mais dans le mon commença à y revoir quantité d'habitants, et particulièrement de chrétiens; et au commencement du v, tout y était plein d'évêchés, distribués en quatre provinces, deux Palestines et deux Arabiques, sous le patriarcat d'Antioche.

Le second concile général assemblé à Constantinople eut égard aux grands avantages que la ville de Jérusalem avait apportés à la religion, et accorda à son évêque la préséance sur tous ceux de sa province, et sur sa métropole même, qui était Césarée; ce qui lui donna envie de pousser la chose dans. la suite encore plus loin.

C'est à quoi travailla Juvénal, qui en était évêque durant le concile d'Ephèse: il obligea les prélats qui étaient à cette assemblée de lui accorder la dignité patriarcale, non-seulement sur les quatre provinces dont je viens de parler, mais encore sur les deux Phénicies. Et, parce que le pape s'y opposa pour conserver les droits d'Antioche, il obtint des rescrits impériaux de l'empereur Théodose pour s'y maintenir; ce qui ne manqua pas de former de grosses contestations.

Elles furent terminées au concile de Chalcédoine, où l'on rendit les deux Phénicies à Antioche, et où l'on confirma la dignité patriarcale à Jérusalem sur les deux Palestines et les deux Arabiques. Il y en a qui les comptent autrement, el qui mettent trois Palestines et une Arabique; mais cela revient au même, parce que la troisième Palestine n'est autre que l'Arabique première.

Les Sarrasins se saisirent de ce patriarcat

Des archevêchés et des évéchés du patriarchat dès l'an 638, et mirent le rite grec dans une

de Jérusalem.

Le patriarcat de Jérusalem tire son nom de la ville que le Fils de Dieu a honorée de sa présence et de ses miracles, et où il a opéré les plus grands mystères de notre religion, et comprend le pays qu'on nomme Communément la terre sainte.

Il est situé entre la mer de Jaffa, partie de la Méditerranée, au couchant, l'Arabie au levant et au midi, et la Syrie au nord, et a le patriarcat d'Antioche d'un côté, et celui d'Alexandrie de l'autre. Son étendue est environ de 80 lieues de long sur 60 de large, depuis le 40 degré de latitude jusque vers le

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Les apôtres, après la descente du SaintEsprit, y firent grand nombre de conversions, et y établirent la première Eglise de la chrétienté sur un modèle de perfection auquel nulle autre n'a jamais pu arriver, puisque tous les fidèles n'y avaient qu'un cœur et qu'une âme, et que la plupart y mirent leurs biens en commun.

L'apôtre saint Jacques en fut le premier évêque. Il eut pour successeur saint Siméon, qui, voyant cette ville en danger d'être assiégée par les Romains, se retira avec son troupeau au bourg de Pella; et, durant qu'il y était, elle fut saccagée, et tout le pays mis a feu et à sang.

Les deux premiers siècles se passèrent sans que les villes pussent beaucoup se re

grande oppression: ils prirent les plus belles églises de la ville et de tout le pays pour en faire leurs mosquées; mais ils ne voulurent pourtant pas toucher à cel'es des lieux saints, comme de Bethléem, de Nazareth, du Calvaire, et ils en laissèrent l'entière disposition aux patriarches, moyennant certaines redevances, avec liberté aux chrétiens de toutes nations de les visiter et d'y faire l'exercice de leur religion.

La dévolion qu'on a eue de tous temps en Occident pour ces lieux, que le Fils de Dieu a sanctifiés par ses vestiges et ses mystères, donna lieu aux croisades, par lesquelles les Latins entreprirent plusieurs fois de délivrer la terre sainte du joug des infidèles. Godefroi de Bouillon fut le chef de celle qui y vint sur la fin du XIe siècle, et eut assez de bonheur pour prendre Jérusalem l'an 1099, et pour y former un royaume, en chassant les Sarrasius de tous les environs.

Avec ce royaume il y établit aussi un patriarche latin, qui avait sous lui plusieurs métropoles et plusieurs évêchés; ce qui affaiblit encore considérablement le rite grec.

Mais les Sarrasins n'en furent pas longtemps dehors; et l'ayant repris sur les descendants de Godefroi l'an 1188, obligèrent les prélats latins de s'en aller chacun de leur côté, et remirent les Grecs en possession de leurs évêchés.

Les Turcs enlevèrent ce pays aux Sarrasins lorsqu'ils se saisirent de Damas au com

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