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traduction latine conservé dans un traité d'époque incertaine1, nous montre, malgré le silence des Pères latins, qu'elle n'était pas inconnue en Occident. A un certain moment, perdant son individualité, elle devient pour ainsi dire le levain de la littérature des Constitutions apostoliques. Noyée dans les imitations, dans les adaptations aux besoins des siècles postérieurs elle est peu à peu oubliée. Après Nicéphore au IX* siècle, le dernier qui l'ait eue sous les yeux, à notre connaissance, est le scribe Léon qui la transcrivit au xr° siècle dans le manuscrit d'où elle a été tirée de nos jours par M. Bryennios 2.

1) De aleatoribus 4. Et in doctrinis apostolorum : Si quis frater delinquit in ecclesia et non paret legi, hic nec colligatur donec poenitentiam agat, et non recipiatur ne inquinetur et impediatur oratio vestra. Dans le Cypriani opera de Hartel, pars. III, p. 96. Pour la Didache, cf. ch. XIV et ch. XV.

2) Cette étude était terminée lorsque j'ai reçu le savant travail de M. le professeur Bonet-Maury, intitulé sous la forme définitive qu'il lui a donnée: La doctrine des douze apôtres. Essai de traduction avec un commentaire critique et historique Paris, Fischbacher 1884. Je n'y ai rien trouvé qui m'obligeût à modifier mes conclusions. Voir aussi Bulletin critique no 19 un court et bon

article de M. l'abbé Duchesne.

L. MASSEBIEAU.

ETUDES D'HISTOIRE RELIGIEUSE CONTEMPORAINE

LA NOUVELLE THEOSOPHIE

DEUXIÈME ARTICLE'

V

Dans une des conférences qu'il a données à Paris, aux mois de mai et juin derniers, le chéia de Kout-Houmi, son porte-voix autorisé, M. Mohini, nous disait : « Toutes les religions s'effrondrent sous

le poids écrasant des données de la science; aucune ne résistera à «< cette pression. La société théosophique espère, elle, asseoir la re<«<ligion sur une base scientifique; elle espère démontrer que reli<< gion et science sont choses identiques. » M. Goblet d'Alviella, dans son remarquable livre de l'Evolution religieuse comtemporaine, avait eu des paroles qui, à première vue, ne paraissent pas différer de celles-là: « L'expérience du passé nous enseigne, dit-il, qu'après « une période plus ou moins longue d'oscillations et de tâtonne«<ments, le sentiment religieux finit toujours par se débarrasser de << ses formes décrépites, pour se reporter sur une explication de l'u«nivers plus conforme aux données de la science et aux aspirations << de la société contemporaine. On pourrait croire que M. Mohini n'a fait que reproduire la pensée de l'éminent auteur belge; pourtant il y a entre eux une différence. M. Goblet d'Alviella estime que, si la philosophie, travaillant sur les matériaux fournis par l'observation, est légitimement autorisée à en déduire une conception relativement adéquate de l'univers, dont le sentiment religieux s'empare pour l'idéaliser, cette conception n'en est pas moins, avec le temps, dépassée par le progrès des connaissances. En d'autres termes, n'admettant

1) La première partie a paru dans la Revue de septembre-octobre 1884, p. 43 à 71.

pas la fixité absolue d'aucune synthèse scientifique, il n'admet pas davantage celle d'aucune philosophie, ni, par conséquent, d'aucune religion. Il doit croire aussi que, l'objet de la connaissance étant inépuisable, un problème qu'on résout en fait naître de nouveaux à résoudre, et que, partant, toute synthèse, pour si exacte qu'on la suppose, ne saurait être tenue pour définitive ni aucune théorie pour indéfectible. Or, ce n'est pas tout-à-fait ainsi que la nouvelle Théoso phie l'entend. Elle prétend bien baser la religion sur la science, mais une science faite et réglée une fois pour toutes, qui n'a de commun avec la nôtre que ce qui ne contrarie point son a priori à elle.

Pour nous, Occidentaux, la science véritable, celle qui implique assimilation de l'objet par le sujet, a pour base ce principe, si nettement formulé à la française par Fontenelle : « Avant d'expliquer les «<faits, il est nécessaire de les constater; on évite ainsi le ridicule << d'avoir trouvé la cause de ce qui n'est point. » Ceci s'adresse aux théoriciens de tous systèmes, qu'il s'agisse de naïfs croyants ou de savants de profession. Partant de ce principe, nous nous croyons en droit d'exiger de toute affirmation, descendit-elle des hauteurs de l'empyrée, qu'elle se démontre, si elle tient à ce que l'esprit auquel elle s'adresse puisse se l'assimiler comme objet scientifique : affirmanti incumbit probatio. Ceux qui affirment sans cette condition, indispensable à nos yeux, ont beau nous dire que leur science est le résultat de centaines et de milliers de siècles d'observation et d'expérience; qu'elle est le fonds originel, pur et limpide, de toutes les synthèses philosophiques et religieuses venues depuis ; qu'en elle se résumé tout ce qui a été su et tout ce qui peut l'être encore, la chose serait-elle vraie, que, si l'exposition qu'ils en font ne l'établit point, je n'en serai pas, pour le croire, plus savant que si je ne le croyais pas. En d'autres termes, induction et déduction, l'une s'élevant du particulier au général, l'autre, qui y est subordonnée, descendant du général au particulier, telles sont nos méthodes scientifiques. L'Orient en a une troisième, à laquelle il ne donne pas seulement la préférence, mais subordonne les deux autres, tout en les admettant en principe. C'est cette dernière qu'a adoptée et que suit la Théosophie. On l'appelle l'intuition : « L'occultiste, sans faire fi de la mé«<thode inductive, dit le Théosophist d'août 1884, préfère s'unir avec « le centre de l'univers, et de là plonger le regard dans le tout infini; il essaie de mettre tout son être en harmonie avec l'esprit universel, pour entrer mentalement au cœur même des choses, et

<< par là en acquérir la vraie connaissance. Pour arriver là, il faut « d'immenses efforts, une persévérance constante, et le savant ordi«naire, trouvant plus commode de recourir à ses instruments physi«ques que de perfectionner son moral et de discipliner ses facultés spirituelles, ne peut obtenir qu'une connaissance imparfaite ou ⚫ une connaissance de quelques détails. Se mettre en harmonie avec « l'Esprit divin, ce n'est pas simplement penser à Dieu et au Ciel, ou pratiquer une certaine forme de culte, mais établir une identification continue de vibration moléculaire entre la partie spi« rituelle de l'homme et l'esprit universel; c'est, en un mot, vivre « constamment en sa haute conscience, qui est la vraie contemplation. » Pour comprendre à peu près cela, on doit savoir que la nouvelle Théosophie admet trois états de conscience: la conscience animale, qui n'est, dans l'homme, que l'instinct de la brute; la conscience normale ou raison, qui tient le milieu entre l'instinct et l'intuition; et la conscience spirituelle, dont l'expression la plus élevée est l'extase, qu'il ne faut confondre ni avec la possession ni avec l'état cataleptique: Dans cette situation extatique, la conscience de l'homme s'unit plus ou moins à l'âme universelle; elle acquiert des «< choses une connaissance que, dans les conditions normales, elle « est incapable de comprendre. »,

Cette méthode, qualifiée de scientifique, ne diffère pas ou, du moins, ne diffère que dans les mots de la contemplation telle que la définissent les Mystiques chrétiens. Saint-Augustin, au livre XII contre Faustus, dit de la contemplation que c'est une sainte ivresse « qui retire l'âme de la fluidité des choses temporelles et qui a pour << principe l'intuition de l'éternelle lumière de la Sagesse.» Pour tous les autres mystiques venus depuis, c'est la « vie unitive en Dieu, du << sein de laquelle l'esprit, élevé à l'intuition faciale, perçoit l'éter« nelle vérité par un pur regard, avec certitude et clarté, sans la ⚫ multiplicité des raisonnements'. » Le Theosophist dit que par contemplation il n'entend pas un état passif de l'esprit, mais l'étude d'une idée: Contempler, ajoute-t-il, loin de signifier une pas«<sivité de l'âme, est, au contraire, l'état le plus élevé de l'activité; « c'est l'entrée de l'esprit dans les hautes régions de la pensée. » C'est par la contemplation ainsi pratiquée qu'on arrive au repos parfait du Nirvana. Et bien ! la Mystique chrétienne ne l'entend pas

1) Cardinal Bona, Via compendii ad Deum, C. 9, n. 4.

autrement: «< Comme dans la méditation, dit M. l'abbé Ribet, l'homme mêle ses efforts à la grâce divine, et que cet exercice « des forces naturelles se prolonge dans l'acte même de la contem⚫ plation, qui en est le fruit et le couronnement, cette contemplation est qualifiée de naturelle et d'active, moins cependant pour affir« mer le résultat de la nature et de l'activité humaines que pour dis⚫tinguer cette contemplation inférieure de l'attraction divine qui ⚫ prévient tous les efforts humains et réduit l'âme à une passivité bienheureuse 1. ›

Là, néamoins, s'arrête l'analogie de principe. Tandis, en effet, que la Mystique chrétienne, qui pose Dieu en dehors de la nature, croit que l'esprit peut s'élever à la vue de Dieu face à face, en dehors de cette même nature, la Théosophie, pour laquelle il n'y a de Divin que le Divin naturel, estime qu'on ne peut en acquérir la connaissance que par l'étude de ses manifestations : « L'occultiste, dit-elle, ne croit pas qu'il existe rien qui ne soit Dieu; il croit que Dieu est tout ce qui existe, quoique nous ne puissions voir l'essence de << Dieu, que nous ne percevons que dans ses manifestations; car, les < choses que nous percevons par les sens physiques ne sont pas les «< choses elles-mêmes, mais seulement leurs attributs. L'occultiste nie, par conséquent, que la matière dans aucune de ses formes puisse avoir une existence réelle quelconque, et il dit que le monde des formes n'est que le résultat mobile et toujours changcant de l'i⚫déologie cosmique, ou le symbolisme sous lequel les idées divines << sont présentées à notre esprit. De là elle tire cette conséquence: que rien n'existe que Dieu et que toutes choses sont le résultat de l'action de l'Esprit divin, qui les déroule de lui-même et leur donne forme par la puissance de sa volonté et suivant certaines lois immuables appelées les lois de la nature : « S'il en est ainsi, ajoute-t-elle, ⚫ cette volonté est toute-puissante,et quiconque agit en harmonie avec elle participe de son pouvoir, pouvoir dont l'exercice, dans l'individu, dépend de la connaissance des lois de la nature. Mais l'homme, <«< comme la nature elle-même, n'est que l'expression d'une idée divine; sa conscience est le résultat dernier de l'idéologie cosmique, et l'homme est, par conséquent, lui-même Divin. La connaissance de l'univers et de ses lois dépend d'une connaissance parfaite de l'homme, non pas seulement de l'homme en sa condition

1) La Myst. div., t. I, p. 60.

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