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description, tirée de Tezozomoc, nous donne encore mieux que la précédente l'idée d'un paradis terrestre. Qu'elle fût conforme aux croyances populaires, on n'en peut douter quand on sait que ce délicieux paradis de bonheur était passé en proverbe '.

Il n'est donc pas possible de le contester, Huemac est bien l'un des maîtres de l'Elysée mexicain où sont réunis les deux adversaires, Huemac et Quetzalcoatl, comme l'étaient Kronos et Heraclès-Ogmios d'après les anciennes traditions celtiques, ou Tethra et Ogma, d'après la version plus récente des Gaëls. Le farouche Huemac, le premier occupant de ce séjour du bonheur, y paraît fort déplacé: en souvenir des sacrifices humains que l'on faisait en son honneur, il lui faut encore des peaux d'hommes écorchés ; on le représente comme affreux et terrible. Il est d'autant plus remarquable que cette conception si peu naturelle se retrouve de point en point chez les Celtes et même chez les Grecs; ceux-là en effet ont relégué au Mag-Mell (Plaine des délices) Tethra le chef des épouvantables Fomors, qui correspondent aux sanguinaires Tlalocs ; et les Grecs ont enfermé au même lieu (qu'ils appelaient Kronie, Ogygie, Champs-Elysées, îles des Bienheureux), l'infanticide Kronos, avec ses anciens ennemis, les Titans et les Géants. Que les beaux esprits se rencontrent dans la logique, on le conçoit, mais qu'ils soient d'accord dans l'illogisme, on ne peut le comprendre qu'en admettant soit que les uns aient copié les autres soit que tous aient répété une même tradition. Il est vraisemblable que le type de Kronos a été conçu par l'humanité primitive, accoutumée aux meurtres et aux brigandages et n'en faisant pas un grief au Dieu sanguinaire dont les prêtres avaient jeté les premières semences de la civilisation. Mais avec le progrès, l'idéal s'éleva et Kronos, qui n'y répondait plus, fut expulsé de l'Olympe ou Paradis céleste, pour être re

hay en el mundo, bebidas y todo género de rosas, y todo género de arboles frutales, porque todos los moradores que allà estàn, se hallan los màs contentos del mundo, y el rey de ellos, que es el Huemac, esta el mas ufano y contento del mundo. (Tezozomoc, Cron. Mex. ch. 103, p. 671.)

1) Como allà el refran dice, que es un deleitoso paraiso de contento. (Tezozomoc, ibid. ch. 104, p. 674.)

légué dans la Kronie ou Paradis terrestre, de condition inférieure, comme l'indique l'épithète. Une fois en possession de ce séjour, il le garda, tout au moins en partie, même lorsque ses anciens ennemis plus humains y furent admis à leur tour. On pourrait à la vérité supposer que tous les peuples ont passé par les mêmes phases et que les conceptions primitives se sont, par suite d'une évolution naturelle, transformées de la même manière. Il en doit être ainsi d'après les partisans de la génération spontanée; mais les adversaires de cette théorie ne sauraient admettre les conséquences qu'on en tire; car si celles-ci étaient vraies, on en verrait l'application sinon dans toutes les mythologies, du moins dans toutes celles qui sont parfaitement développées ou bien connues. Il faudrait donc commencer par démontrer que tous les peuples ont cru en un paradis terrestre, servant de refuge à deux dieux déchus qui représentent deux principes opposés et dont le plus ancien est le plus barbare. Or il est certain que les traits de ce mythe manquent soit en totalité soit en partie chez beaucoup de peuples, et qu'en tout cas ils ne se retrouvent pas dans le même orare. Il est alors logique de conclure que, puisqu'ils se rencontrent chez les Grecs, les Celtes et les Mexicains, dans un invariable parallélisme, c'est qu'ils ont été puisés à une même source. Et précisément les Grecs et les Celtes avouent qu'en ce point, ils se sont mutuellement prêté leurs traditions ; d'autre part, les Celtes affirment que leurs dieux du paradis terrestre ont émigré dans les îles Kroniennes, puis sur le grand continent transatlantique, et les Mexicains reconnaissent que les leurs sont venus de Tullan-Tlapallan, c'est-à-dire précisément de la Thulé Kronienne. Ces concordances frappantes ne sont certes pas accidentelles; il faut nécessairement qu'il y ait un fond de vérité dans le récit du prêtre de Kronos recueilli par Sylla et conservé par Plutarque. Il renferme dans un mythe assez transparent l'histoire des missions religieuses qui parties de l'Orient, ce berceau de toute civilisation, se sont pro gressivement avancées dans l'ouest du vieux monde, ont franchi l'Atlantique par les échelles Kroniennes, et se sont établies

sur le nouveau continent; non pas en même temps, mais successivement, en y portant des cultes qui, tout en ayant la même origine, s'étaient différenciés dans le cours des temps.

On vient d'exposer le mythe de Kronos-Tethra-Huemac ; pour le mettre en pleine lumière ou le faire mieux ressortir par le contraste, il reste à expliquer non moins amplement celui de Héraklès-Ogma-Quetzalcoatl, auquel on a déjà fait beaucoup d'allusions. On y verra comment les deux adversaires, quoique partageant la même retraite, adorés dans les mêmes temples et presque confondus dans un même culte, restèrent opposés jusqu'à la fin de l'empire Aztec, à tel point que Montezuma, craignant le prochain accomplissement des prophéties de Quetzalcoatl et prenant les Espagnols pour les disciples de ce dieu, se garda bien de demander un asile à Tlapallan où il aurait vécu sous des lois plus douces et sous un maître plus humain; il s'adressa au contraire à l'ennemi de celui-ci, au terrible Huemac, dont les prêtres l'éconduisirent. Il fut donc forcé de se soumettre à Quetzalcoatl, dont il se disait lieutenant. Cette histoire véritable, malgré son caractère mythique, sera contée à la fin de la seconde partie.

EUG. BEAUVOIS.

ETUDES D'HISTOIRE RELIGIEUSE CONTEMPORAINE

LA NOUVELLE THÉOSOPHIE'

I.

Il y a, en dehors des académies et des écoles, bon nombre d'esprits indépendants qui estiment que beaucoup de lois de la nature échappent encore à notre perception et que nous ignorons même jusqu'où peut s'étendre l'énergie de celles que nous connaissons. Un des savants de l'antiquité qui ont le plus étudié cette même nature, Pline l'Ancien, s'en était aperçu, il y a dix-huit siècles : « Multa esse naturæ miracula incompertæ rationis et in majestate naturæ penitus abdita, » a-t-il dit ». Saint Augustin, de son côté, a eu ces paroles : « Multarum rerum naturas nostram superare scientiam3. Ceux qui pensent ainsi jugent, en conséquence, que, puisqu'il y a des lois ignorées, il n'est point illogique d'affirmer des causes cachées autrement dites occultes, auxquelles ils attribuent une foule de manifestations qualifiées de merveilleuses, que nient les sceptiques, ne pouvant les expliquer, et que ceux qui croient à une volonté souveraine, libre et toute-puissante, expliquent par l'intervention de cette volonté dans le gouvernement du monde. En conservant la vieille qualification de « divine», sans rien préciser, néanmoins, de défini à l'égard de ce

'M. Jules Baissac, qui a été à même de connaître particulièrement la Société théosophique, a bien voulu rédiger pour notre Revue un article, dans lequel nos lecteurs pourront s'initier à un des plus curieux phénomènes de la vie religieuse contemporaine. C'est du reste uniquement à titre de curiosité que nous nous occupons de la Société théosophique. (Note de la direction). 2 Hist. nat. XXX. C. 4.

3 De Civitate Dei, L. XXI. C. 4.

mot, à la force qui se meut dans ce que nous continuerons d'appeler la création, on a donc deux manières de concevoir le Divin : comme indépendant de la nature, où il ne résiderait que sous forme d'influx ou souffle du principe créateur, ou comme lié à cette même nature, dont il est la vie et qui n'en serait que le substratum. La première de ces manières, celle de Saint Augustin, a un nom bien connu, c'est la Théologie; la seconde, ou étude du Divin naturel, celle de Pline, en a un autre, dont la fortune a été moindre, c'est la Théosophie. Je ne parle pas du Déisme, qui, à moins d'être théologique ou théosophique,suivant l'un ou l'autre des sens que je viens de déterminer, entre dans la catégorie des abstractions idéales.

La Théologie et la Théosophie paraissent donc avoir un même objectif, l'étude de Dieu ou du Divin. Mais, tandis que la première pose cet objectif en dehors de la nature et l'y catégorise, la seconde s'autorise du fait des énergies secrètes dont il vient d'être question pour soutenir que, jusqu'à ce que toutes les lois naturelles et leur virtualité nous soient connues, il sera logiquement téméraire de prétendre qu'il y ait rien de surnaturel ou que le miracle, en tant que violation de ces mêmes lois, puisse être raisonnablement affirmé. Au fond l'occultisme est la base de l'une comme de l'autre. Cette base établie,et elle l'est par le mystère qui enveloppe encore tant de côtés de l'œuvre dite, selon le point de vue où l'on se place, de la création ou de la nature, la théologie la déclare insondable à l'œil de la raison et en réserve le secret pour la seule foi, elle-même une grâce de Dieu, au lieu que la théosophie la croit accessible à l'investigation et la traite en conséquence. Il semble donc, à première vue, que la Théosophie ne soit qu'une méthode philosophique. Elle-même se donne volontiers pour cela. Cette prétention est peut-être justifiée en ce qui concerne la théosophie de l'école néo-platonicienne, abstraction faite, du moins, de son côté théurgique; mais je doute. qu'elle le soit pour la théosophie des siècles moins reculés, celle, par exemple, de l'école dite de Paracelse. Le côté théurgique, en effet, est celui qui paraît prévaloir dans cette dernière école; c'est aussi celui vers lequel penche de préférence la nouvelle société théosophique.

S'il ne s'agissait, en effet, dans les visées que poursuit cette société nouvelle, que de la recherche des lois qui président aux phénomènes de l'Occultisme, rien ne serait plus légitime que la prétention qu'elle affiche d'être une école plutôt philosophique que théologique,

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