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fées, tout-à-coup arrêtés au milieu de leurs jeux, comme par un pouvoir magique, maintiennent, dans une longue mais gracieuse immobilité, les développemens élégans de leurs corps souples et sveltes, et prolongent l'yvresse publique, au moyen de ce repos ingénieux, pendant lequel le spectateur peut se rappeler et répéter à ses voisins ce beau passage d'Horace : Jam Cytherea choros ducit Venus, imminente Lunâ; Junctæque Nymphis Gratia decentes

Alterno terram quatiunt pede..

Od. 4. lib. 1. v. 5.

Que les traités de la ponctuation nous fassent donc apprécier l'utilité d'un art qui en embellit tant d'autres; et que ces écrits, souvent si inutiles, ne se bornent plus à compter combien de mouvemens du balancier d'une pendule doivent accompagner la durée de chacun des signes que la ponctuation emploie.

En attendant, établissons bien positivement que la valeur des repos dans la prononciation ne doit jamais être mesurée. au signe seulement, en faisant abstraction

du

du sens; car le sens peut nécessiter une tenue que le signe ne marque point; et, réciproquement, il sera assez commun qu'un signe d'une certaine force aura besoin d'être atténué par la prononciation et rendu presque insensible, si le tour exige que les membres de la phrase se précipitent et se confondent, comme cela a lieu quelquefois dans la figure qu'on appelle énumération. Il me semble que cette distinction prouve assez bien que la ponctuation n'a pas eu pour but unique la mesure des repos, pris égard à l'étendue de voix du lecteur, mais d'abord la division des sens; puisqu'elle a attaché, quand le sens l'a voulu, des signes foibles à des repos très-marqués, et des signes forts à des tenues très-rapides.

Il y avoit en Angleterre, comme il y en a partout, un malheureux grammairien digne qu'on lui fit l'application de ces vers de Voltaire, dans une de ses épîtres :

Des XX redoublés admirant la puissance,
Il croit que Varignon fut seul utile en France,
Et s'étonne sur-tout, qu'inspiré par l'amour,
Sans algèbre autrefois Quinault charmât la cour.

Ce savant montroit à Garrick un triste ou vrage sur la ponctuation qui commençoit comme tant d'autres par dire que la ponctuation a quatre signes, dont le plus foible exige une pause égale au tems nécessaire pour compter un, le second, une pause égale au temps nécessaire pour compter deux etc. << Monsieur, dit l'interprète parlant » de Shakespeare, il y a au moins trente» sept repos et demi dans la ponctuation; » et, demain au soir, dans le monologue » d'Hamlet, je m'arrêterai à une virgule, » pendant que votre arithmétique comptera trente-huit ».

C'est probablement du même homme que Sterne invente ou raconte l'anecdote suivante, qui appartient, à meilleur droit, à ces vilaines remarques grammaticales, que le conte d'ainsi prononcé nonobstant clameur de haro (*) à la Prosodie de l'abbé d'Olivet.

(*) Monsieur Harduin d'Arras disoit à Fréron (Année littéraire, 1772, tom. 2, p. 171 ): » Voici » ce que l'auteur (des remarques sur la langue fran» çoise) m'ecrivoit sur la fin de 1766, en me faisant

la politesse de m'envoyer un exemplaire de sa nou» velle édition : J'ai laissé subsister contre votre

« Et comment a-t-il joué, hier, Garrick? » Oh contre toutes les règles ! le plus in» grammaticalement possible! Entre l'ad»jectif et le substantif qui doivent s'ac» corder comme vous savez, en genre, » en nombre et en cas, il a mis une pause » qui les divorçoit tout-à-fait; dans un » autre endroit où je suis sûr qu'il n'y a » qu'une virgule, il s'est arrêté pendant » trois secondes et trois cinquièmes d'une » seconde. Je les ai comptées à ma montre » à secondes, que je tenois à la main, et » qui est excellente ». « Mais, le sens étoit»il aussi suspendu ? Aucune expression » ni d'attitude ni de physionomie ne rem» plissoit-elle le vide que vous blamez ? » La figure de Garrick ne disoit-elle rien? » Ses regards étoient-ils absolument muets? » Avez-vous bien observé »? « Monsieur

» sentiment, et peut-être, aussi contre le mien, ma » petite addition sur les voyelles nasales. Vous di» rai-je franchement que ç'a été pour y coudre le » conte de MM. Huet et Segrais qui m'étoit resté dans » la mémoire, et qui m'a paru pouvoir égayer un » peu ces vilaines remarques grammaticales dont » si peu de gens ont le goût »?

» j'ai très-bien observé mon excellente » montre à secondes ».

Au reste, pendant que je m'occupe de ces questions, avec le petit nombre de matériaux qu'une ville de province peut fournir, je lis que Princeps urbium, comme j'ai appelé Paris dans ma dédicace, écoute avec quelque intérêt, dans les lecons publiques d'un acteur considéré, une observation qui seroit complette si le professeur, qui a très bien remarqué qu'on pouvoit desirer des signes de ponctuation plus foibles que la virgule, avoit ajouté qu'après chacun des signes reçus, et audelà, il y avoit aussi des espaces à remplir et des repos à exprimer.

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:

» Pour bien sentir Racine, dit-il, il faut » bien connoître la ponctuation la plu» part des comédiens semblent l'ignorer; » tandis que, cependant, il est impossible » de bien lire si l'on ne sait pas bien » ponctuer. Le point, le point et virgule, » le deux-points, le point interrogatif et le » point admiratif sont les notes parlantes des » intonations. Il devroit même y avoir,

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