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le plus d'ardeur et d'efficacité à détruire l'esprit de l'Évangile à travers le monde.

Pendant que les Maçons de Beyrouth restaient pacifiques en apparence, comme nous l'avons dit, les membres d'une loge fondée récemment par des Grecs schismatiques au village de Chouéir, prirent en ces dernières années une attitude militante. Un groupe de Maronites du village de Ghazir leur fit écho. On fonda une revue « Al-Nour » (La Lumière), soi-disant pour éclairer le Liban, en réalité pour le corrompre et le troubler, selon les traditions de la secte mauvaise. En tout autre temps leur action eût passé inaperçue; mais l'existence de certains partis fut alors favorable aux agitateurs.

Le Liban a pour gouverneur, depuis quatre ans déjà, Mouzaffer Pacha, de son vrai nom de famille comte Czaykouski, polonais d'origine, au service de la Turquie. C'est un militaire, chargé naguère de la surveil lance des haras impériaux, élevé par un hasard de fortune à la dignité de maréchal de l'Empire, d'aide de camp de Sa Majesté le sultan et de gouverneur général du Liban. Dès son arrivée en ce pays, il lança un programme éblouissant mais peu réalisable. Les projets qu'il formula et les taxes nouvelles qu'il pensa imposer au pays furent mal reçus, et on lui représenta amicalement la nécessité de revenir sur ses premières décisions. Force lui fut de se rendre; et il est juste d'avouer que, avec tous ses projets, il a toujours montré de la bonne volonté et un réel désir de bien faire; cependant, malgré ces louables dispositions, il n'a pu réussir parce qu'il s'est laissé influencer par de fâcheux conseillers: nommons: Mme Mouzaffer Pacha, son fils Fouad Bey, jeune homme sans expérience suffisante, un autre condamné en France et en Italie pour ses escroqueries et ses malhonnêtetés, enfin un dernier que je rougirais également de nommer ici, voilà les mauvais génies qui ont inspiré de près ou de loin le Gouverneur général et qui l'ont rendu impopulaire et détesté.

Les autorités ecclésiastiques, les notables, toutes les personnes honorables se tinrent à l'écart laissant au Pacha et à ses conseillers toutes les responsabilités. Ces derniers, effrayés de l'isolement où leur mauvaise politique les avait conduits, cherchèrent à se faire arme de tout bois, et les groupes Maçonniques, qui ne savaient à quoi employer leur activité et leurs loisirs et qui paieraient cher pour l'instant toute immixtion dans la politique générale de l'Empire, se déclarèrent pour le Pacha contre le clergé et les notables. Les fonctionnaires, quelques-uns du moins, se mirent du même parti; et une petite guerre de lâchetés s'engagea. Articles injurieux, brochures anonymes, nomination aux emplois de gens indignes, tout cela éclata à la fois et sur tous les points. Je n'entre pas dans le détail de ces tristes démêlés; mais, en spectateur impartial, je constate que la bassesse, l'hypocrisie, la lâcheté, le mensonge, toutes les vilenies contenues jusqu'ici par un sentiment de pudeur naturelle et par un reste de religion, se sont manifestés au grand jour, grâce à l'action de la Maçonnerie et sous le souffle d'un gouverneur indécis et inconstant, qui laissa le désordre remplir le pays pour ne songer qu'à assouvir ses

rancunes. Il n'a pas encore remarqué que les hommes irréligieux et les sociétés secrètes sont ceux qui subventionnent les assassins et les fabricants de bombes; ils ne s'attaquent d'abord aux diverses religions que pour augmenter le nombre des hommes sans foi ni loi et en arriver enfin à bouleverser l'État lui-même.

Et voyez quelle forme a revêtue l'action maçonnique: ne pouvant s'attaquer aux personnes, contre qui elle ne trouve aucun grief sérieux, ni aux institutions que la loi ottomane reconnaît et protège, elle s'est donné la triste mission de critiquer le clergé en grossissant aux yeux de la foule naïve les besoins matériels du peuple et la prétendue insouciance du clergé, et en faisant miroiter aux yeux du vulgaire les œuvres de bienfaisance qu'on trouve en Europe et en Amérique. Parle-t-on d'hôpitaux, d'asiles, d'écoles, ou, dans un ordre purement matériel, de routes, de chemins de fer, d'agriculture, d'expositions, et d'autres institutions, d'autres entreprises qu'on voit en Amérique et en Europe? Aussitôt nos philanthropes s'exclament Pourquoi ne nous en donne-t-on point de semblables? (et ‹ on » ici veut dire le clergé); pourquoi ne vend-on pas les biens des couvents, pourquoi ne détruit-on pas les églises pour bâtir des hôpitaux, des asiles d'aliénés, des maisons de convalescence pour les phtisiques! Ainsi ce sont des gens viciés, tombés dans toutes les misères en courant après la fortune ou le plaisir, qui viennent aujourd'hui crier ces réclamations. Je ne dis pas, Dieu m'en garde, qu'il ne faille pas concourir à des œuvres admirables qui sont la gloire du catholicisme; mais il est triste de constater que la demande en est faite par les victimes du vice, ou par des personnes qui ont moins le souci du bien qu'un sentiment de basse haine à exhaler; et qui, sans tenir compte de la pauvreté du pays et du manque de ressources du clergé, voudraient dépouiller les couvents et les sièges épiscopaux des biens qui leur permettent à peine de soutenir leur dignité au sein de la société, d'instruire les enfants pau vres, d'entretenir les écoles primaires dans bien des villages et de donner l'indispensable aux desservants de tant de communes du Liban.

Ils n'ont garde d'ajouter que les Français ploient sous les impôts, que la spoliation des congrégations, loin de les enrichir, les a appauvris, puisque leurs impôts de l'an 1900 à l'an 1906 ont passé de trois milliards et demi à quatre milliards, que c'est grâce à ces impôts que l'on construit des écoles et des hôpitaux et qu'on subventionne des compagnies de chemin de fer. Ils ne disent pas que le Français paie chaque année à son gouvernement 6 francs pour une bicyclette, 10 francs pour un piano, 10 francs pour un chien, 21 francs pour un fusil et ainsi de suite pour tout ce qu'il possède, qu'il paie son tabac 0 fr. 80 les 50 grammes, et son café 4 francs le kilog. Avec de pareils impôts il n'est pas difficile de faire quelques belles constructions; pour moi personnellement je puis m'engager à construire un hôpital et un chemin de fer, le jour où 20.000 Libanais s'engageront à m'acheter tout leur tabac à 0 fr. 80 les 50 grammes et tout leur café à 4 francs le kilog. Mais pourquoi argumenter plus longtemps avec les adeptes des sociétés secrètes : maçons et jeunes Turcs, dont la bonne foi est pour le moins douteuse. Il suffira

d'un peu de réflexion et M. le gouverneur verra que tous ces gens n'attaquent les diverses religions, chrétienne et musulmane, que pour augmenter le nombre des bandits qu'ils espèrent lancer un jour contre le pouvoir civil. Les philosophes français du XVIIIe siècle n'attaquaient d'abord que le clergé, mais ils ont fini par faire massacrer le gouverneur de la Bastille et guillotiner leur roi.

Le Patriarche Maronite, ému des agissements et des mensonges de la Maçonnerie, société secrète, aussi dangereuse pour le trône que pour l'autel, publia un mandement en date du 15 janvier 1906, et condamna, à la suite des Souverains Pontifes, la secte et ses adhérents, prononçant l'excommunication contre les Maronites qui s'y feraient admettre. Cette mesure était vraiment nécessaire, à preuve qu'elle excita la colère des sectaires et leur fit pousser des cris de rage; elle était opportune, car elle dévoila les traîtres et mit fin aux hypocrisies. Voilà le jugement que nous croyons pouvoir porter à distance des événements: il fallait absolument avertir les bons du danger, condamner les mauvais et redire à tout le monde Celui qui rougit de moi et de ma doctrine, je rougirai de lui devant le Père Éternel et ses saints anges.

La tempête déchaînée par l'acte énergique du Patriarche Maronite n'est pas encore près de s'apaiser. Les Maçons d'Égypte lui adressèrent une réponse relativement courtoise; ceux du Liban s'agitent d'une façon désespérée; et un certain Maçon citoyen français » établi à Beyrouth, et qui n'a pu encore trouver le moyen de gagner son pain bien qu'il se fut donné pour l'Apôtre de la laïcisation, a trouvé spirituel de publier, dans un français de nègre, un pamphlet contre le Patriarche.

Que sortira-t-il de tout ce mouvement? C'est le secret de Dieu. Pour nous qui aimons les Maronites et qui suivons avec intérêt la crise qu'ils traversent à cette époque de transition, nous ne pouvons nous empêcher de faire, en terminant, certaines constatations :

L'esprit d'irréligion et d'insubordination, qui vient de se manifester au sein de la communauté, provient en grande partie d'Amérique; nul ne saurait le contester. C'est de là déjà, de La Fayette et des hommes qui avaient fait avec lui l'expédition d'Amérique, que provint en partie l'irréligion française et la révolution qui devait aboutir à la décapitation du roi Louis XVI, mais il appartient du moins aux Maronites de ne laisser à leurs adversaires aucun prétexte que leur mauvaise foi puisse exploiter contre eux. Ils mettront de plus en plus de soin à former leur clergé à la science, à l'esprit chrétien et au zèle afin que le clergé sache grouper les hommes autour de lui et leur en imposer par son instruction et son dévouement. N'y aurait-il pas lieu de faire un petit et un grand séminaire des deux maisons de Mar-Abda et d'Aïn-Ourca et de leur imposer un nouveau plan d'études?

Quant aux congrégations religieuses, elles doivent évidemment éviter de donner prise à la critique et pratiquer la pauvreté, la charité chrétienne et l'obéissance. Il ne faut pas oublier du moins qu'elles ont été fondées au Liban dans un but de sanctification personnelle et non d'œuvres sociales. Comment leur demander dès lors de fonder des hôpitaux, des écoles gra

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tuites, des orphelinats? D'ailleurs leur richesse est exagérée à plaisir par leurs ennemis. En déduisant les impôts et les frais inéluctables, les douze cents moines maronites ne disposent guère que d'un revenu de trois cents mille francs, c'est-à-dire de deux cent cinquante francs par personne. Si un de leurs adversaires est jaloux de leur sort et se trouve disposé à mener leur vie durant un an pour deux cent cinquante francs, je serais heureux de le connaître.

Du moins le Patriarche actuel a obligé les moines à soigner les études, c'est bien la réforme fondamentale par laquelle il fallait commencer. Lorsqu'ils compteront des hommes aussi instruits qu'intelligents et que ceux-ci seront appelés à diriger leur communauté, ils se rendront compte que la vie contemplative ne suffit peut-être pas, car la population travaillée par des meneurs malhonnêtes, croit de moins en moins à une vertu qui ne conduirait pas à des actes de bienfaisance sociale et de philanthropie.

Nous n'avons pas d'ailleurs à recevoir de leçons des maçons citoyens français établis à l'étranger : Il nous souvient toujours qu'au temps où nous allions à Londres, le Guide Bædecker (9o édition, Leipzig, 1894, p. 1), nous recommandait de ne répondre à aucune question qu'on nous adresserait en français, « car une question de ce genre est en général le préliminaire d'un vol ou d'une escroquerie ».

Les Maronites n'ont pas à recevoir de conseils de ces gens-là; ils s'efforceront, sous l'intelligente direction de leur Patriarche et de leurs évêques, de faire mieux que par le passé, car des temps plus difficiles demandent des efforts plus considérables et plus soutenus; nous sommes convaincu qu'avec l'aide de Dieu ils réussiront et que leur communauté n'aura rien à envier à aucune autre.

Paris, octobre 1906.

K. MOKLĖS.

ERRATA AUX PAGES 257 à 273.

1o Nous avons introduit à tort « la Russie» et les Russes », p. 257, 1. 25; p. 260, 1. 4 et av.-dern. ligne, car le mot arabe peut être traduit par « les têtes ».

2o De même pour le « Perse », p. 259, 1. 5 et 31; p. 273, l. 9, car on peut traduire par un nom propre : « Farès».

3o P. 261, dern. ligne, traduire et que je suis (du rit) des Syriens, et que je lui ai consacré cette poésie ».

4o P. 268, av.-dern. ligne, traduire : « un bassin où déborde la puissance (de Dieu) ».

5o P. 270, 1. 13, traduire : « Visite (l'église de) Saint-Sharbil ».

M. ASIN Y PALACIOS.

BIBLIOGRAPHIE

DRAGUTIN N. ANASTASIJEWIC, Die paränetischen Alphabete in der griechischen Literatur, in-16, 96 pages, Munich, Wolf Sohn, 1905.

Cette brochure est une dissertation inaugurale, présentée par l'auteur à la Faculté de philosophie supérieure de l'Université de Munich, pour l'obtention du Doctorat. Elle traite de ces poèmes alphabétiques qui furent longtemps en vogue, dans les pays de langue grecque, sous l'empire romain et à l'époque byzantine.

Une introduction donne d'abord la définition de ces poèmes, dont quelques-uns sont écrits en prose. Une certaine correspondance entre l'ordre alphabétique et celui des lettres qui commencent chacune des parties successives de ces morceaux, voilà la caractéristique du genre; mais dans ce genre on trouve toutes les variétés, tant au point de vue de la forme qu'à celui du contenu et de la nature littéraire des différents poèmes. Tantôt ce sont de simples acrostiches alphabétiques, chaque lettre de l'alphabet servant d'initiale à un seul vers, et chaque vers ayant un sens complet; ailleurs, la même lettre est répétée plusieurs fois, ou bien, les vers étant unis en strophes, les lettres de l'alphabet commencent successivement chacune des strophes, etc. Les sujets ne sont pas moins variés que les combinaisons de formes il y a des prières, il y a des chants d'église, il y a des poèmes de circonstance, il y a surtout de la littérature édifiante », mais il y a aussi des couplets érotiques.

La dissertation se compose de deux grandes parties dans la première, l'auteur étudie séparément, en indiquant chaque fois le sujet et la forme spéciale, et en suivant l'ordre chronologique, jusqu'à 36 poèmes de ce genre. Dans la seconde, notablement plus courte, il groupe logiquement ces différents poèmes, et les explique, soit par leurs origines qui remontent jusqu'aux poèmes gnomiques de l'antiquité, soit par le rapprochement qu'il établit entre eux et certaines œuvres de la littérature du moyen âge, même françaises, telles que l'ABC à femmes et l'alphabet moral à l'usage des grands enfants.

Tous ces petits poèmes, additionnés ensemble, ne donneraient sans doute pas une forte somme de beautés littéraires, mais on aimerait tout de même à s'en rendre compte directement, et l'on regrette que les citations soient si rares la dissertation ne renferme guère que des titres, des descriptions et des analyses. Mais, malgré cette sécheresse, elle est très claire,

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