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l'Église au prix de la pénitence accomplie pendant la vie monastique dont l'habit est le symbole extérieur. Il est vrai que cette doctrine nous est présentée ici sous son aspect le plus sévère, imaginé et maintenu par un parti de la chrétienté primitive, à savoir que les fautes graves ne pourraient être remises aux chrétiens qu'une seule fois après le baptême. « Ce n'est qu'une seule fois que les serviteurs de Dieu peuvent faire pénitence (1). » Quelle différence cependant entre cette opinion et celles des durs sectaires, montanistes ou novatiens! Ceux-ci reconnaissaient, il est vrai, que l'Église avait le pouvoir de lier et de délier, mais ils enseignaient que cette autorité ne devait jamais s'exercer de crainte d'encourager les pécheurs, et que tout Chrétien qui tombe après le baptême est damné sans aucune espérance! Ceux au contraire qui maintenaient la doctrine exprimée dans le rite copte, ont vu dans le sacrement de la pénitence un second baptême, quoique, comme l'ont dit les pères cités par le Concile de Trente, un baptême laborieux (2)» par lequel on recouvre avec beaucoup de peine l'état d'innocence perdu. Selon une prière copte, les péchés commis dans l'ignorance étaient seuls ainsi pardonnés à la prise d'habit. On croyait sans doute que seuls ceux qui avaient perdu la lumière donnée par le baptême, et qui dès lors ne voyaient ni la vraie nature ni les vrais résultats du péché mortel, pouvaient consentir à le commettre. C'est surtout l'admonition ou catéchésis adressée au nouveau moine, à la fin du rite, qui expose definitivement ce caractère sacramentel du vœu monastique et toute sa signification. Les prières font allusion aux pratiques pénitentielles qui caractérisent la vie ascétique : le travail, le jeûne, la solitude, l'obéissance, la méditation, la soumission aux supérieurs. Du reste, les Coptes ne regardaient pas les moines en général comme de grands pécheurs convertis. Bien que certains malfaiteurs, comme l'avait été saint Moïse, aient pu expier leurs vols et leurs assassinats dans un monastère, la plupart de ces bons religieux avaient trouvé leur vocation dès leur enfance. Leur pénitence volontaire était faite surtout pour le profit de ceux qui restaient dans le monde, et non pour leurs propres

(1) Servis Dei poenitentia una est. Hermas, Pastor, lib. II, mand. iv, 1. (2) Voir Morin, De Disciplina in adm. Sacr. Pænitentiæ, etc., 1685, p. 140.

iniquités. L'histoire des patriarches coptes nous renseigne longuement sur les moines du monastère de saint Macaire, sur leur puissante intercession, sur les bons exemples qu'ils donnaient à tout le pays et des conversions qu'ils opéraient. Elle nous indique par le menu ce qu'était un monastère égyptien.

Ce caractère pénitentiel de la vie monastique a été évidemment reconnu dans toute l'Église. Voilà pourquoi il a été retenu dans les Églises séparées. « L'état monastique est, » dit un célèbre auteur dominicain, « un état de pénitence perpétuelle et volontaire, et certaines pratiques pénitentielles autrefois usitées partout ne se trouvent aujourd'hui que dans les maisons religieuses (1). » La même chose a été reconnue par un évêque grec, Siméon de Thessalonique, qui, après avoir remarqué le caractère pénitentiel de l'habit monastique, ajoute que les moines disent leurs offices dans la narthex de l'église, à l'endroit où, d'après l'ancienne loi, les pénitents devaient, pendant la messe, se tenir éloignés des autres fidèles (2). A cette même discipline primitive appartient la prostration devant l'autel, dont l'usage existe aussi dans quelques ordres latins. Elle rappelle la classe des pénitents appelés « prosternés (3) », car ils étaient obligés de se tenir prosternés durant toute cette partie de la liturgie à laquelle il leur était permis d'assister. Aussi les Grecs et les Coptes se servent-ils du mot grec metanoea, ou pénitence', pour désigner une prostration (4). Un des bons résultats de l'étude des formules liturgiques des différents pays c'est que l'on trouve partout l'Église se servant des mêmes symboles et parlant le même langage dont chaque mot peut avoir une signification profonde. Car ces rites anciens appartiennent presque tous aux siècles heureux qui précédèrent les séparations et les schismes; les Coptes, en particulier, ont très peu ajouté au cérémonial primitif. Parmi les (1) Goar, Euchologion, p. 518. (2) Ibid.

(3) Substrati, úпoпiптOVτEÇ.

(4) On dit en arabe darab metânuwah ou wada metànuwah ‘faire une prostration'. On employait le mot metanoea aussi en latin au moyen âge dans le même sens. Morin, op. cit., p. 4. La pénitence donnée en confession est appelée par les Grecs et les Coptes zavóv, kanun, bien qu'elle consiståt souvent en des melanocas avec des prières.

Latins, chaque ordre a sa forme propre de prise d'habit et de profession. Mais l'Église grecque-orthodoxe, comme les Coptes, n'a qu'un seul ordre de moines, et ses rites ont une ressemblance frappante avec ceux de la vieille communauté égyptienne destinés à la même fin. On y trouve la même épître, où il est parlé de l'armure divine, dont l'habit monastique est un symbole. Il protège celui qui le porte contre les assauts des êtres malins. Bien que l'évangile choisi ait rapport à la rigueur de la vie ascétique et non pas au caractère baptismal des vœux, les prières ont à peu près la même signification que celles des Coptes, et les phrases mêmes y sont quelquefois identiques. Aussi coupe-t-on les cheveux au moine et lui donne-t-on une croix. L'admonition grecque, plus étendue que celle des Coptes, bien qu'elle ne contienne pas la vision de saint Antoine, porte à peu près comme celle que nous publions ici: «Voici la vocation nouvelle! Voici un don mystérieux! C'est un second baptême que tu reçois aujourd'hui, mon frère, par les dons surabondants de Dieu, qui aime le genre humain. Tu t'es purifié de tes péchés et tu t'es fait un fils de la lumière, pendant que le Christ lui-même, notre Dieu, se réjouit avec ses saints anges sur ta pénitence. »

Mais cette ressemblance ou identité des doctrines et des rites des Grecs-orthodoxes avec ceux des Coptes a été souvent remarquée, entre autres par un savant prélat russe il y a cinquante ans. «<< Pendant deux voyages en Égypte, dit-il (1), j'ai visité les églises coptes, dans les villes et dans la campagne, leurs monastères et les maisons de leurs évêques; j'ai observé leur culte, j'ai causé avec leurs moines, leurs évêques et leur patriarche, et j'ai trouvé que ces chrétiens possèdent une théologie, des canons ecclésiastiques, des rites, des institutions, et une hiérarchie, qui ressemblent assez aux doctrines, aux ordonnances, au cérémonial et aux règlements de l'Église orthodoxe, à l'exception de quelques particularités. Je me figure l'Église copte comme une branche d'olivier à moitié séparée du tronc et inclinée vers la terre, mais de manière que son

(1) Matth.. x, 37.

(2) вѣроученіе, Богослуженіе, Чиноположеніе и Правила церковнаго благочинія Eгпиетскиxь Xристiашь (Kоптовь). Par A. Porfirief Ouspenski. Saint-Pétersbourg, 1856. Préface.

écorce est encore unie à celle du vieil arbre et en reçoit toujours la sève. Dieu seul sait quand cette branche adhérera de nouveau complètement à l'arbre vivifiant. » Il ajoute ailleurs que dans les cérémonies d'ordination du lecteur, du diacre et du prêtre coptes (1), on croit entendre la voix de l'Église orthodoxe. Quant à l'hérésie monophysite des Coptes, il en nie l'existence (2). Dans le même livre, pour justifier ses paroles, il publie, en russe, une grande partie des rites coptes, des canons, et quelques sommaires de la doctrine chrétienne rédigés par des Coptes.

Il semble que les Coptes n'ont pas de rite prescrit pour la prise d'habit du novice, du moins l'ordinal ici transcrit n'en donne pas. Le postulant est sans doute reçu solennellement dans l'ordre, avant de passer les trois ans d'instruction dont parle la première rubrique, années durant lesquelles il étudie la règle, probablement la vieille règle de saint Pachôme, et médite sur la signification de la vie qui sera la sienne (3). Les rites que nous publions ci-dessous semblent correspondre aux deux rites grecs employés respectivement pour ceux qui vont entrer dans le second rang de l'ordre monacal, celui « du petit habit», et pour ceux qui aspirent au troisième et plus haut rang, celui « du grand habit angélique (4) ». Le moine grec du petit habit ajoute, lors de sa profession, un manteau ou pallium (5) à sa tunique (6); il reçoit aussi la ceinture et le bonnet (7) du novice. Celui qui prend le grand habit ajoute au manteau un capuchon (8) et un scapulaire (9). C'est ce scapulaire qui a gardé chez les Coptes le nom grec de a ou habit par excellence. D'après une légende, la façon de le porter fut révélée à saint Antoine par un ange, aussi on l'appelle l'habit angélique et on le considère comme un symbole particulier

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de la « vie angélique (1) » que le moine doit mener. Chez les Coptes il est en cuir, se porte naturellement sur les épaules, et a des bandes pendantes pour ceindre la taille, de sorte qu'ElMakrizi, au XVe siècle, dit, de manière un peu vague, que le pa (2) est une courroie en cuir marquée de croix dont les moines se ceignent; il le confond peut-être avec la vraie ceinture (3) qui est aussi en cuir. On voit donc que l'habit du moine copte est presque identique avec celui des grecs, malgré quelques petites différences. On a rejeté, semble-t-il, le capuchon des anciens religieux de Saint-Pachôme; et même, au moyen age, on ne portait plus sur la tête que le bonnet noir et pointu en laine qui était regardé comme le symbole d'une sainteté particulière, puisque c'était le casque du salut (4). Aussi traduit-on en arabe les mots grecs et coptes qui signifient « capuchon » par un mot qui veut dire « bonnet ». Aujourd'hui les moines égyptiens ne portent que des tuniques noires et un turban de même couleur sur une calotte, comme les prêtres séculiers.

Quant à la date d'origine de ces rites, on ne peut dire rien de précis. Mais elle doit être antérieure à celle du schisme de Chalcédoine, car, selon le témoignage de l'évêque russe cité plus haut: « Plusieurs de leurs prières sont mot à mot identiques avec les nôtres, ce qui veut dire qu'elles existaient déjà avant l'année 451 ». On sait que l'Égypte est le berceau de la vie monastique, et que saint Antoine, le père des moines, et saint Pachôme, le père des cénobites, ont vécu dans ses déserts ou aux bords de son grand fleuve, il paraît donc fort probable que ces formules monastiques des Coptes ont pris naissance dans l'entourage de ces saints vers le iv ou le Ve siècle.

Le texte ci-joint est extrait d'un très beau manuscrit coptearabe de la Bibliothèque bodléienne d'Oxford (Bodl. 111). II

(1) Goar, Euchol., p. 472.

(2) En arabe askim.

(3) óvn, en arabe zûniyah.

(4) Son nom arabe est kalansuwah, mot employé pour traduire le terme copte κλαφτ et meme κουλλα (κουκούλιον).

ORIENT CHRÉTIEN.

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