Obrázky na stránke
PDF
ePub

respondre secrètement avec la France, l'Angleterre et le SaintSiège romain; le pape Benoît XII acheva de lever ses scrupules, en lui déclarant que son serment était nul, comme «< étant injurieux à Dieu et extorqué par la violence (1) ». Mais le catholicos, encouragé par une partie du peuple, du clergé et de la noblesse, fit au roi de vives représentations et l'accusa de perdre la nation par ses imprudences. Léon V, raconte Hayton, répondit à ces remontrances en faisant déposer Jacques II (1340). Un peu plus tard, Mekhitar de Kerna fut élu catholicos (13411355).

(A suivre.)

F. TOURNEBIZE.

(1) Rayn., ann. 1337, n. 24; an. 4, p. 1, Ép. com. CD, 1 mai 1338. Nous ne sommes pas de l'avis du marquis de Serpos (Compendio storico..., 3 vol. in-8, 1. IV, p. 110); cet auteur prétend que Léon V aurait déposé le catholicos à cause de la sympathie trop marquée de celui-ci pour les Frères-Unis.

MÉLANGES

I

L'ORIGINE ESPAGNOLE DU FILIOQUE

Un des reproches les plus graves que l'Église grecque orthodoxe fait encore aujourd'hui à l'Église romaine est le dogme de la procession du Saint-Esprit ex utroque et l'insertion du mot Filioque après procedentem ex Patre dans le symbole de NicéeConstantinople. Naguère (1895), le patriarche Anthime, dans sa lettre synodale en réponse à l'encyclique Præclara (20 juin 1891) de Léon XIII, opposait sur ce point la foi de l'Église des sept conciles œcuméniques à la croyance de l'Église papique. Mgr Duchesne, membre de l'Institut, répondit à la synodique du patriarche de Constantinople (1). Sa Béatitude avait dù reconnaître que l'Église romaine n'avait pas introduit elle-même cette addition. En effet, l'insertion du Filioque au symbole s'est produite en Espagne vers le vr siècle; elle a été acceptée dans les Gaules et chantée à la messe sous Charlemagne. Cependant Rome s'abstenait. La procession du Saint-Esprit ex Filio n'est pas affirmée (2) dans la profession de foi du pape Pélage Ier (555-561). Quoiqu'elle soit expressément enseignée (3) par saint

[blocks in formation]

(2) Pat. Lat., t. LXIX, col. 409; Hahn, Bibliothek der Symbole, 3o édit., Breslau, 1891, p. 331; Monumenta Germaniæ, Epist. Merovingici et Karolini ævi, Berlin, 1892, t. III, p. 78.

(3) Moralia in Job, 1. I, n. 30, Pat. Lat., t. LXXV, col. 511; 1. V, n. 65, col. 715; Homil., XXVI, in Evangel., n. 2, Pal. Lal., t. LXXVI, col. 1198. Cf. Pat. Lat. t. LXXVII, col. 145.

Grégoire le Grand (590-604), la formule en est omise à dessein dans la profession de foi émise par le pape Agathon en 680 (1). Lors du conflit suscité à Jérusalem entre les moines indigènes et les religieux francs au sujet du Filioque, le pape Léon III (795816) envoya aux moines, en 809, la formule authentique de l'Église romaine, qui ne contenait pas encore le Filioque, puisqu'elle était vraisemblablement conforme à celle que contient le sacramentaire gélasien (2); quelques mois plus tard, il déclara aux missi dominici de Charlemagne qu'il regrettait l'insertion du Filioque au symbole, et il conseilla d'abandonner peu à peu la coutume de chanter le symbole à la messe. Le texte qu'il fit afficher, en grec et en latin, à la confession de Saint-Pierre à Rome, conservait la teneur commune à Rome et à l'Église grecque (3). L'usage de chanter le symbole à la messe ne s'introduisit à Rome qu'au x1° siècle. L'insertion du Filioque, d'abord tolérée en Espagne et en Gaule, finit ainsi par être acceptée à Rome. Cependant, la doctrine de la procession du Saint-Esprit ex utroque était explicitement enseignée par les Pères latins du Ive siècle, et notamment par saint Augustin (4). Quant à la plus ancienne formule expresse de la procession ex Patre et Filio, on la retrouvait jusqu'ici dans une profession de foi rédigée par un synode espagnol du ve siècle. Les collections des conciles de l'Espagne l'attribuaient au Ier concile de Tolède, tenu en 400 (5). Mais depuis longtemps on a constaté que cette attribution soulevait de graves difficultés. L'introduction du document déclare que cette règle de foi a été faite par les évêques de quatre provinces ecclésiastiques de l'Espagne et envoyée par eux avec un ordre du pape saint Léon à Balconius, évêque de Galice. Or saint Léon ne monta sur la chaire de saint Pierre qu'en 440. Les évêques espagnols, réunis en concile en 400, n'ont donc pu en

(1) Pat. Lat., t. LXXXVII, col. 1165.

(2) Muratori, Liturgia romana vetus, t. I, p. 540; reproduit par Migne, Pat. Lat 1. LXXIV, col. 1089-1090.

(3) M Duchesne, Le Liber pontificalis, Paris, 1892, t. II, p. 46, note 110. Cf. Hergenrother, Theologische Quartalschrift, 1858, p. 606, 614. Voir cependant Pat. Lat., t. CII, col. 1031.

(4) Franzelin, Tractatus de Deo trino secundum personas, th. XXXV, 3a édit., Rome, 1881, p. 493-509; A. Harnack, Dogmengeschichte, 2° édit., Leipzig, 1888, t. II, p. 294 sq.

(5) Mansi, Concil., t. III, col. 1003. Elle a été autrefois attribuée à saint Augustin. Voir Serm., ccxxxIII, Pat. Lal., t. XXXIX, col. 2175-2176.

voyer à leur collègue Balconius un écrit de ce pape. Baronius a conjecturé que cette règle de foi avait été libellée seulement au concile de Tolède de 417. Quesnell l'a démontré. Pagi et Mansi l'ont reconnu. Dom Ceillier (1) la lui attribue expressément. Les frères Ballerini ont supposé qu'en 400 elle ne contenait pas le Filioque, qui ne fut ajouté qu'en 147 en raison de la lettre XV de saint Léon à Turibius, évêque d'Astorga, dans laquelle la procession ex utroque était formellement affirmée (2). Quesnell avait fait déjà fait cette hypothèse. Hefele (3) a catégoriquement rapporté cette règle de foi au II concile de Tolède (117). Mais dom Gams (1) ne trouvait dans l'histoire aucune trace de ce concile qu'il rayait définitivement de la liste des synodes espagnols. Rösler (5) a maintenu la date de 100. Comme il constatait qu'auparavant le poète Prudence avait affirmé dans ses vers la procession ex utroque, il en concluait que cette doctrine était courante en Espagne à cette époque, et que, par suite, les évêques réunis en 400 avaient bien pu la formuler dans leur profession de foi. Mais Prudence (6) n'emploie pas explicitement le terme procedens. Aussi Merkle (7) a-t-il énergiquement maintenu l'attribution de la confession de foi au synode de 447. Dom Morin (8) a abouti à des résultats bien différents. Selon lui, cette profession de foi n'est ni du synode de 400 ni de celui de 117. Loin d'être une règle de foi officielle, elle n'est que l'œuvre privée de Pastor, évêque de Galice en 433. Aussi

(1) Histoire générale des auteurs sacrés et ecclésiastiques, Paris, 1747, t. XIV, p. 625.

(2) Pat. Lat., t. LIV, col. 681. Mr Macaire, évêque de Vinnitza et recteur de l'Académie ecclésiastique de Saint-Pétersbourg, Théologie dogmatique orthodoxe, trad. franç., Paris, 1860, a prétendu que le Filioque avait été interpolé postérieurement dans la règle de foi du concile de Tolède de 447. Cf. Franzelin, Examen doctrinæ Macarii Bulgakow... de processione Spiritus sancti, Rome, 1876, p. 81. (3) Conciliengeschichte, 2o édit., Fribourg-en-Brisgau, 1875, t. II, p. 78, 306-307. Cf. Denzinger, Enchiridion, n. 113; Franzelin, Tractatus de Deo trino, 3° édit., Rome, 1881, p. 511.

(4) Kirchengeschichte Spaniens, Ratisbonne, 1861, t. II a, p. 475 sq.

(5) Der katholische Dichter Aurelius Prudentius Clemens, Fribourg-en-Brisgau, 1886, p. 366 sq.

(6) Cathimeron, IV, 11, 15; vi, 4-8, Pat. Lat., t. LIX, col. 812, 831-832.

(7) Das Filioque auf dem Toletanum 447, dans Theologische Quartalschrift, Tubingue, 1893, p. 408-429.

(8) Pastor et Syagrius, deux écrivains perdus du Ve siècle, dans la Revue bénédictine, 1893, t. X, p. 385-390.

l'existence du concile plénier de Tolède en 147 peut-elle être légitimement contestée.

M. Karl Künstle, professeur de théologie à l'Université de Fribourg-en-Brisgau, reprenant et confirmant tous les doutes anciens, vient de démontrer que ce synode n'a pas eu lieu (1). Un évêque contemporain, Hydatius Lemicus (127-468), dans sa Chronique (2), ne parle pas de ce concile. Merkle a cherché, il est vrai, à expliquer cette lacune par le silence que le chroniqueur garde sur d'autres conciles de l'époque. Son silence s'explique par son but, qui n'était pas d'écrire une histoire ecclésiastique universelle et complète. Mais écrivant l'histoire ecclésiastique de l'Espagne, il ne pouvait se taire sur un concile qui aurait eu lieu à Tolède en 417 contre les priscillianistes. Il signale pour cette année un concile de Rome, dont les décrets ont été portés en Espagne par Pervincus, diacre d'Astorga. D'ailleurs, la lettre XV de saint Léon à Turibius d'Astorga, qui ordonne la tenue d'un concile, n'est pas authentique. Elle a été fabriquée par un clerc espagnol après le concile de Braga de 563, dans lequel l'évêque Lucrétius, 120 ans après l'événement, affirmait l'existence d'une règle de foi antipriscillianiste, rédigée à Tolède et envoyée à Balconius, évêque de Braga. Cette affirmation sans valeur aurait incité aussi le compilateur des conciles d'Espagne à attribuer au synode de 400 la profession de foi, rédigée par l'évêque Pastor. Tous les arguments de M. Künstle contre l'existence du concile de 447 ne sont pas sans réplique et sa critique donnait le vertige au P. d'Alès, qui lui a opposé de sérieuses objections (3). Il reste prouvé toutefois que la regula fidei, qui était attribuée à ce concile et qui contenait, croyait-on jusqu'ici, la première attestation du Filioque, est l'œuvre privée de Pastor, évêque de Galice. La célèbre formule a Patre Filioque procedens serait donc néanmoins de provenance espagnole.

Mais M. Künstle, dont la critique n'est pas exclusivement négative, a montré que le Libellus in modum symboli de Pastor n'était pas le témoignage le plus ancien de cette formule. Il a trouvé la procession du Saint-Esprit a Patre et Filio

(1) Antipriscilliana, Fribourg-en-Brisgau, 1905, p. 30-35.

(2) Monumenta Germaniæ. Auctores antiquissimi, Berlin, 1891, XI, p. 24. (3) Études, 5 février 1906, p. 407.

« PredošláPokračovať »