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Les majeurs qui n'avaient plus ni père ni mère, fussent-ils des garçons mineurs de trente ans, pouvaient se marier en toute liberté, sans aucune espèce d'autorisation (1).

Enfants naturels

L'obligation imposée aux enfants, soit d'obtenir, soit au moins de requérir le consentement de leurs parents, n'était qu'un dérivé de la puissance paternelle. Cette puissance étant elle-même un des effets civils du mariage, les père et mère ne pouvaient l'exercer que sur leurs enfants légitimes. Les bâtards échappaient donc à la nécessité de requérir, pour se marier, le consentement de leurs parents (2). Cette doctrine fut nettement consacrée dans un arrêt du 1er février 1662, qui nous est rapporté par Pothier. Un fils naturel âgé de vingt-trois ans, muni d'une charge de secrétaire du roi, avait épousé la fille d'une vendeuse de chapeaux sous le petit Châtelet. Sa mère crut pouvoir interjeter appel comme d'abus, sous prétexte qu'elle n'avait pas consenti au mariage; mais la cour débouta la plaignante, en mettant les parties hors de cause (3).

Ce n'est pas à dire que les bâtards mineurs fussent abandonnés à eux-mêmes dans l'importante affaire de leur mariage. Ils avaient besoin du consentement de leur tuteur, et s'ils n'en avaient point, il fallait leur en nommer un pour la circonstance.

(1) Duguit, Du rapt de séduction (op. cit.), p. 624.

(2) Nous verrons qu'il en est tout autrement sous l'empire de notre code civil.

(3) Pothier, Traité du contrat de mariage, no° 342.

APPENDICE

Les protecteurs naturels de l'enfant, c'est-à-dire ses parents et son tuteur, n'ont pas toujours été les seuls à jouer un rôle dans l'affaire de son mariage. On vit souvent intervenir le suzerain dans le mariage des femmes propriétaires de fiefs, le seigneur dans le mariage des serfs, le roi dans le mariage des princes du sang.

Il nous reste, pour être complet, à dire un mot de chacun de ces points.

A. Mariage des femmes propriétaires de fiefs

A l'époque féodale, la jouissance d'un fief entraînait certaines charges incompatibles avec la faiblesse de la femme, notamment le service militaire. Aussi, tant qu'une femme n'était pas mariée, la jouissance de son fief appartenait au seigneur qui exerçait sur elle la tutelle féodale. Dès qu'elle avait un mari, c'était à lui que revenait naturellement la possession du fief; mais comme le seigneur avait intérêt à se ménager de fidèles vassaux, la femme ne pouvait se marier sans son agrément.

A l'origine même, le seigneur choisissait personnellement l'époux de sa vassale. Certaines coutumes

l'autorisaient, en effet, à lui présenter une liste de trois candidats, en dehors desquels la femme ne pouvait porter son choix, sous peine de perdre le fief. D'autres coutumes allaient jusqu'à permettre au seigneur de forcer la femme à prendre mari, pour que le fief ne restât pas sans titulaire.

Ces règles furent appliquées avec plus ou moins de rigueur jusqu'au XVe siècle environ. A cette époque, la décadence de la féodalité devenant de plus en plus marquée, la nécessité de l'autorisation seigneuriale disparut, et le consentement des père et mère demeura seul nécessaire.

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La loi civile ne reconnaissait même pas, à l'origine, le mariage des serfs. De bonne heure, l'Eglise parvint à faire valider les unions serviles, mais il fallut de longs efforts pour les soustraire complètement à l'influence des seigneurs, et ce n'est guère qu'au XIIe ou au XIIIe siècle, que l'Eglise put avoir définitivement raison de cet abus.

La résistance des seigneurs s'affirma surtout dans le cas où les serfs appartenaient à deux maîtres différents. C'est qu'alors une double perte atteignait le propriétaire de la serve: la perte de la serve elle-même et celle des enfants à naitre du mariage. On avait imaginé diverses combinaisons pour atténuer ce résultat. D'ordinaire le propriétaire du serf donnait à l'autre seigneur, soit une indemnité en argent, souvent appelée droit de formariage, soit

une autre serve, ce qui constituait le mariage par échange. En outre, il se faisait entre les deux seigneurs un partage des enfants issus du mariage.

C.

Mariage des princes du sang

C'était une maxime de droit public que les princes du sang ne pouvaient se marier sans le consentement du roi.

Cette règle avait des racines fort anciennes. Au témoignage de Plutarque, Denys le tyran bannit quelques seigneurs pour s'être mariés contre sa volonté, et l'historien Josèphe rapporte que Feroras accusa Salomé devant Hérode, d'avoir, à l'insu du roi, contracté mariage avec l'arabe Sylleus (1). Nous savons par Froissard (2) que le roi Charles VI fit défense au duc de Lancastre d'épouser la fille du duc de Berry sans lui en demander l'autorisation; et sous Charles VII, le comte Jean d'Armagnac fut soupçonné de haute trahison et de lèse-majesté, pour avoir, à l'insu du souverain, promis sa fille au roi d'Angleterre.

Durant tout le moyen âge, on appliqua cette règle, qui reposait sur une tradition constante. Toutefois, le défaut de consentement du roi n'était point alors considéré comme entraînant la nullité du mariage.

Il en fut autrement au XVIIe siècle. On connaît l'incident qui donna naissance à ce nouvel empêchement dirimant. Le 3 janvier 1632, Gaston

(1) Le Prestre, Traité des mariages clandestins, p. 171.

(2) Chroniques, Liv. 4, ch. 104.

d'Orléans avait épousé Marguerite de Lorraine,. malgré la défense du roi Louis XIII. Richelieu s'adressa d'abord à la cour de Rome, pour faire. annuler le mariage; mais le Cardinal, n'ayant point trouvé chez le pape Urbain VIII la condescendance qu'il en attendait, fit saisir le parlement de Paris d'un appel comme d'abus, et par un arrêt du 5 septembre 1634, le mariage fut déclaré nul.

Ce n'était là qu'une décision judiciaire; le roi voulait davantage. Il soumit la question à l'assemblée générale du clergé, et le 30 juillet 1635, celle-ci déclara que la coutume de France défendait, en effet, aux princes du sang de se marier sans le consentement du roi, à peine de nullité du mariage.

Depuis cette époque, on ne connaît aucun exemple de mariage annulé pour défaut de consentement du souverain; mais les rois se servirent de l'arrêt du parlement de Paris comme d'une menace, pour empêcher le mariage des seigneurs (1).

Cette ancienne prérogative des rois de France a laissé des traces dans deux de nos constitutions modernes celle de 1804, qui a créé la dignité impériale, et celle de 1852, qui l'a rétablie.

L'article 12 du sénatus-consulte organique du 28 floréal an XII (18 mai 1804) fit défense à tous les membres de la famille impériale de se marier sans l'autorisation de l'empereur. La violation de cette défense emportait privation de tout droit à l'hérédité pour le délinquant et pour ses descendants. Toute

(1) C'est ainsi qu'en 1670, Louis XIV refusa son consentement au mariage de Mademoiselle et de Lauzun. (Lefevre d'Ormesson, Journal, t. II, pp. 603 et suiv.).

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