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ses amis, il n'aura que le ton le plus simple, et ne s'élevera qu'avec sa matiere. Ainsi la simplicité d'Horace ne fait rien contre le ton soutenu des Géorgiques de Virgile, ni contre celuide Vida, ni même contre celui de Boileau. Car quoique ce dernier n'ait point fait d'invocation, cependant comme ce n'est point une Lettre, et qu'il commence d'un ton élevé, il est censé inspiré en vertu de la coutume établie, et de l'idée où l'on est que les poëtes sont interpretes des dieux. Regles particulieres.

.

Outre les regles générales de la Poésie didactique, il y a quelques observations particulieres par rapport à chaque espece.

Le Poëme historique a le droit de marquer plus vivement les traits, de les faire plus hardis, plus lumineux. Les objets y sont montrés avec plus de détail, on les y voit en quelque sorte. C'est une divinité qui est censée peindre. Elle voit tout sans obscurité, sans confusion; et son pinceau le rend de même. Il lui est aisé de remonter aux causes, d'en développer les ressorts: quelquefois même elle s'éleve jusqu'aux causes surnaturelles. Tite-Live racontant la Guerre Punique en a montré les événemens dans son récit, et les causes politiques dans

les discours qu'il fait tenir à ses acteurs. Mais il a du rester toujours dans les bornes des connoissances naturelles : parce qu'il n'étoit qu'historien. Silius Italicus, qui est poëte, raconte de mème que le fait Tite-Live: mais il peint par-tout : il táche toujours de montrer les objets mêmes; au lieu que l'historien se contente souvent d'en parler, de les désigner.

Le Poëme philosophique doit tendre sur-tout à la lumiere. Le but des Sciences est d'éclairer. Ainsi la méthode doit y étre plus sensible que dans les autres poëmes; et il est moins permis d'y jeter des digressions, qui empêcheroient de suivre le fil du raisonnement. Par la même raison il y aura moins de figures vives, et d'expressions politiques; à moins qu'elles ne concourent à la clarté, en donnant du corps aux pensées: car autrement, il y auroit de la petitesse à sacrifier la netteté et la précision à l'éclat d'un beau mot. Aussi Lucrece suit-il constamment son objet. On ne le voit point au milieu d'un raisonnement s'égarer dans des descriptions inutiles à son but. Il en a quelques-unes dont la matiere pourroit se passer; mais il les place tel lement, soit devant, soit après ses argumens, qu'elles servent, ou à préparer l'esprit à ce quil va dire, ou à le délas

ser

ser, après lui avoir fait faire des efforts. Quant aux Poëmes qui contiennent des préceptes, Horace en a donné la regle en un mot Quidquid præcipies, esto brevis. C'est la briéveté qui plaît sur-tout et qui frappe dans ce genre. Cette briéveté, quand elle est jointe à la clarté, comme Horace le suppose, a plusieurs avantages on en saisit mieux le précepte on l'apprend plus aisément, et on le retient exactement, et pour toujours Ut citò dicta percipiant animi dociles teneantque fideles. Cependant, comme les préceptes sont secs et tristes par eux-mêmes, le poëte qui sait l'art, y joint quelquefois la preuve, afin d'exercer l'esprit. Quelquefois il les accompagne d'un exemple qu'il place tantôt avant, tantôt après. Quelquefois il se contente de les montrer dans l'exemple même sans les exprimer. Il les appuie d'un trait historique, il les égaie par une allusion, les prépare par des images: enfin, quand il craint le dégoût il quitte tout-à-fait son genre pour quelques instans; il devient épique, ou dramatique, dans un degré plus ou moins élevé, selon le ton général de son ouvrage, lequel le suit jusques dans les excursions qu'il fait au-dehors.

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SECONDE PARTIE.

DE LA SATYRE.

CHAPITRE I

Histoire abrégée de la Satyre. LA Satyre n'a pas toujours eu le même

fonds, ni la même forme dans tous les tems. Elle a été différente chez les Grecs et chez les Romains; et chez ces derniers elle a été sujette à des changemens si singuliers, qu'il n'est presque pas possible de la suivre dans toutes ses variations,

Chez les Grecs, c'étoit un spectacle qui tenoit une sorte de milieu entre la tragédie et la comédie. Elle étoit caractérisée par ses acteurs. Ce n'étoient ni des héros, ni des hommes, ni des dieux ; mais des personnages tels qu'un Polypheme, un Autolycus, un Sisyphe, etc. Si on y voyoit des hommes ou des héros, ils n'y faisoient ordinairement que les seconds rôles. Il y avoit des choeurs toujours composés de Satyres jeunes et vieux. Ces derniers qu'on appeloit Sile

nes, parloient toujours avec sagesse et gravité. C'étoit parmi eux qu'on avoit choisi le maître, le gouverneur, le nourricier de Bacchus, qui étoit le dieu du spectacle. Les jeunes étoient faits pour égayer la scene par des plaisanteries, des traits piquans, quelquefois par des bouffonneries et des grossiéretés. Ces poëmes avoient un ton de poésie qui leur étoit propre; et les acteurs avoient aussi leurs gestes, leurs déclamations, leurs danses, leurs parures, qui n'étoient ni celles de la tragédie, ni celles de la comédie («). Il ne nous reste de ce genre de drame que le Cyclope d'Euripide.

Chez les Romains, la premiere poésie, si elle méritoit ce nom, fut ce qu'ils appelerent Satyre, Satura: car nous ne parlons point des metres saturniens, qui n'étoient que de la prose terminée, ni des fescennins, qui n'étoient que des dialogues faits avec quelque symétrie.

Ce furent les Toscans qui apporterent la Satyre à Rome : et elle n'étoit autre chose alors qu'une sorte de chason en dialogue, dont tout le mérite consistoit dans la force et la vivacité des reparties. On les nomma Satyres, parce que, diton, le mot latin Satura, signifiant un

(a) Voyez l'Art poétique d'Horace, vers 218 jusqu'à

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