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pour suivre celles de l'autre ; on se dévétait des sentiments de l'un pour se revêtir des sentiments de l'autre; enfin on quittait, on renonçait, on abjurait le monde où l'on avait reçu sa première naissance, pour se vouer totalement à l'Église, où l'on prenait comme sa seconde vaissance; et ainsi on concevait une très-grande différence entre l'un et l'autre aujourd'hui on se trouve presque en même temps dans l'un comme dans l'autre ; et le mème moment qui nous fait naître au monde nous fait renaître dars l'Église; de sorte que la raison survenant ne fait plus de distinction de ces deux mondes si contraires; elle s'élève et se forme dans l'un et dans l'autre tout ensemble; on fréquente les sacrements, et on jouit des plaisirs de ce monde; et ainsi, au lieu qu'autrefois on voyait une distinc. tion essentielle entre l'un et l'autre, on les voit maintenant confondus et mèlés, en sorte qu'on ne les discerne quasi plus.

De là vient qu'on ne voyait autrefois entre les chrétiens que des personnes très-instruites; au lieu qu'elles sont maintenant dans une ignorance qui fait horreur; de là vient qu'autrefois ceux qui avaient été rendus chrétiens par le baptème, et qui avaient quitté les vices du monde pour entrer dans la piété de l'Église, retombaient si rarement de l'Eglise dans le monde; au lieu qu'on ne voit maintenant rien de plus ordinaire que les vices du monde dans le cœur des chrétiens. L'Eglise des saints se trouve toute souillée par le mélange des méchants; et ses enfants, qu'elle a conçus et portés dès l'enfance dans ses flanes, sont ceux-là mêmes qui portent dans son cœur, c'est-àdire jusqu'à la participation de ses plus augustes mystères, le plus grand de ses ennemis, l'esprit du monde, l'esprit d'ambition, l'esprit de vengeance, l'esprit d'impurete,

l'esprit de concupiscence et l'amour qu'elle a pour ses enfants l'oblige d'admettre jusque dans ses entrailles le plus cruel de ses persécuteurs. Mais ce n'est pas à l'Église que l'on doit imputer les malheurs qui ont suivi un changement si funeste; car, comme elle a vu que le délai du baptême laissait un grand nombre d'enfants dans la inaédiction d'Adam, elle a voulu les délivrer de cette masse de perdition en précipitant le secours qu'elle leur donne; et cette bonne mère ne voit qu'avec un regret extrême que ce qu'elle a procuré pour le salut de ses enfants devienne l'occasion de la perte des adultes.

Son véritable esprit est que ceux qu'elle retire dans un åge si tendre de la contagion du monde, s'écartent bien loin des sentiments du monde. Elle prévient l'usage de la raison pour prévenir les vices où la raison corrompue les entraînerait; et, avant que leur esprit puisse agir, elle les remplit de son esprit, afin qu'ils vivent dans l'ignorauce du monde, et dans un état d'autant plus éloigné du vice qu'ils ne l'auront jamais connu. Cela paraît par les cérémonies du baptême; car elle n'accorde le baptême aux enfants qu'après qu'ils ont déclaré, par la bouche des parrains, qu'ils le désirent, qu'ils croient, qu'ils renoncent au monde et à Satan : et comme elle veut qu'ils conservent ces dispositions dans toute la suite de leur vie, elle leur commande expressément de les garder inviolablement; et elle enjoint, par un commandement indispensable, aux parrains d'instruire les enfants de toutes ces choses; car elle ne souhaite pas que ceux qu'elle a nourris dans sou scin depuis l'enfance soient aujourd'hui moins instruits et moins zélés que ceux qu'elle admettait autrefois au nombre des siens; elle ne désire pas une moindre perfection dans ceux qu'elle nourrit que dans ceux qu'elle reçoit.

Cependant ou en use d'une façon si contraire à l'intention de l'Eglise, qu'on ne peut y penser sans horreur. On ne fait quasi plus de réflexion sur un aussi grand bienfait, parce qu'on ne l'a jamais demandé, parce qu'on ne se souvient pas même de l'avoir reçu. Mais comme il est évident que l'Église ne demande pas moins de zèle dans ceux qui ont été élevés esclaves de la foi que dans ceux qui aspirent à le devenir, il faut se mettre devant les yeux l'exemple des catéchumènes, considérer leur ardeur, leur dévotion, leur horreur pour le monde, leur généreux renoncement au monde ; et si on ue les jugeait pas dignes de recevoir le baptême sans ces dispositions, ceux qui ne les trouvent pas en eux doivent donc se soumettre à recevoir l'instruction qu'ils auraient eue s'ils commençaient à entrer dans la communion de l'Église il faut de plus qu'ils se soumettent à une pénitence telle, qu'ils n'aient plus envie de la rejeter, et qu'ils aient moins d'aversion pour l'austérité de la mortification des seus qu'ils ne trouvent de charmes dans l'usage des délices vicieuses du péché.

Pour les disposer à s'instruire, il faut leur faire entendre la différence des coutumes qui ont été pratiquées dans l'Eglise suivant la diversité des temps. Dans l'Eglise naissante, on enseignait les catéchumènes, c'est-à-dire ceux qui prétendaient au baptème, avant que de le leur conférer; et on ne les y admettait qu'après une pleine instruction des mystères de la religion, qu'après une pénitence de leur vie passée, qu'après une grande connaissance de la grandeur et de l'excellence de la profession de la foi c des maximes chrétiennes où ils désiraient entrer pour jamais, qu'après des marques éminentes d'une conversion véritable du cœur, et qu'après un extrême désir du baptèmic. Ces choses étant connues de toute l'Église, on leur

conférait le sacrement d'incorporation, par lequel ils devenaient membres de l'Église. Aujourd'hui le baptènc ayant été accordé aux enfauts avant l'usage de la raison, par des considérations très-importantes, il arrive que la négligence des parents laisse vieillir les chrétiens sans aucune connaissance de notre religion.

Quand l'instruction précédait le baptême, tous étaient instruits; mais maintenant que le baptême précède l'instruction, l'enseignement qui était nécessaire pour le sacrement est devenu volontaire, et eusuite négligé, et enfin presque aboli. La raison persuadait de la nécessité de l'instruction; de sorte que, quand l'instruction précédait le baptême, la nécessité de l'un faisait que l'on avait recours à l'autre nécessairement au lieu que le baptême précédant aujourd'hui l'instruction, comme on a été fait chrétien saus avoir été instruit, on croit pouvoir demeurer chrétien sans se faire instruire; et au lieu que les premiers chrétiens témoignaient tant de reconnaissance pour une grâce que l'Église n'accordait qu'à leurs longues prières, les chrétiens d'aujourd'hui ne témoignent que de l'ingratitude pour cette même grâce qu'elle leur accorde avantinême qu'ils aient été en état de la demander. Si elle détestait si fort les chutes des premiers chrétiens, quoique si rares, combien doit-elle avoir en abomination les chutes et les rechutes continuelles des derniers, quoiqu'ils lui soient beaucoup plus redevables, puisqu'elle les a tirés bien plus tôt et bien plus libéralement de la damnation où ils étaient engagés par leur première naissance! Elle ne peut voir, sans gémir, abuser de la plus grande de ses grâces, et que ce qu'elle a fait pour assurer leur salut devienne l'occasion presque assurée de leur perte; car elle n'a pas changé d'esprit, quoiqu'elle ait changé de coutume.

D'UN

ÉCRIT SUR LA CONVERSION DU PÉCHEUR.

La première chose que Dieu inspire à l'âme qu'il daigne toucher véritablement, est une connaissance et une vue tout extraordinaire, par laquelle l'âme considère les choses et elle-même d'une façon toute nouvelle.

Cette nouvelle lumière lui donne de la crainte, et lui apporte un trouble qui traverse le repos qu'elle trouvait dans les choses qui faisaient ses délices.

Elle ne peut plus goûter avec tranquillité les oljeis qui la charmaient. Un scrupule continuel la combat dans cette jouissance, et cette vue intérieure ne lui fait plus trouver cette douceur accoutuinée parmi les choses où elle s'abandonnait avec une pleine effusion de cœur.

Mais elle trouve encore plus d'amertume dans les exercices de piété que dans les vanités du monde. D'une part, la vanité des objets visibles la touche plus que l'espérance des invisibles, et, de l'autre, la solidité des invisibles la touche plus que la vanité des visibles. Et ainsi la présence des uns et l'absence des autres excite son aversion; de sorte qu'il nait dans elle un désordre et une confusion qu'elle a peine à démèler, mais qui est la suite d'anciennes impressions longtemps senties, et des nouvelles qu'elle éprouve. Elle considère les choses périssables comme périssantes, et même déjà péries; et, à la vue certaine de l'anéantissement de tout ce qu'elle aime, elle s'effraye dans cette considération, en voyant que chaque instant lui arrache la jouissance de son bien, et que ce qui lui est le plus cher s'écoule à tout moment, et qu'enfin un jour cer

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