Obrázky na stránke
PDF
ePub

suffi de faire connaître qu'un tel est magistrat., afin de lui faire rendre obéissance; mais parce qu'ils sont grossiers et attachés à leurs sens, il a été utile de donner à ces magistrats certains ornements extérieurs qui les distinguassent, et d'ordonner qu'on leur fit certains gestes et pour ainsi dire certaines grimaces qu'on appelle cérémonies; et cette invention a réussi selon le dessein de ceux qui l'ont trouvée.

DE LA SCIENCE.

La plupart des sciences humaines sont si peu de chose en elles-mêmes, et elles contribuent si rarement au bonheur de l'homme, que l'on est tout aussi heureux de les ignorer en les méprisant, que de les savoir en les estimant: il n'y a que la vanité et l'opinion des hommes qui y mettent le prix.

DE L'INSTRUCTION.

L'instruction a pour but de porter les esprits jusqu'au point où ils sont capables d'atteindre.

Elle ne donne ni la mémoire, ni l'imagination, ni l'inteliigence; mais elle cultive toutes ces parties en les fortifiant l'une par l'autre.

On aide le jugement par la mémoire, et l'on soulage la mémoire par l'imagination et le jugement.

Les plus grands esprits n'ont que des lumières bornées, et ils ont toujours des endroits sombres et ténébreux; mais l'esprit des enfants est presque tout rempli de ténèbres : il n'entrevoit que des petits rayons de lumière; ainsi tout consiste à ménager ces rayons, à les augmenter, et à y exposer ce qu'on veut qu'ils comprennent.

DE L'ÉDUCATION.

Rien n'est plus difficile que de se proportionner à l'es

prit des enfants; et c'est avec raison que Montaigne a dit que C'EST L'EFfet d'une ame FORTE ET BIEN élevée de SE POUVOIR ACCOMMODER A CES ALLURES PUÉRILES. Il est facile de faire des discours de morale pendant une heure; mais d'y rapporter toujours toutes choses sans qu'un enfant s'en aperçoive et s'en dégoûte, c'est ce qui demande une adresse bien rare (1).

DE L'ÉDUCATION DES PRINCES.

On doit considérer que le temps de la jeunesse est presque le seul où la vérité se présente aux princes; elle les fuit tout le reste de leur vie : tous ceux qui les environnent ne conspirent presque qu'à les tromper, parce qu'ils ont intérêt de leur plaire, et qu'ils savent qu'on n'y parvient pas en leur disant la vérité.

Il faut donc qu'une personne chargée de l'éducation d'un prince se représente souvent que cet enfant confié à ses soins approche d'une nuit où la vérité l'abandonnera, et qu'on lui imprime par avance dans l'esprit tout ce qui lui est plus nécessaire pour se conduire dans les ténèbres que sa condition apporte avec soi par une espèce de nécessité.

DES SPECTACLES EN GÉNÉRAL.

Il n'y a guère eu que ce siècle-ci où l'on ait entrepris de justifier la comédie, et de la faire passer pour un divertissement qui pouvait s'allier avec la dévotion. La comédie, disent ses apologistes, est une représentation d'actions et de paroles: quel mal y a-t-il à cela? Mais le moyen de se défendre de toute illusion à cet égard est de considérer la comédie, non dans une spéculation chime

Ce problème difficile a été résolu par M. l'abbé Gaultier, dans son Cours d'éducation publié en 1787.

rique, mais dans la pratique commune et ordinaire dont nous sommes témoins. Il faut regarder quelle est la vie d'un comédien, quelle est la matière et le but de nos comédies, quels effets elles produisent dans l'esprit de ceux qui les représentent ou qui les voient représenter, et examiner ensuite si tout cela a quelque rapport avec la vie, les sentiments d'un véritable chrétien.

DU DANGER DES SPECTACLES.

Tout ce qui est spectacle est passion; les sentiments ordinaires et modérés ne frapperaient pas ainsi les sens ue sont pas seulement séduits par l'extérieur; mais l'âme y est attaquée par tous les endroits où sa corruption est sensible.

DU JUGEMENT.

Former le jugement, c'est donner à un esprit le goût et le discernement du vrai; c'est le rendre délicat à reconnaître les faux raisonnements un peu cachés; c'est lui apprendre à ne pas se laisser éblouir par un vain éclat des paroles vides de sens, à ne pas se payer de mots ou de principes obscurs, à ne se satisfaire jamais qu'il n'ait pénétré jusqu'au fond des choses; c'est le rendre subtil à prendre le point dans les matières embarrassées, et à discerner ceux qui s'en écartent.

DES PLAISIRS.

Il y a deux manières de s'abandonner aux plaisirs, f'une brutale, l'autre philosophique; l'une toute sensuelle, l'autre raisonnable, quoique corrompuc et déréglée.

La recherche des plaisirs qui ne vient que des sens emporte la raison, mais elle ne l'étouffe pas : elle est quelquefois assez éclairée pour voir la bassessc de ces plaisirs en même temps qu'elle s'y laisse emporter

Cette passion brutale a plusieurs remèdes dans la nature même la satiété, qui accompagne la jouissance, produit souvent le dégoût; la vanité humaine nous en détache par le mépris qui est joint à cette sorte de vie; enfin l'intérêt, l'ambition, la philosophie, sont quelquefois capables de nous en détourne:.

DES ROMANS.

Si l'on considère presque toutes les comédies et les romans, on n'y trouvera guère autre chose que des passions vicieuses, embellies et colorées d'un certain fard qui les rend agréables aux yeux du monde.

Que s'il n'est pas permis d'aimer les vices, peut-on prendre plaisir à ce qui a pour but de les rendre aimables?

DES VISITES.

La plupart des visites ne sont autre chose que des inventions de se décharger sur autrui du poids de soi-même, qu'on ne saurait supporter.

Je ne sais d'où vient que les prédicateurs se corrigent si peu de la longueur de leurs sermons, et les causeurs de la longueur de leurs visites. N'est-ce point la vanité qui les trompe?

DE L'IMAGINATION.

Les personnes qui ont l'imagination vive grossissent les objets elles prennent les saillies de leur imagination, ou les sentiments qu'elles ont de leurs dispositions, pour le fond de leur cœur. Ainsi, quelque sincères qu'elles soient, elles se trompent souvent elles-mèmes : il n'y a que la connaissance du détail de leurs actions qui puisse donner une véritable idée de leur caractère.

DE L'ENTREtien.

L'entretien est utile pour se soulager et pour s'instruire les pensées purement intérieures ne sont pas assez sensibles. Ceux dont les pensées sont vives n'ont besoin de s'entretenir que pour se délasser.

Quoique l'on se parle à soi-même, on parle mieux néanmoins en parlant à d'autres : l'obligation de se faire entendre fait faire un effort à l'esprit; la présence d'un auditeur l'excite; il agit plus vivement et plus agréablement. La présence d'un autre fournit des pensées; elle les soutient. L'esprit se forme plus par l'entretien que par toute autre chose on oublie ce qu'on lit; on ne le sait que quand on l'a dit.

DE L'AMOUR DE SOI-MÊME.

Il n'y a rien de si naturel à l'homme que le désir d'è tre aimé des autres, parce qu'il n'y a rien de si naturel que de s'aimer soi-même. Or, on désire toujours que ce qu'on aime soit aimé des autres : la charité, qui aime Dieu, désire que Dieu soit aimé de toutes les créatures; et la cupidité, qui s'aime soi-même, désirerait que nous fussions l'objet de l'amour de tous les hommes.

Nous désirons d'être aimés, pour nous aimer encore davantage. L'amour des autres envers nous fait que nous nous jugeons plus dignes d'amour, et que notre idée se présente à nous d'une manière plus aimable : nous sommes bien aises qu'ils jugent de nous comme nous en jugeons nous-mêmes, parce que notre jugement, qui est toujours faible et timide quand il est tout seul, se rassure quand il se voit appuyé de celui d'autrui; et ainsi il s'attache à soi-même avec d'autant plus de plaisir qu'il est moins troublé par la crainte de se tromper.

« PredošláPokračovať »