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Il y a des gens qui sont douloureux partout.

des différentes sortes d'esprit.

Il y a des esprits qui n'ont que de la surface sans fond; il y en a qui ont du fond sans surface; il y en a enfin chez lesquels ces deux avantages se trouvent réunis.

Les premiers trompent le monde, et se trompent euxmêmes.

Le monde se trompe dans les seconds, en ne les prenant pas pour ce qu'ils sont; mais ils ne se trompent pas euxmêmes il n'y a que les derniers qui ne trompent ni les autres ni eux-mêmes.

DES DIFFÉRENTS CARACTÈRES DE L'esprit.

Il y a des gens propres à trouver des vérités; d'autres qui sont propres à trouver des images aux vérités, comme des comparaisons; d'autres qui sont propres à trouver des vérités aux images: ce sont trois caractères différents d'esprit.

Le premier vient de la lumière et de la subtilité de l'esprit ;

Le second vient d'un feu d'esprit qui, concevant les choses vivement, trouve par cette vivacité même des comparaisons pour l'exprimer. « A qui, dit Jérémie, vous « comparerai-je, ô filles de Jérusalem? à qui dirai-je que vous ressemblez? le débordement de vos maux est semblable à la mer. »

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Le troisième ne vient ni de feu ni de subtilité d'esprit, mais d'une certaine agilité qui applique la même image à diverses idées de vérité qui sont dans l'esprit, et qui trouve ainsi facilement celle à qui elle convient.

des défauts de l'esprit.

C'est un assez grand mal que de connaître les défauts de son esprit, de les sentir, et de ne pouvoir les corriger.

Il y en a qui sont sots si doucement qu'ils ne s'en aperçoivent pas du tout leurs paroles et leur jugement sont toujours d'accord, et ils ne sentent jamais aucun reproche intérieur qui les avertisse de leurs défauts.

Les véritables gens d'esprit sont ceux qui n'en ont qu'un ; mais qui est juste, qui conçoit facilement et assez promptement les choses pour les exprimer sur-le-champ d'une manière agréable.

DE LA PHILOSOPHIE.

La plus solide philosophie n'est que la science de l'ignorance des hommes : elle est bien plus propre à détromper ceux qui se flattent de leur science qu'à instruire ceux qui désirent d'apprendre quelque chose de certain.

De quelque éloge qu'on relève celle de Descartes, il faut néanmoins reconnaître que ce qu'elle a de plus réel est qu'elle fait fort bien connaître que tous les gens qui ont passé leur vie à philosopher sur la nature n'avaient entretenu le monde et ne s'étaient entretenus eux-mêmes que de songes et de chimères; mais, quand elle vient aux détails des corps et à l'explication de la machine, tout ce qu'elle nous propose se réduit à quelques suppositions probables, et qui n'ont absolument rien de certain.

Aussi il y a des gens qui appellent cette philosophie le roman de la nature, parce que c'est un amas et un enchaînement de causes et d'effets probables, qui est comme l'histoire d'un monde imaginaire qui ne peut jamais

exister.

DES PHILOSOPHES.

Les vérités deviennent des faussetés dans la bouche des philosophes, parce qu'ils les gâtent et les corrompent par la fausseté de la fin à laquelle ils rapportent toute leur vie. Il est juste de se défaire des embarras du monde et de penser à soi, pourvu que cela produise quelque bien solide, et c'est pourquoi les chrétiens ont raison de le quitter; mais, pour n'être pas mieux tout seul qu'avec le monde, il vaut autant être avec le monde que tout seul.

de l'éloquence.

Il y a deux sortes de beautés dans l'éloquence; l'une consiste dans les pensées belles et solides, mais extraordinaires et surprenantes: Lucain, Sénèque, et Tacite, sont remplis de ces sortes de beautés.

L'autre, au contraire, ne consiste nullement dans les pensées rares, mais dans un certain air naturel, dans une simplicité facile, élégante et délicate, qui ne bande point l'esprit, qui ne lui présente que des images communes, mais vives et agréables, et qui sait si bien le suivre dans ses mouvements, qu'elle ne manque jamais de lui proposer sur chaque sujet les parties dont il peut être touché, et d'exprimer toutes les passions et les mouvements que les choses qu'elle représente y doivent produire : cette beauté est celle de Térence et de Virgile, et l'on voit par là qu'elle est encore plus difficile que l'autre, puisqu'il n'y a point d'auteurs dont on ait moins approché que de ces deux-là.

SUR LES PENSÉES DE M. PASCAL.

Il vient de paraitre un livre qui est peut-être un des plus utiles que l'on puisse mettre entre les mains des princes; c'est le recueil des pensées de M. Pascal. Outre l'a

vantage qu'on en peut tirer pour les affermir dans la véritable religion, il y a de plus un air si grand, si élevé, et en même temps si simple, si éloigné d'affectation, dans tout ce qu'il écrit, que rien n'est plus capable de leur donner le goût et l'idée d'une manière noble et naturelle d'écrire et de parler.

Je ne dirai pas que tout soit également bon. Qu'on me permette donc d'exprimer ma pensée. J'y trouve un grand nombre de pierres assez bien taillées et capables d'orner un grand bâtiment; mais le reste ne m'a paru que des matériaux confus, sans que je visse l'usage que M. Pascal en voulait faire.

Il y a même quelques sentiments qui ne me paraissent point tout à fait exacts, et qui ressemblent à des pensées hasardées, que l'on écrit seulement pour les examiner avec plus de soin.

Ses réflexions sur LES PRINCIPES NATURELS me paraissent trop générales. Nous nous aimons naturellement, c'està-dire notre corps, notre âme, notre être; nous aimons tout ce qui est naturellement joint à ces premiers objets de notre amour, comme le plaisir, la vie, l'estime, la grandeur; nous haïssons tout ce qui y est contraire, comme la douleur, la mort, l'infamie: la bizarrerie des coutumes n'a lieu que dans les choses qui ne sont pas naturellement liées avec ces premiers objets de nos affections.

M. Pascal suppose que l'ennui vient de ce que l'on se voit, de ce que l'on pense à soi; et que le divertissement. consiste en ce qui nous ôte cette pensée : cela est peut-être plus subtil que solide.

Mille personnes s'ennuient sans penser à eux; ils s'ennuient non de ce qu'ils pensent, mais de ce qu'ils ne pen sent pas assez.

Le plaisir de l'âme consiste à penser, et à penser vivement et agréablement; elle s'ennuie sitôt qu'elle n'a plus que des pensées languissantes, ce qui lui arrive dans la solitude, parce qu'elle n'y est pas si fortement remuée : c'est pourquoi ceux qui sont bien occupés d'eux-mêmes peuvent s'attrister, mais ne s'ennuient pas.

La tristesse et l'ennui sont des mouvements différents : l'ennui cherche le divertissement, la tristesse le fuit: l'ennui vient de la privation du plaisir et de la langueur de l'âme qui ne pense pas assez; la tristesse vient, des pensées vives, mais affligeantes. M. Pascal confond tout cela.

Je pourrais faire encore plusieurs objections sur ces pensées, qui me semblent quelquefois un peu trop dogmatlques, et qui incommodent ainsi mon amour-propre, qui n'aime pas à ètre régenté si fièrement.

SUR L'HISTOIRE UNIVERSELLE DE BOSSUET.

Il y a dans ce livre tant d'esprit, de solidité, d'élévation, de grandeur, de génie, de lumières sur le fond de la religion, qu'on doit avoir honte de ne l'avoir pas lu et relu plusieurs fois.

Quel ouvrage peut nous donner une idée plus haute de la Divinité que celui qui fait voir d'une manière si noble et si profonde que depuis la chute de l'homme tout ne subsiste que pour Jésus-Christ et par Jésus-Christ; que tout sert à relever sa gloire et sa grandeur; que tous les siecles qui l'ont précédé n'ont servi qu'à préparer sa venue, à marquer le besoin que les hommes ont de lui, à prouver la religion qu'il devait établir; que tous ceux qui l'ont suivi ne servent qu'à relever sa miséricorde et sa puissance; qu'il n'y aura que la seule grandeur de Jésus

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