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fleuve rapide et impétueux, entraîne et renverse tout ce qui lui résiste.

Ι

Enfin il y a un troisième genre, qui tient comme le milieu entre les deux autres; qui n'a ni la simplicité du premier, ni la force du second; qui en approche, mais sans leur ressembler; qui participe de l'un et de l'autre, ou, pour parler plus juste, qui s'en éloigne également. Il a plus de force et d'abondance que le premier, mais moins d'élévation que le second. Il admet tous les ornements de l'art, la beauté des figures, l'éclat des métaphores, le brillant des pensées, l'agrément des digressions, l'harmonie du nombre et de la cadence. Il coule doucement néanmoins, semblable à une belle rivière dont l'eau est claire et pure, et que de vertes forêts ombragent des deux côtés.

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§ I. Du genre simple.

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I. De ces trois genres d'écrire, le premier 2, qui est le

«< Est quidam interjectus intermedius, et quasi temperatus, nec acumine posteriorum, nec fulmine utens superiorum; vicinus amborum, in neutro excellens ; utriusque particeps, vel utriusque, si verum quærimus, potiùs expers. Isque uno tenore, ut aiunt, in dicendo fluit, nihil afferens præter facilitatem et æqualitatem. » (Cic. Orat. n. 20.)

<«< Uberius est aliquantòque robustius quàm hoc humile, summissius autem quàm illud amplissimum.... Huic omnia dicendi ornamenta conveniunt, plurimùmque est in hac orationis forma suavitatis.» (Ibid. n. 91, 92.)

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nibus crebrior, et figuris erit jucundior; egressionibus amœnus, compositione aptus, sententiis dulcis: lenior tamen, ut amnis lucidus quidam, et virentibus utrinque sylvis inumbratus. » (QUINTIL. lib. 12, cap. 10.)

2 « Summissus est et humilis, consuetudinem imitans, ab indisertis re plus quàm opinione differens. Itaque eum qui audiunt, quamvis ipsi infantes sint, tamen illo modo confidunt se posse dicere: nam orationis subtilitas, imitabilis quidem illa videtur esse existimanti, sed nihil est experienti minùs. い (Cic. Orat. n. 76.)

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simple, n'est pas le plus facile, quoiqu'il le paraisse. Comme le style qu'on y emploie est fort naturel, et qu'il s'écarte peu de la manière commune de parler, on s'imagine qu'il ne faut pas beaucoup d'habileté ni de génie pour y réussir; et quand on lit ou qu'on entend un discours de ce genre, les moins éloquents se croient capables de l'imiter. On le croit, mais on se trompe; et pour s'en convaincre, il ne faut qu'en faire l'essai : car, après bien des efforts, on sera contraint souvent d'avouer qu'on n'a pas pu y parvenir. Ceux qui ont quelque goût de la vraie éloquence 2, et qui y sont le plus versés, reconnaissent qu'il n'y a rien de si difficile que de parler avec justesse et solidité, et cependant d'une manière si simple et si naturelle que chacun se flatte d'en pouvoir faire autant.

II. Cicéron, dans son premier livre de l'Orateur, fait remarquer 3 que dans les autres arts ce qui est le plus excellent est le plus éloigné de l'intelligence et de la portée du vulgaire; au lieu qu'en matière d'éloquence c'est un défaut essentiel de s'écarter de la manière ordinaire de parler. Il ne prétend pas par là que le style de l'orateur doive être semblable à celui du peuple, ou à celui qui règne dans les conversations; mais il veut

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que

l'orateur évite avec soin les expressions, les tours, les pensées qui, par trop de raffinement ou par trop d'élévation, rendraient le discours obscur et inintelligible. Comme il ne parle que pour se faire entendre, il est certain que le plus grand de tous les défauts où il puisse tomber est de parler de telle sorte qu'on ne l'entende point. Ce qui distingue donc son style de celui de la conversation n'est point, à proprement parler, la différence des termes I : car ils sont, à peu de chose près, les mêmes de part et d'autre, et soit pour le langage ordinaire, soit soit pour le discours le plus pompeux, ils sont puisés dans la même source; mais l'orateur sait, par l'usage qu'il en fait et par l'arrangement qu'il leur donne, les tirer, pour ainsi dire, du commun, et leur prêter une grace et une élégance toute particulière, qui cependant est si naturelle, que chacun croirait pouvoir facilement parler de la même sorte.

III. Quintilien, en expliquant une contradiction apparente qui se trouve entre deux passages de Cicéron sur la matière que nous traitons ici, fait une réflexion très – judicieuse. « Cicéron 2 (dit-il) a écrit quelque part que la perfection consiste à dire des choses qu'il·

I «Non sunt alia sermonis, alia contentionis verba; neque ex alio genere ad usum quotidianum, alio ad scenam pompamque sumuntur: sed ea nos, quum jacentia sustulimus e medio, sicut mollissimam ceram ad nostrum arbitrium formamus et fingimus. » (Ibid. lib. 3, n. 177.)

2 « Cicero quodam loco scribit id esse optimum, quod, quum te facilè credideris consequi imitatione, non possis. Alio verò, non se id egisse, ut ita diceret quomodò se quilibet

posse confideret, sed quomodò nemo. Quod potest pugnare inter se videri. Verùm utrumque, ac meritò, laudatur. Causâ enim modoque distat: quia simplicitas illa, et velut securitas inaffectatæ orationis mirè tenues causas decet ; majoribus illud admirabile dicendi genus magis convenit. In utroque eminet Cicero : ex quibus alterum imperiti se posse consequi credent, neutrum qui intelligunt.» (QUINTIL. lib. 11, c. I.)

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« semble que tout le monde pourrait aisément dire de « même, à quoi néanmoins on trouve plus de diffi<«< culté qu'on ne pensait quand on vient à le tenter. « Et dans un autre endroit il dit qu'il ne s'est point « étudié à parler comme chacun s'imaginerait pouvoir « le faire, mais comme personne n'oserait l'espérer : << en quoi il semble se contredire. Cependant l'un et <«< l'autre est fort juste : car de l'un à l'autre il n'y a de << distance que le sujet que l'on traite. En effet, cette simplicité et cet air négligé d'un style naturel où il n'y a rien d'affecté sied admirablement bien aux pe<< tites causes; et le grand, le merveilleux convient fort « aux grandes. Cicéron excelle en ces deux qualités, << dont l'une, à ce qu'il semble aux ignorants, est fort «< aisée à attraper; mais au jugement des connaisseurs, << ni l'une ni l'autre ne l'est. » On voit par là que le style simple doit être employé quand on parle de choses simples et communes, et qu'il convient sur-tout aux récits et aux parties du discours où l'orateur ne songe qu'à instruire ses auditeurs, ou à s'insinuer doucement dans leurs esprits.

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IV. De là venait cette attention des Anciens à cacher l'art, qui cesse en effet de l'être s'il est visible, bien différente de l'ostentation et du faste de ces écrivains qui ne cherchent qu'à faire montre de leur esprit. De là certaines négligences qui ne choquent point et ne déplaisent point 2, parce qu'elles marquent un orateur plus occupé des choses que des mots. De là

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enfin cet air de modestie et de retenue que les Anciens avaient soin ordinairement de faire paraître dans l'exorde et dans la narration, pour le style, pour l'expression, pour les pensées, pour le ton même et le geste. L'orateur n'est pas encore admis dans les esprits. On l'observe avec attention. Alors tout ce qui sent l'art est suspect à l'auditeur, et le met en défiance, en lui faisant craindre qu'on ne veuille lui dresser des embûches. Dans la suite il est moins sur . ses gardes, et laisse plus de liberté.

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Cicéron remarque que Démosthène a suivi cette règle dans son beau plaidoyer pour Ctésiphon, où il parle d'abord d'un ton doux et modeste, et ne passe à ce style vif et véhément qui règne dans la suite qu'après s'être insinué peu-à-peu et comme par degrés dans les esprits, et s'en être rendu le maître. Il veut

par la même raison que l'on marque quelque timidité

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en commençant, et il relève dans Crassus ce caractère de modestie et de retenue qui, bien loin de nuire à son discours, rendait l'orateur même plus aimable et plus estimable, par l'idée avantageuse qu'il donnait de sa personne.

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