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rappelle à la contemplation exclusive de
l'éternité.

Sans doute vous n'accusez pas d'ambition
et d'avarice ceux qui, ayant fait le triple
vœu de pauvreté, de chasteté, d'obéissance,
s'engagent solennellement à n'accepter ja-
mais aucune dignité, même ecclésiastique;
ceux qui courent au martyre avec la même
ardeur avec laquelle d'autres poursuivent
les honneurs et les plaisirs.

Sans doute vous n'attribuez pas aux Jésui-
tes une doctrine qui, dans le moyen âge,
avait occupé les esprits les plus graves. Vous
ne trouvez pas extraordinaire qu'au moment
où la légitimité du tyrannicide en certaines
circonstances était publiquement enseignée
par la Sorbonne et les Universités, publique-
ment admise par des membres du parlement,
quelques Jésuites aient cru pouvoir adopter
à cet égard, non pas l'opinion fougueuse de
certains auteurs étrangers à leur Compagnie,
mais l'opinion de saint Thomas. Surtout
vous n'accusez pas d'être favorables à la
doctrine du régicide, ces Jésuites dont le
général, dès l'année 1614, défendit, sous
peine d'excommunication et en vertu de la
sainte obéissance, à tout membre de la Com-
pagnie d'affirmer ou d'énoncer en aucune
manière, même la doctrine du tyrannicide
en certaines circonstances, telle que saint
Thomas l'avait admise.

Sans doute vous avez été saisi d'une pro-
fonde indignation en lisant l'histoire du Père
Guignard, soumis plusieurs fois à de cruelles
tortures qui n'ont constaté que son innocen-
ce; du Père Guignard, condamné à la mort
et conduit à l'échafaud, comme complice d'un
crime commis par un homme qu'il ne con-
naissait pas.

Sans doute vous n'accusez pas les Jésuites
d'avoir été les ennemis de Henri IV, lorsque
Henri IV lui-même a déclaré devant le par-
lement qu'il avait toujours trouvé en eux ses
sujets les plus dévoués et ses amis les plus
fidèles.

Sans doute vous ne considérez pas comme
ennemie de la raison et de la liberté naturelle
de l'homme, une Compagnie qui a constam-
ment défendu leurs droits, qui n'est devenue
la victime de tant de persécutions que pour
avoir sans cesse repoussé de l'enseignement
catholique les doctrines désolantes de Luther,
de Calvin et de leurs successeurs; que pour
avoir osé lutter en faveur de la liberté natu-
relle de l'homme au moment même où les
attaques dirigées contre cette liberté par des
écrivains célèbres se fortifiaient de tout le
prestige attaché au nom de Pascal.

Mais d'un autre côté, vous ne considérez
pas non plus comme propre à ébranler la foi
chrétienne, comme propre à renverser l'au-
torité de l'Eglise et du siége apostolique, une
Société qui n'a d'autre règle de foi que la
doctrine même de l'Eglise; une Société qui
Be fait gloire de suivre partout et toujours
celle belle maxime de saint Augustin: In
necessariis unitas ; in dubiis libertas, in om-
nibus charitas; une Société dont l'Eglise uni-

verselle, rassemblée au concile de Trente, a
proclamé l'excellence (pium institutum); une
Société que Benoit XIV, Fénelon et Bossuet
ont exaltée comme appelée par la divine
Providence à porter en tous lieux les lumiè
res de l'Evangile, comme suscitéc de Dieu,
dans les temps difficiles, pour la consolation
de l'Eglise catholique et pour le triomphe de
la vérité; une Société que le corps des évê-
ques a constamment défendue quand on a
voulu la proscrire; une Société que vingt
papes ont approuvée, louée, confirmée, que
n'a jamais voulu condamner celui-là mêine
auquel un siècle impie avait arraché l'acte
qui la supprimait; une Société rétablie par
le saint pontife qui deux fois bénit le sol
français, qui, au milieu des douleurs de son
long exil, se reposa dans la pensée de rendre
gloire à Dieu par une réparation éclatante,
et crut ne pouvoir laisser à l'Eglise un mo-
nument plus authentique de sa vive sollici-
tude, ni aux siècles à venir un gage plus
assuré de salut et d'espérance.

Sans doute, convaincu par des témoignages
si imposants de la piété, de la sainteté des
bons Pères, vous regrettez que l'immortel
auteur des Pensées sur la religion ait ac-
cueilli trop légèrement les préventions de
ses amis. Sans doute, en admirant son rare
talent, vous regrettez qu'il ait avancé des
faits qui ne soutiennent pas l'examen; altri-
bué à la Compagnie de Jésus des propositions
qui n'ont pas des Jésuites pour auteurs, et
Vous êtes bien éloigné de vouloir considérer
comme une histoire sérieuse le roman des
Provinciales.

Mais ce qui vous parait surtout incompré
hensible, c'est qu'en présence des déclara-
tions solennelles des évêques, des papes et
des conciles, certains membres du parlement
aient osé condamner les Jésuites sans les
entendre, les condamner même comme no-
toirement coupables d'avoir enseigné en tout
temps et persévéramment, avec l'approbation
de leurs supérieurs et généraux, « la simonie,
le blasphème, le sacrilége, le maléfice, l'as-
trologie, l'irréligion, l'idolâtrie, la supersti-
tion, l'impudicité, le parjure, le faux témoi-
gnage, les prévarications des juges, le vol,
le parricide, l'homicide, le suicide, le régi-
cide;... comme favorisant l'arianisme, le
socinianisme, le sabellianisme, le nestoria-
nisme;... comme favorisant les luthériens,
les calvinistes et autres novateurs du xvI
siècle... comme reproduisant l'hérésie de
Wicleff; comme renouvelant les erreurs de
Tichonius, de Pèlage, des semi-pélagiens, de
Cassien, de Fauste, des Marseillais;... comme
favorisant l'impiété des déistes ;... enfiu,
comme enseignant une doctrine injuricuse
aux saints Pères, aux apôtres, à Abra-
ham. »

Sans doute vous ne sauriez considérer
comme ennemi de la saine morale un insti-
tut qui fut si cher à François de Sales et à
Vincent de Paul; un institut qui a produit
des docteurs, des prédicateurs aussi éminents
par leur vertu, leur science el leur sainteté

que les Lainez, les Suarez, les Griffet et les Bourdaloue. Sans doute vous n'épousez pas les fureurs d'une Pompadour, de celle nouvelle Hérodiade, qui réclamait avec instance la condamnation du juste, parce qu'un autre Jean-Baptiste avait osé dire Non licet; de celle femme qui, sur la foi de Pascal, avait cru pouvoir trouver, dans la célèbre Compagnie,des casuistes accommodants, et qui s'étonnait qu'un Jésuite eût l'insolence de ne pas sanctionner, comme parfaitement conforine à la plus pure morale de l'Evangile, ce que les grands philosophes de l'époque se gardaient bien de censurer.

Sans doute, la condamnation en masse des Jésuites, prononcée en 1762 par le parle ment de Paris, est par vous attribuée aux causes si peu honorables que Voltaire et Dalembert ont indiquées. Sans doute l'arrêt de ce parlement vous paraît mériter la flétrissure que lui imprimait Lally-Tollendal, quand il l'appelait (1) « une affaire de parii et non de justice; un triomphe orgueilleux et vindicatif de l'autorité judiciaire sur « l'autorité ecclésiastique, même sur l'autorité royale; une persécution barbare; l'acte le plus tyrannique et le plus arbi<< traire qu'on pût exercer; un acte duguel « était résulté généralement le désordre qu'entraîne une grande iniquité. »

Sans doute vous plaignez ces ministres et ces magistrals qui avaient poussé l'esprit de parti jusqu'à ambitionner le triste honneur de devenir les complices d'une favorite.

Sans doute vous félicitez ces membres du parlement d'Aix, qui eurent le courage de déclarer qu'ils ne condamneraient pas l'innocence; vous félicitez ce président d'Eguilles, qui eut la gloire d'être lui-même victime de la persécution; qui, pour échapper à la mort, fut contraint de s'exiler de sa patrie, parce qu'il avait donné l'exemple d'une fermelé courageuse, parce qu'il n'avait pas voulu se ranger au nombre des prévarica

teurs.

Sans doute vous n'accusez pas d'imposture le fondateur des prix de vertu; et M. de Monthyon ne vous parait pas avoir perdu tout droit à sa renommée, parce qu'après s'être renfermé, pendant un hiver, dans la tour du palais, pour y étudier avec soin les pièces du procès de 1762, il a déclaré y avoir irouvé beaucoup d'actes de passion et pas un seul acte d'instruction.

Mais, si l'arrêt de 1762 est un arrêt injuste; si les Jésuites n'enseignent ni le parricide, ni l'homicide, ni le suicide, ni le régicide; s'ils ne sont ni ariens, ni sociniens, ni sabelliens, ni nestoriens, ni pélagiens, ni sémiPélagiens, ni luthériens, ni calvinistes; s'ils

(1) M. de Lally-Tollendal a écrit dans le Mercure du 25 janvier 1806: Nous croyons pouvoir avouer dès ce moment que, dans notre opinion, la destruction des Jésuites fut une affaire de parti et non de justice, que ce fut un triomphe orgueilleux et vindi. catif de l'autorité judiciaire sur l'autorité ecclésiastique; nous dirions même sur l'autorité royale, si nous avions le temps de nous expliquer; que les motifs étaient futiles, que la persécution deviul bar

ne sont point coupables d'irrévérence envers les saints Pères, ni envers les apôtres, ni même envers Abraham; s'ils ne sont alteints et convaincus que d'avoir travaillé pour la plus grande gloire de Dieu; d'avoir aimé les hommes dans la vue de plaire à Dieu, et de s'être sacrifiés pour eux avec joie; d'avoir ambitionné les palmes du martyre, d'avoir porté les lumières de l'Evangile et le flambeau de la civilisation chez les puples les plus sauvages; d'avoir rendu par leurs travaux d'éminents services à la religion, à la philosophie, à la littérature, aux sciences et aux arts; enfin d'avoir toujours été considérés comme les maîtres les plus propres à former tout à la fois l'esprit et le cœur des élèves qui leur étaient confiés ; dites-moi donc, je vous prie, quelles préventions hostiles et incompréhensibles pourraient s'élever encore contre la Compagnie de Jésus? Pourquoi ne pas rendre justice aux Jésuites comme à d'autres ? pourquoi seraient-ils moins estimés de nous que de nos voisins, plus maltraités par une nation polie que par les sauvages du Paraguay ?

CHAPITRE X. Conclusion.

Vous désirez, vous appelez de tous vos vœux le progrès des lumières. Je le désire comme vous, et c'est pour contribuer à ce progrès que j'ai composé cet ouvrage.

Il m'a paru nécessaire d'éclaircir uno question que les passions et les préjugés avaient couverte d'un voile épais; il m'a paru nécessaire de l'éclaircir dans l'intérêt des pères de famille et de la société tout entière, dans l'intérêt des sciences et de la civilisation.

Pour y parvenir, il m'a suffi d'exposer purement et simplement la vérité.

Nous avons recherché quel était le premier besoin de notre siècle; nous avons recherché ce qu'exigeaient impérieusement l'intérêt de la civilisation et le progrès des véritables lumières.

Nous avons reconnu que l'esprit de dévouement, d'amour et de sacrifice, peut seul sauver la société, sapée jusque dans ses fondements par l'esprit d'égoïsme et d'ambition, par l'esprit de haine et de révolte. Nous avons vu que l'esprit de sacrifice, apporté sur la terre par le Sauveur du monde, est le caractère propre et spécial des ordres religieux. Nous avons vu que l'Eglise catholique a établi ces ordres précisément afin de maintenir et de perpétuer parmi les hommes cet esprit de sacrifice, dont la plénitude est la perfection évangélique; afin de le propager par bare; que l'expulsion de plusieurs milliers de sujets hors de leurs maisons et de leur patrie pour des métaphores communes à tous les ordres religieux,.. était l'acte le plus tyrannique et le plus arbitraire qu'on pût exercer; qu'il en résulta généralement le désordre qu'entraîne une grande iniquité, et qu'en particulier une plaie jusqu'ici incurable fut faite à l'éducation publique.

l'exemple du désintéressement le plus complet et de la plus ardente charité. Ayant ainsi reconnu que les ordres religieux répondent au besoin le plus impérieux de notre siècle, nous avons déduit de l'expérience une nouvelle preuve de cette assertion, à laquelle le raisonnement nous avait condui's; et nous avous constaté la grandeur, l'opportunité des services que les ordres religieux ont rendus ou peuvent rendre encore à la société.

Cette conclusion est d'autant plus incontestable, qu'elle ressort de tous les faits. Ici, la véracité est facile à saisir; il suffit qu'on veuille prendre la peine de la chercher de bonne foi.

Il y a plus; la vérité que je viens d'énoncer est en quelque sorte populaire. Son évidence produit une conviction qui, jusqu'à un certain degré, se trouve au fond de toutes les âmes.

Tout le monde admire les soins que la Srur de Charité prodigue aux malades; tout le monde est d'accord sur l'excellence de l'éducation que donne à l'enfant du pauvre le Frère des Ecoles chrétiennes. On est heureux de voir ces bons Frères inspirer en même temps à leurs élèves l'amour du travail et l'amour de la vertu. Partout le pauvre artisan sollicite pour son fils une petite place dans l'Ecole des Frères. Partout aussi les villes appellent à grands cris ces modestes instituteurs. Pouvait-il en être autrement? Personne n'a intérêt à être volé, à être assassiné; et l'on sait bien que la classe pauvre, quand elle n'est plus dirigée par les préceptes de la religion, fournit en grand nombre des voleurs et des assassins.

Toutefois, l'artisan et le laboureur ne sont pas les seuls qui désirent assurer à leurs fils une bonne éducation. Pourquoi serait-il défendu au riche de concevoir ou d'exprimer un semblable désir? Une bonne éducation donnée à l'enfant du riche n'est-elle pas un besoin pressant de la famille, de la société elle-même? Laissez donc les familles libres de choisir, pour l'éducation de la jeunesse, les instituteurs qui leur paraitront les plus dignes de confiance. Si elles sont convaincues que la meilleure éducation celle qui inspire le mieux aux élèves l'amour et le respect des parents, celle qui développe le mieux la science dans les esprits, la vertu dans les cœurs, est l'éducation donnée par d'humbles religieux; u'allez pas faire violence à des convictions que justifient à la fois le raisonnement et l'expérience de tous les peuples. Si des pères et mères se regardent comme chargés par Dieu lui-même de veiller aux intérêts éternels de leurs enfants; si, préoccupés de cette pensée, ils attachent un prix immense à ce que ces enfants reçoivent une éducation chrétienne; de quel droit vous opposeriez-vous à l'accomplissement d'un devoir sacré pour eux ? de quel droit oseriez-vous les violenter dans le choix d'un instituteur? de quel droit oseriez-vous proscrire, comme n'offrant pas Je garantics suffisantes, comme incapables,

comme inhabiles à l'éducation de la jeunesse, les maîtres le plus profondément pénétrés de cet esprit de sacrifice qui, aux yeux d'un grand nombre de parents, est la première de toutes les garanties, la première de toutes les capacités ?

Mais, dira-t-on, si les familles restent libres dans leur choix, beaucoup de pères et de mères confieront l'éducation de leurs enfants à des prêtres, à des religieux, uu même à des Jésuites.

Eh! qu'importe? si d'ailleurs ces enfants sont bien élevés, s'ils deviennent des magis. trats intègres et vertueux, des savants distingués, de bons citoyens, de grands capitaines. Serait-ce donc un si grand malheur de voir s'ouvrir dans notre France, comme en Belgique, comme en Angleterre, comme en Amérique, quelques colléges dirigés par les Pères de la Compagnie de Jésus? Devrions-nous être inconsolables, si les heures de leçons de quelque nouveau Porée étaient encore, suivant l'expression de Voltaire, des heures délicieuses, des heures où l'on apprit à connaître tous les charmes de l'étude et de la vertu? Devrions-nous être inconsolables, si, aujourd'hui comme autrefois, des Jésuiles parvenaient encore à former, pour la gloire et pour la patrie, un Condé va un Corneille, un Molé ou un Cassini, quelque nouveau Descartes ou quelque nouveau Bossuet?

Mais, dira-l-on encore, on laisserait donc sans exécution l'arrêt de 1762 et les lois de 1793?

Eh! qu'importe? La France n'a aucune prédilection pour les décrets qui ont préludé aux actes du Comité de salut public. Elle ne veut pas se constituer l'exécutrice festamentaire des arrêts prononcés par les adorateurs ou les complices de Jeanne de Pompadour.

Mais, de nos jours encore, quelques personnes pensent, écrivent même, que l'esprit des ordres religieux ne saurait s'accorder avec l'esprit du siècle.

J'aime à croire que vous n'étiez pas de ces personnes; ou que, si vous en étiez, vous rendez maintenaut justice à la cause que je défends. Si, pourtant, après les détails dans lesquels je suis entré, il restait dans votre esprit quelques doutes à éclaircir, quelques préventions à dissiper, deux moyens se présenteraient de les faire entièrement disparaître, de les extirper jusqu'à la racine.

Voyez-vous cette immense basilique, trop étroite encore pour contenir cette multitude innombrable d'hommes distingués par le rang ou le savoir, cette jeunesse active et studieuse, qui s'y précipite, à flots pressés, à deux époques différentes de l'année ? Voyez quel religieux silence, quelle attention, quels témoignages de respect, quels élans de reconnaissance et d'amour accueillent ici la parole de vérité, qui, comme une céleste rosée, descend du haut de la chaire chrétienne, pour rafraîchir les âmes, pour feconder les intelligences, pour vivifier les cœurs.

Venez, joignez-vous à l'élite de la société ;
suivez les conférences de Notre-Dame; et
vous reconnaîtrez que, pour dissiper toutes
vos préventions, il vous aura suffi d'enten-
dre, pendant une heure chaque semaine, la
Voix douce et persuasive d'un disciple de
saint Dominique ou d'un Père de la compa-
gnie de Jésus. Oui, quand vous aurez suivi
ces conférences, toutes vos difficultés seront
resolues. Vous saurez alors si le siècle ac-
cueille ou repousse les Dominicains et les
Jésuites; si les religieux, fidèles à leur sainte
vocation, sont ou ne sont pas les hommes du
siècle; s'ils favorisent ou s'ils contrarient le
progrès des lumières et de la civilisation.

Voulez-vous faire mieux encore? Vous
êtes Français; vous êtes donc homme d'hon-
neur. Vous deviendriez un lâche à vos pro-
pres yeux, si vous aviez le malheur de
calomnier ceux qui ne peuvent opposer à la
calomnie d'autres armes que la douceur et
la patience; si vous aviez le malheur d'in-
sulter une femme, un religieux ou un prêtre.
Surtout, vous êtes brave, et vous auriez
honte de céder aux inspirations d'une crainte
puérile, à une frayeur pusillanime. Eh bien !
voici le moment de mettre à l'épreuve cette
bravoure dont vous aimez à vous faire gloi-
re. Celui qui ne reculerait pas, si le devoir
l'exigeait, devant des soldats ennemis, de-
vant une armée rangée en bataille, ne sau-
rait avoir peur d'un humble religieux.
Entrez donc avec moi dans cette modeste
cellule, ou allons assister ensemble à la
récréation des bons Pères. Vous serez tout
étonné de la franche cordialité, de la joie
vive el pure avec laquelle ils vous accueille-
ront, fussiez-vous leur plus grand ennemi;
et bientôt vous m'adresserez mille remercie-
ments pour vous avoir fait connaître le
dominicain Lacordaire ou le jésuite Ravi-
gnan.

Seriez-vous, par malheur, du nombre de
ces hommes passionnés sur lesquels certains
mots exercent un pouvoir magique ? Le seul
nom de Jésuite suffirait-il pour soulever des
tempêtes dans votre âme? Ne désespérez pas
encore de vous-même. Commencez par vous
dire qu'il n'est pas raisonnable de condam-

·

ner des concitoyens sans les entendre, de les
insulter sans les connaître; puis, quand
votre irritation sera calmée, quand votre
raison aura repris assez d'empire sur votre
cœur, pour que vous puissiez voir ou écou-
ter un religieux sans frémir, suivez le con-
seil que je vous ai douné. Allez assister aux
conférences de Notre-Dame, ou visiter la
cellule d'un bon Père. Bientôt toutes vos
préventions s'évanouiront comme un songe.
La vérité a une force qui n'appartient qu'à
elle; et, quand elle vous sera connue, elle
vous subjuguera malgré vous. Heureux de
l'avoir retrouvée, vous regretterez seulement
de vous être laissé quelque temps entrainer
loin d'elle par des préjugés dont la folie de-
viendra évidente à vos regards.

Ainsi vainqueur de ces préjugés, et dé-
barrassé de toutes les craintes qu'une vaino
fantasmagorie cherchait à vous inspirer,
Vous ne songerez point à éloigner de nos
hôpitaux, de nos prisons, de nos écoles
ou de la chaire évangélique, les sœurs de
charité, les bons Frères, les disciples de saint
Dominique ou les Pères de la Compagnie de
Jésus. Surtout vous ne repousserez pas de
nos colléges ceux qui, partout où il leur est
permis d'enseigner, sont considérés comme
les instituteurs les plus vertueux, les plus
dévoués et les plus habiles; vous ne les ex-
clurez pas sous l'inconcevable prétexte qu'ils
s'associent afin de s'exciter mutuellement au
zèle, à la vigilance, à tous les soins, à tous
les travaux qui doivent faire fleurir de plus
en plus, parmi la jeunesse, la science et la
piété; sous le prétexte qu'ils font partie
d'une société sans laquelle ils ne seraient pas
ce qu'ils sont; d'une société où ils puisent el
renouvellent sans cesse, comme dans une
source intarissable, cet esprit de dévouement
et de sacrifice qui leur est si nécessaire.
Trouverait-on raisonnable d'exclure de l'en-
seignement public tous les membres des aca-
démies, par le seul motif qu'ils s'associent,
afin de s'exciter mutuellement à la culture
des sciences historiques, physiques ou ma-
thématiques, et de pouvoir ainsi en accélérer
le développement et les progrès ?

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(1) Nous donnerons, à la fin du quatrième et dernier volume de l'ouvrage, une table méthodique qui indiquera à
quels ordres se rattachent les divers articles alphabétiques de ce Dictionnaire.

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