Obrázky na stránke
PDF
ePub

comme tombée dans l'hérésie des apollinaristes (1). Se décernant à lui-même le titre de patriarche universel, il proclama également le czar souverain universel; de sorte que l'Occident voyait surgir en face de lui un système schismatique correspondant à l'État chrétien du moyen âge. L'accord des deux puissances était figuré par l'embrassement d'usage, au jour de l'an, du patriarche et du czar, et la supériorité de la dignité spirituelle du premier symbolisée, comme en Occident celle du pape, par le cérémonial de l'étrier (2). Tout cela était bien; mais, en dépit de tous ces hommages extérieurs, le rôle du patriarche de Constantinople s'effaçait peu à peu, et le pouvoir temporel prenait insensiblement en main les rênes du gouvernement spirituel, le patriarche russe n'étant qu'un instrument dont se servait l'autocratie du czar. Lors de la promotion d'Adrien, onzième patriarche, au siége de Moscou, Pierre le Grand abolit toutes ces pratiques symboliques (1699), comme incompatibles avec la dignité impériale (3), et, après la mort d'Adrien (1702), il s'avisa de ne plus conférer le patriarcat. Il le remplaça en se proclamant lui-même patriarche, et en abolissant les degrés hiérarchiques des métropolitains et des archevêques (§ 73), par un synode permanent qui devait gouverner l'Église conformément aux ukases de l'empereur (4).

Cette incorporation du patriarcat à la puissance temporelle était le couronnement du système de l'autocratie moscovite. A partir de cette époque, tout ce qui s'était préservé du fléau du schisme y fut irrésistiblement entraîné (5); les églises rentrées depuis peu dans la communion du pape s'en détachèrent de nouveau, et aujourd'hui c'est à peine si l'on conserve l'espoir de

(1) Cette hérésie avait déjà été comdamnée par Damase I". V. Theiner, Staatskirche, p. 45.

(2) Theiner, Neueste Zustande, p. 124.

(3) Hist. polit. Blætter, vol. II, p. 397 sqq.; vol. V, p. 144 sqq. Thei ner, Neueste Zustande, p. 114 sqq.

(4) Schmitt, loc. cit., 160 p. sqq. — Theiner, Staatskirche, p. 60 sqq.Histor. polit. Blætter, vol. X, p. 766 sqq.

(5) Histor. polit. Blætter, vol. V, p. 119, note; vol. IX, p. 708 $99.

maintenir dans l'unité le petit nombre de fidèles qui n'ont pas encore été entraînés dans le schisme (1).

Telle fut la marche adoptée par l'État schismatique russe; on voit clairement qu'il s'est approprié à sa manière le principe œcuménique de la Rome chrétienne et de la Rome païenne (§ 29); la tendance de ce principe, suivie avec logique et persévérance, et déjà couronnée de grands succès, ne va à rien moins qu'à la russification politique et religieuse du monde entier (2).

A côté du patriarcat impérial, dans lequel le rêve de Michel Cérulaire, qui prétendait réunir la dignité impériale à celle de patriarche, s'est réalisé en sens inverse, le patriarcat de Constantinople continue toujours de subsister. Jusqu'à ces derniers temps, à l'exception des églises unies (3), la Grèce a reconnu aussi, comme autrefois, l'autorité et les prérogatives de ce siége; mais, dans la guerre de l'affranchissement, l'Église grecque a conquis une indépendance de fait, qui, à la faveur de la régence établie pendant la minorité du roi Othon, a amené une rupture complète avec le patriarche de Constantinople. Un synode permanent institué le 29 juillet 1833, à l'instar de celui de Russie, gouverne l'Église sous la dépendance séculière (4).

C'est ainsi que l'Orient presque tout entier s'est détaché de la communion romaine, et que partout aussi où le pouvoir temporel professe le christianisme, le gouvernement de l'Église a passé dans ses mains comme conséquence finale du schisme. Le même phénomène se produit également en Occident, partout où les églises nationales se sont isolées du véritable centre que le Christ a établi pour commander toute la société chrétienne.

(1) Theiner, Schrift: Neueste Zustande, p. 131 sqq. · Blætter, vol. V, p. 148 sqq.; vol. IX, p. 708 sqq.

[ocr errors]

Histor. polit.

(2) Histor. polit. Blætter, vol. V, p. 65 sqq., p. 321 sqq.; vol. X, p. 455 sqq., p. 465 sqq., p. 583 sqq., p. 647 sqq.; vol. XI, p. 498 sqq., p. 630) sqq., p. 782 sqq.; vol. XII, p. 486 sqq.

(3) Von Maurer, Das griechische Volk, vol. I, p. 319 sqq.

(4) Von Maurer, vol. II, p. 152 sqq. - Schmitt, loc. cit., p. 125 et 180 sqq., p. 223 sqq., p. 248 sqq.

INFLUENCE DU SCHISME ET DE L'HÉRÉSIE, DANS L'ÉGLISE D'OCCIDENT, Sur

LA POSITION RESPECTIVE DES DEUX POUVOIRS.

§ CXXXVIII.

Tribus germaniques ariennes. — Angleterre, Écosse, Irlande
et Scandinaves du Nord.

L'hérésie d'Arius se propagea rapidement, à dater du neuvième siècle, dans tout le monde occidental. A l'exception des Francs, les peuples germaniques qui embrassèrent à cette époque la foi chrétienne se jetèrent tous dans l'arianisme; les Goths, les Wisigoths, Odoacre avec ses hordes barbares, les Bourguignons, les Vandales, et, pendant un certain temps, les Lombards, étaient tous ariens. La situation de l'Église, sous la domination de rois séparés d'elle par les intérêts et par la croyance, était sans doute déplorable; mais chez les Wisigoths (1) et chez les Vandales, en Afrique, elle fut en butte à une véritable persécution. Cette dernière tribu, la plus cruelle des peuplades de race germaine, avant qu'elle eût renoncé à l'idolâtrie, se distinguait encore, après sa conversion au christianisme, par la fureur avec laquelle elle sévissait contre les catholiques (2). Après la ruine des monarchies vandales et ostrogothes par Justinien, ces tribus revinrent au catholicisme. Chez les Wisigoths, Reccarède, successeur de Léovigilde, abjura l'erreur arienne, et en peu d'années (3) l'Église d'Espagne acquérait déjà la réputation d'orthodoxie dont elle s'honore encore aujourd'hui (4). Chez les Bourguignons. l'hérésie s'éteignit également lorsque le royaume fondé par ce peuple fut incorporé à l'empirefranc; et chez les Lombards la foi catholique

28.

--

(1) Isidorus, Chron. Era, 606. — Greg. Turon., Hist. Eccles. Franc. VIII, - Paul. Diac., de Gest. Langob. III, 21.

(2) Victor Vitensis, Historia persecutionis Vandalicæ.

cit., Era 501.

Isidorus, loc.

(3) Isidor., loc. cit, Era 624. — Greg. Turon., loc. cit., IX, 15. — Asch bach, Gesch. der Westgothen, p. 223.

(4) Greg. Turon., loc. cit., IX, 16.

eta des racines de plus en plus profondes, surtout à dater du règne de la célèbre Théodélinde (1) et de l'avénement de la ligne bavaroise, appelée au trône à cause de sa parenté avec cette reine; de sorte qu'à la fin du huitième siècle, là aussi il ne restait plus aucune trace de l'arianisme.

Les hérésies postérieures du moyen âge n'exercèrent aucune influence sur la détermination des rapports de l'État avec l'Église, aucune doctrine réprouvée par l'Église n'ayant pu réussir nulle part à se faire adopter comme religion officielle. C'était là une bonne fortune qui ne pouvait se réaliser en faveur des doctrines de Wicleff et de Jean Huss, qui n'attaquaient pas moins les fondements du gouvernement temporel que ceux de la hiérarchie ecclésiastique (2). Mais il n'en fut point ainsi des innovations du seizième siècle; elles eurent des conséquences immenses, qui furent, sinon en totalité, du moins en partie, le fruit naturel des malheureux essais de réforme tentés dans le siècle précédent (§ 134). C'est surtout dans la révolution religieuse d'Angleterre que cette vérité se produit avec éclat.

De tous les princes de cette époque, aucun ne s'était prononcé plus résolument, contre le système de Luther, que Henri VIII, roi d'Angleterre. Entre autres preuves de son orthodoxie, il avait composé lui-même (3) contre le chef de la réforme un ouvrage qui lui avait valu de Léon X le surnom honorable de defensor fidei (4). Hélas! alors que Clément VII donnait ce titre. au monarque anglais, il était loin de pressentir que ce même souverain, poussé par le plus honteux des motifs, deviendrait l'auteur d'un schisme que trois siècles n'ont pu encore extirper

(1) Deutsche Geschichte, vol. I, p. 387 sqq.

(2) Conc. Constantiense, Sess. 8, Artic. Joann. Wicleff., n. 15 (Hardouin, Concil., tom. VIII, col. 300): Nullus est Dominus civilis, nullus est prælatus, nullus est episcopus, dum est in peccato mortali. Sess. 15, Artic. Joann. Huss., n. 30, col. 412.

[ocr errors]

(3) Assertio septem Sacramentorum adversus Martinum Lutherum, edita ab invictissimo Angliæ et Franciæ rege et domino lliberniæ Henrico ejus nomine octavo, Lond., 1521 (Antw., 1522; Rom., 1543).

History of England, tom. VI, p. 141.

(4) V. la bulle dans Sander (note 9), lib. I, p. 199.

Lingard,

du monde chrétien (1)! Ce fut le refus du pape d'approuver le divorce du roi d'avec son épouse Catherine, sœur de CharlesQuint, qui fit éclater la rupture. Henri avait épousé cette princesse, veuve de son frère Arthur, avec dispense du pape. Tout à il se sépare d'elle sous le prétexte de scrupules de conscience, et se marie avec Anne de Boleyn, sœur de sa concubine (2). La mésintelligence qui survint à la suite de cet acte scandaleux, entre le pape et le roi, ne se manifesta d'abord que par diverses mesures vexatoires prises à l'égard du clergé (3); mais bientôt Henri se laissa entraîner, par les conseils de l'homme le plus funeste de l'histoire d'Angleterre, à d'autres actes odieux et violents. Thomas Cromwell (4), formé à l'école de Machiavel, précédemment secrétaire du cardinal Wolsey, alors conseiller du roi, lui représenta que l'Angleterre, ayant, indépendamment de lui, le pape pour chef, offrait l'image d'un monstre à deux têtes. Il lui mettait sans cesse sous les yeux l'exemple des princes allemands qui s'étaient attribué le pouvoir usurpé par les papes, l'excitant à imiter cette conduite hardie, ce qui lui était d'autant plus facile, qu'il avait tout le clergé dans sa main! Séduit par ces paroles artificieuses, Henri sut bientôt amener les évêques d'Angleterre par différents moyens d'intimidation à faire cette déclaration souverainement ambiguë, qu'ils reconnaissaient le roi comme le protecteur suprême de l'Église et de l'épiscopat anglais, comme seul et souverain seigneur, et, autant que la loi

(1) Nic. Sander, de Origine et progressu schismatis Anglicani (Colon., 1610). - Dold, The Church History of England. Brussels, 1758, 5 vol. in-fol. (Nouvelle édit. par Tierny, Lond., 1840), vol. I, p. 71 sqq. Lingard, loc. cit., p. 151 sqq. Döllinger, Fortsetzung von Hortig's Handbuch der christlichen Kirchengeschichte, vol. II, sect. 2, p. 585 sqq. (2) Que Marie de Boleyn eût été la maîtresse de Henri, c'est un fait qu'il n'est plus possible de contester. Lingard, loc. cit., p. 152; ib., 3. p. Sunder, loc. cit., lib. I, p. 48 et 86. Sander va même jusqu'à prétendre qu'Anne de Boleyn était sœur de Henri, V, p. 88. On sait que Henri accusa Anne d'adultère et la fit mettre à mort. Le lendemain il épousa Jeanne Seymour, et, après la mort de celle-ci, Anne de Clèves, qu'il répudia; ensuite Catherine Howard, qu'il envoya à l'échafaud; enfin Catherine Parr, qui lui survécut.

(3) Lingard, loc. cit., p. 219. (4) Id., ibid., p. 231.

[ocr errors]
« PredošláPokračovať »