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la merci du pouvoir temporel, tel qu'ils l'avaient eux-mêmes créé, omnipotent et souverain (§ 139) (1).

Les théologiens avaient essayé d'établir ce pouvoir, à la fois royal et sacerdotal, sur la sainte Écriture; mais on conçoit qu'une semblable interprétation de la parole divine ne pouvait résister longtemps au scalpel de la critique; ils s'en remirent alors aux juristes du soin de trouver une base juridique pour ce droit de leur création (2). Ceux-ci rattachèrent aussitôt leur théorie à la paix religieuse d'Augsbourg, et signalèrent la suspension de la juridiction ecclésiastique, qui y était prononcée jusqu'à la solution définitive du différend religieux, comme emportant la dévolu tion de cette juridiction aux souverains. Cette doctrine, qui se produisit dès la fin du seizième siècle (3), fut peu après, et en premier lieu, par Matthieu Stephani, érigée scientifiquement en théorie, sous le nom de système épiscopal (4). Conformément à ce système; les princes protestants, en attendant la décision de la diète générale des États, furent considérés provisoirement comme investis des attributions épiscopales.

Dès l'année 1554, il s'était tenu à Raumbourg un congrès des théologiens protestants les plus accrédités, où il avait été décidé, sans détour, qu'il ne fallait plus songer au rétablissement de l'au

(1) Menzel, loc. cit., vol. III, p. 476.

(2) D. Nettelbladt, de Tribus systematibus doctrinæ et jure sacrorum dirigendorum domini territorialis evangelici quoad ecclesias evangelicas sui territorii (Observationes jur. eccles. Hala, 1783), p. 105 sqq. Klee, das Recht der Einen allgemeinen Kirche Jesu Christi, p. 30 sqq. F. I. Stahl, die Kirchenverfassung nach Lehre und Recht der Protestanten. Erl. 1840, p. 5 sqq. Walter, Kirchenrecht, § 38 sqq. — Richter, Kirchenrecht, § 31, 3te Aufl. Histor. polit. Blætter, vol. VI, p. 596 sqq. (3) Hess. Reform. Ordn., v. I, 1572. Bickell, über de Reform. de protest. Kirchenverfassung, p. 22.

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(4) M. Stephani, Tract. de jurisdictione, qualem habent omnes judices tam sæculares, quam ecclesiastici in imperio Rom. Francof. 1611. — Th. Reinkingk († 1644), Tract. de regimine sæculari et ecclesiastico. Giess. 1619. Ben. Carpzov († 1666), Jurisprud. ecclesiast. seu consistorialis. Ilanov. 1545.-Fr. E. de Moser, Vertraute Briefe über das protestantische geistliche Recht. (Frankfurth, 1761) Eilster Br. - Nettelbladt, Anmerkungen über die Kirchengewalt d. evang. Landesherren (Abhandlungen. Halle, 1783).

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torité épiscopale, attendu qu'il était contraire à la loi évangélique qu'il existât des évêques, d'où l'on concluait, en invoquant passage de la Bible dont nous avons parlé plus haut, que c'était aux souverains qu'il appartenait de pourvoir à l'enseignement de la saine doctrine et de gouverner l'Église par les consistoires (1).

Du reste, à cette époque, cette théorie n'était déjà plus de la nouveauté : ce n'était que la consécration de faits accomplis et la reconnaissance de principes déjà professés par un grand nombre de docteurs protestants, parmi lesquels Capito s'était fait remarquer par la hardiesse et le ton dogmatique de ses conclusions. Quoi qu'il en soit, la prorogation de la juridiction ecclésiastique, stipulée dans le traité d'Augsbourg, ne pouvait en impliquer la dévolution aux princes allemands : cette dévolution était d'ailleurs radicalement impossible, d'après les principes du droit canonique.

Cependant plusieurs épiscopalistes inclinaient à admettre certains droits afférents originairement au pouvoir séculier et qui lui avaient été rendus par la paix de religion; ils frayaient ainsi la voie à l'établissement d'une sorte de système territorial (2). Ce système, complétement hétérodoxe et antichrétien, enté sur les pernicieuses doctrines de Grotius, d'Hobbes et de Spinosa, fut poussé à ses extrêmes conséquences et appliqué à tout l'organisme de la puissance spirituelle. Développé par Chr. Thomasius, pour servir de base à la constitution religieuse de l'Allemagne (1728), il assimilait le gouvernement de l'Église aux autres droits de régale, en les faisant dériver de l'essence même du pouvoir (3). Sous plus d'un rapport, cette doctrine, dont le principe fonda

(1) Menzel, loc. cit., vol. III, p. 534 sqq.

(2) Reinkingk, loc. cit., lib. III, class. 1, cap. 10: Non tam data quam restituta fuit. Stahl, loc. cit., p. 10.

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(3) Chr. Thomasius, Vom Rechte eines Fürsten in Mitteldingen. Halle, 1695. Vom Rechte evangelischer Fürsten in theologischen Streitigkeiten. 1696. Vindiciæ juris majestatici circa sacra, 1699. — J. H. Bœhmer (diss. de jure episcopali principum evangelicorum. Hal. 1712; Jus eccles. Protest., tom. I, tit. XXVIII, XXX, et tom. V, Præloquium de systemat. univ. jur. can.).

mental formulé par cette maxime: Cujus est regio, ejus est religio, s'accordait parfaitement avec la situation de fait existante dès le commencement du dix-septième siècle. Du reste, on ne peut se dissimuler que la convention d'Augsbourg ne fût trèsfavorable aux idées de Thomasius, et, comme nous l'avons déjà dit, ce système était depuis longtemps familier dans la pratique aux souverains des États germaniques. L'électeur Jean Sigismond, embrassant le protestantisme et laissant ses sujets luthériens dans leur confession, signalait cette conduite dans sa lettre réversale aux États, comme un renoncement de sa part à son droit suprême de régale (1).

Dans la première moitié du siècle dernier, à ces deux théories s'en joignit une troisième tout aussi fausse, qui se rattachait à la doctrine des calvinistes et des presbytériens, et en partie aussi à celle de Puffendorf. Ch.-M. Pfaff (1760), premier fondateur de ce système, distinguait la haute régale (jus circa sacra), inhé rente à la qualité même de souverain, et le pouvoir spirituel (jus in sacra), qu'il faisait émaner d'une collation tacite de la part du peuple chrétien, qui en était le dépositaire originel, et qui en avait été dépouillé par l'usurpation de la hiérarchie (2). Ces opinions, entièrement conçues en dehors des principes et des notions essentielles du christianisme, ont d'autant moins besoin d'une réfutation directe, qu'elles sont, de nos jours, presque généralement rejetées par les écrivains protestants eux-mêmes. Du reste, elles ne sont que la conséquence naturelle et forcée du protestantisme. Dieu a institué deux puissances pour gouverner le monde; quand on a foulé aux pieds l'autorité de l'une, l'autre s'empare inévitablement de ses droits, et c'est ainsi que la réunion, au point de vue protestant, de l'épiscopat et du droit de réforme, devait produire et a produit effectivement une puissance beaucoup plus étendue que celle dont étaient investis le pape et les évêques.

(1) Menzel, loc. cit., vol. VI, p. 104.

(2) Pfaff, Origines juris ecclesiastici. Tüb. 1719. J. U. de Cramer, Diss. de jure circa sacra collegiali et majestatico. Marb. 1756 (Opusc., tom. II).

La paix religieuse d'Augsbourg venait clore le deuxième acte du grand drame du schisme luthérien. Il avait commencé par le développement de la puissance spirituelle des souverains; il se terminait par la reconnaissance légale du lutheranisme, comme la religion de l'empire, comme l'Église nouvelle des rois, surgissant en face de l'antique Église du pape. Mais les droits revendiqués par l'hérésie, en faveur de cette Église sécularisée, portaient maintenant tous leurs fruits et enfantaient toutes leurs conséquences. Déjà, à la vue des immenses progrès du calvinisme dans la Confédération germanique, Luther avait eu le cœur brisé de tristesse (1). Cette doctrine, qu'il avait signalée, dans les termes les plus énergiques, comme une véritable hérésie, s'était répandue comme un torrent dans toute l'Allemagne. Elle comptait même des prosélytes jusque dans Wittemberg; et, pour comble de succès, elle avait presque gagné à sa cause Mélanchthon, l'un des apôtres du lutheranisme! L'Église luthérienne, menacée de ruine, se vit dans la nécessité de prendre, vis-à-vis du calvinisme, la position que ses fondateurs avaient refusée à l'Église catholique; mais elle avait trop présumé de son autorité sur les souverains allemands; cette arme se brisa dans ses mains, et la puissance qu'elle avait appelée à son secours contre Rome se tourna cette fois contre elle-même.

Pour mettre une digue à l'invasion des doctrines calvinistes, le principe de la foi obligatoire fut inscrit, dans les termes les plus sévères, dans la formule concordataire rédigée par André (1577) (2), et la puissance souveraine expressément invitée à user de tous les moyens pour étouffer l'hérésie. Le traité d'Augsbourg exceptait formellement les calvinistes de la paix qui y était conclue. Se prévalant de cette disposition, comme voulurent le faire postérieurement encore les luthériens (3), l'empereur Maximilien II somma Frédéric III, électeur palatin, sous les auspices

(1) Menzel, loc. cit., vol. II, p. 243 sqq., p. 420 sqq. · · Döllinger, die Reformation, vol. I, p. 307 sqq. Histor. polit. Blætter, vol. XIII,

p. 47.

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(2) Menzel, loc. cit., vol. IV, p. 491 sqq., p. 506 sqq. (3) Id., ibid., vol. VII, p. 197 sqq.

duquel avait paru, en 1563, le catéchisme d'Heidelberg, d'avoir à abjurer le calvinisme; mais l'électeur de Saxe, trouvant que, pour le moment, il était dans son intérêt politique de ne pas se faire un ennemi d'un prince aussi puissant que Frédéric, laissa l'empereur dans l'embarras (1). Sous prétexte que l'électeur palatin s'accordait sur plusieurs points avec la confession d'Augsbourg, il fut considéré comme un de ses adhérents; c'était un triomphe pour le calvinisme, qui prit dès lors un essor prodigieux. La digue que la paix de religion lui avait opposée, était renversée, et, quoiqu'il rencontrât encore certains obstacles sur sa voie, il était néanmoins facile de prévoir dès ce moment qu'il parviendrait à faire reconnaître ses droits à l'égal du luthéranisme. Cette victoire des calvinistes eut pour conséquence immédiate la confiscation dn pouvoir épiscopal par les princes de leur confession; ceux-ci, s'appuyant sur les clauses des traités d'Augsbourg, décidaient souverainement, à l'exemple des princes luthériens, de la religion de leurs sujets. C'est ainsi que l'Allemagne protestante commença à gémir sous l'application d'un principe dont les effets furent vraiment désastreux, là surtout, où, comme dans le Palatinat et la Saxe, les souverains changeaient fréquemment d'église, passant tantôt au lutheranisme et tantôt au calvinisme. Chacun de ces changements avait pour résultat la persécution de la confession précédemment dominante (2). C'est l'ère des proscriptions et des représailles sans fin proscriptions des calvinistes par les princes luthériens, des luthériens par les princes calvinistes (5); l'ère des dépositions incessantes des prédicateurs de la veille par ceux du lendemain, où l'on détruisait les ouvrages de l'école de Mélanchthon, où l'on faisait même la motion de livrer aux flammes son cadavre (4); l'ère enfin qui renouvela les sacrifices humains des siècles idolâtres, et qui vit immoler en holocauste à la barbarie théologique, ici, Funk, comme

(1) Menzel, loc. cit., vol. IV, p. 382.

(2) Id., ibid., vol. IV, p. 447 sqq., p. 489 sqq.;]vol. V, p. 169, p. 175, p. 184.

(3) Id. ibid., vol. VI, p. 76.
(4) Id. ibid., vol. IV, p. 333.

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