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Archéologie chrétienne.

QUELS ÉTAIENT LES FOUETTEURS PUBLICS

CHEZ LES ROMAINS

A PROPOS DE la flagellATION DE JÉSUS ET DU BON LARRON.

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Sous le titre d'Histoire du bon Larron, dédiée au 19° siècle1, Mgr Gaume vient d'écrire un livre d'un intérêt tout particulier. Ce n'est pas seulement un livre de piété et d'édification, c'est sutout un livre d'érudition et d'histoire. Peu de personnes pensent au bon Larron et en soupçonnent l'histoire; et pourtant on est étonné de la place qu'il occupe dans l'histoire de l'Eglise, et des documents légendaires ou tout à fait authen-. tiques que la tradition nous a laissés sur ce converti célèbre. La dédicace au 19° siècle s'explique d'elle-même, car comme le grâcié du Calvaire, le 19e siècle, de l'aveu commun, est un grand voleur: voleur de provinces, voleur de dynasties, voleur de réputation, voleur d'argent surtout. Mgr Gaume, en mettant devant les yeux ses crimes, lui montre en même temps comment il peut s'en laver, et mériter, comme le bon larron, d'être un jour dans le paradis, selon la promesse du Christ. Mais ce n'est pas de la partie spéculative que nous avons à nous occuper ici. Nous ajouterons que nulle part on ne trouve mieux exposées toutes les circonstances qui accompagnèrent le grand sacrifice qui s'accomplit sur le Calvaire avec le crucifiement du bon Larron. Les auteurs païens et chrétiens sont tour à tour consultés, et donnent tout ce qu'il est possible de savoir sur les souffrances qui précédèrent ou accompagnèrent le drame sanglant du supplice de la Croix. Tous les chrétiens doivent le lire comme un supplément à ce qui nous est raconté par les évangélistes. Nous nous bornons ici à donner quelques faits de la vie du bon Larron, et à extraire du livre de Mgr Gaume un détail peu connu sur les hommes qui, chez les Romains, étaient chargés d'infliger les flagellations à tous ceux qui étaient punis du dernier supplice.

Vol. in-12 de 364 p., à Paris, chez Gaume frères, 3, rue de l'Abbaye.

Le bon Larron, d'après la tradition la plus acceptable, s'appelait Dimas. Il était natif de l'Egypte, fils de voleur, et le chef d'une de ces bandes de voleurs qui infestaient la Palestine à l'époque dont nous parlons. Et, en effet, nous avons vu Hérode obligé de sévir souvent contre eux, par des expéditions armées, comme contre une nation ennemie. Une légende ancienne assure que Dimas protégea la sainte Famille quand elle se retira en Egypte, et qu'elle fut arrêtée par les voleurs. Mgr Gaume cite tous les témoignages qui rendent compte de ce fait, et allègue les témoignages des Pères, qui assurent que ce fut là le principe de sa conversion, par la grâce qui lui fut accordée pour cette bonne action.

Mgr Gaume suit ses traces, autant que possible, pendant sa longue vie de crimes; puis nous le montre tombant entre les mains de la justice romaine et juive, conduit à Jérusalem, et condamné au supplice de la croix en même temps que le Sauveur Jésus, et un autre larron qui se nommait Gestas. Et ici il montre, par les auteurs anciens, comment le dernier supplice était toujours précédé d'une cruelle flagellation. On connaît la formule romaine : « Va, licteur, attache-le au poleau: I, lictor, deliga ad palum. » Mais qui étaient les licteurs? C'est ce que Mgr Gaume nous apprend dans le texte suivant:

Les Romains avaient des exécuteurs et des fouetteurs publics. Quels étaient ces hommes ? Furent-ils, à l'égard de Notre-Seigneur et de Dimas, les instruments de la justice romaine?

A trois points de vue, cette question nous semble digne d'examen. Au point de vue de l'histoire générale, elle touche à des usages peu connus des anciens peuples. Au point de vue de l'histoire particulière, elle nous initie à un détail intime sur l'exécution de Dimas. Au point de vue religieux, tout ce qui tient au grand drame du Calvaire est l'objet d'une vive et noble curiosité.

Tout le monde connaît l'histoire des Gabaonites. Ce petit peuple de la terre de Chanaan, voyant de quelle manière Josué, par l'ordre de Dieu, traitait les nations voisines, voulut échapper au même sort. Ayant tenu conseil, les anciens eurent recours au stratagème suivant. Ils prirent des pains durs et réduits en miettes, qu'ils mirent dans de vieux sacs, puis, des outres à vin, toutes fendues et recousues. Aux pieds de leurs députés, ils adaptèrent les plus vieilles chaussures qu'on pût trouver, et sur leurs dos, des habits tout râpés.

Précédés de quelques ânes efflanqués, qui portaient leurs provisions, ces députés se présentèrent au général des Hébreux, campé à Galgala. « Nous venons, » lui dirent-ils, d'un pays éloigné, attirés par le bruit de vos exploits et désirant

» faire alliance avec vous. Voyez, quand nous sommes partis, nos pains étaient >> tout chauds, nos outres toutes neuves. Il en était de même de nos chaussures » et de nos habits, qui sont maintenant usés à cause de la longueur de la route. >> On les crut, et on fit alliance avec eux. Trois jours après leur départ, Josué apprit que ces prétendus étrangers étaient les habitants d'un pays voisin. II marcha contre eux et 'prit leur capitale, Gabaon; mais, par respect pour la foi jurée, il épargna les habitants. Seulement pour les punir de leur ruse, il condamna les Gabaonites et tous leurs descendants à être les bûcherons et les porteurs d'eau du peuple d'Israël 1.

Cette conduite, que justifient les droits de la guerre, fut imitée par les Romains 2. Vainqueur au Tessin, à la Trébie et à Trasimène, Annibal, au lieu de descendre directement sur Rome, par la vallée de l'Ombrie, s'emparait des contrées voisines de la mer. Son but était de pouvoir promptement et sans obstacle, recevoir des secours de Carthage. Les habitants du Picénum et des Calabres, Picentini et Frutii, furent les premiers qui se rendirent à lui et qui épousèrent sa fortune. Annibal ayant été chassé d'Italie, les Romains infligèrent aux deux peuplades, qui avaient donné le signal de la défection, un châtiment exemplaire.

Laissons la parole aux auteurs païens. « Picentia, dit Strabon, était la ca>> pitale des Picentins 3. Mais les habitants demeurent aujourd'hui dans des » villages. Expulsés de leurs villes par les Romains, pour les punir de s'être » joints à Annibal, ils furent exclus du service militaire, et condamnés, eux et leurs descendants, à être les curseurs et les tabellaires de la République *. » Plus humiliante fut la punition des Brutiens 5. Ils furent condamnés à servir de licteurs aux grands magistrats de la République. Beaucoup de fonctions dévolues aux esclaves leur étaient assignées. La plus ignominieuse était d'être

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' « Sic vivant, ut in usus universæ multitudinis ligna cædant aquasque comportent.» Josué, IX, 21.

2 On peut ajouter par les Spartiates à l'égard des Ilotes.

3 Pays appelé aujourd'hui Marche d'Ancône.

"Picentium caput fuit urbs Picentia; sed nunc per pagos habitant, a Romanis urbe expulsi, quod Annibali se conjunxissent; quo quidem Reipublicæ statu pro militiæ iis injunctum fuit ut cursores et tabellarii essent. Geograph., lib. v, vers. fin., édit. in-fol. 1707. Les curseurs faisaient à peu près les fonctions des laquais des grands seigneurs. Ils marchaient devant leur maître, ils l'annonçaient, ils écartaient la foule sur son passage et faisaient ses commissions. Les tabellaires étaient les courriers, les postillons, les estafettes de la république. Leur nom vient de tabella, tablette de bois très-mince enduite de cire, sur laquelle on écrivait les lettres et les dépêches. Soigneusement renfermées dans des enveloppes de cuir, de parchemin ou de toile, et scellées du sceau de l'expéditeur, ces tablettes étaient mises dans des sacs, que le courrier suspendait à son cou; puis, à cheval, à pied ou autrement, il les portait à destination jusqu'aux provinces les plus éloignées de l'empire. Cicér. Epist. famil., xvi, 21.

Aujourd'hui habitants de la Calabre.

les fouetteurs publics. « Caton, écrit Aulu-Gelle, invectivant contre Quintus » Thermus, lui reprochait d'avoir dit : Les décemvirs ont mal préparé mon » dîner. Sur quoi il les fit dépouiller de leurs vêtements et flageller. Les Bru» tiens flagellèrent les décemvirs. Le peuple en fut témoin. Qui peut souffrir >> une pareille injure, un pareil outrage, une pareille marque de servitude 1?»> Comme les habitants du Picénum, les Brutiens furent exclus des armées romaines, et, en aggravation de peine, obligés de fournir les licteurs de la République. Arrivés de leur pays, on les mettait aux ordres des magistrats envoyés dans les provinces. Ils les suivaient, comme dans les comédies ces valets appelés Lorarii ou fouetteurs; car une de leurs fonctions était de lier et de flageller ceux qui leur étaient désignés 2.

Est-ce à ce peuple de fouetteurs officiels qu'appartenaient ceux qui flagellèrent Notre-Seigneur, Dimas et son compagnon? Baronius n'ose l'affirmer. Nous ne serons pas plus affirmatif que le savant cardinal. Disons seulement que c'est une insulte qu'on a longtemps jetée au front des Calabrais. Il est certain, d'après le passage d'Aulu-Gelle, que, peu’d'années avant Notre-Seigneur, les Brutiens remplissaient encore la honteuse fonction. Il est également certain que Pilate avait des licteurs et que c'étaient chez les Brutiens qu'ils se recrutaient. Telle était la règle générale.

Que plus tard et dans bien des cas, les soldats, et même d'autres personnes, aient rempli ce ministère, le témoignage de Tertullien ne permet pas d'en douter 3. Mais, comme dans l'histoire de la Passion, nous voyons, d'une part,[que Notre-Seigneur a été flagellé, ce qui eut également lieu pour les deux voleurs; et que, d'autre part, les soldats ne sont nullement désignés, comme ayant été les ministres de la flagellation proprement dite, on pourrait conclure, ce sem. ble, que la triste fonction fut remplie par les Brutiens *.

Le reste du livre est employé à parler des vertus manifestées par le bon larron, des voleurs célèbres qui se sont convertis, de la découverte des croix qui auraient servi au sacrifice du Calvaire, et du culte que l'Eglise a permis que l'on rendit au bon larron, dont la fête est marquée dans le martyrologe romain au 25 mars.

A. BONNETTY.

'Q. Thermus dixit a decemviris parum sibi bene cibaria curata esse. Jussit vestimenta detrahi atque flagro cædi. Decemviros Brutiani verberavere. Aul. Gell., lib. x, c. III.

? Itaque hi sequebantur magistratus, tanquam in scenicis fabulis qui dicebantur Lorarii, et quos erant jussi vinciebant et verberabant. Festus, vo Bru

tiani.

3 Suadens homini christiano ne militet, hæc ait : « Et vincula, et carcerem et tormenta et supplicia administrabit, nec suarum ultor injuriarum, etc. » De coron., milit., c. II.

Voir Bar., an. 34, no 83, 84.

Apologétique catholique.

RÉPONSE AUX PRINCIPALES OBJECTIONS

Dites SCIENTIFIQUES

FAITES CONTRE LA BIBLE.

Sous ce titre Aveugles volontaires ou involontaires, M. l'abbé Moigno fait la réponse suivante à un des savants anti-bibliques les plus renonimés :

«Le croirait-on? Un homme d'esprit et de talent, qui a beaucoup lu, beaucoup appris, beaucoup écrit, M. Henry de Castelnau, dans le Moniteur scientifique de M. Quesneville, va jusqu'à dire cette monstruosité:

« Il faudrait être aujourd'hui aveugle, sourd et muet de naissance pour » croire à l'infaillibilité des bibles (dites la Bible, il n'en est qu'une), en sup» posant qu'on puisse croire quelque chose, quand on est tout cela. Les -» preuves du contraire courent tellement les rues qu'on a quelque honte de les >> rappeler; nous résumerons cependant les plus saillantes, puisqué cela paraît encore nécessaire. »>

Nous ne sommes certainement ni aveugle, ni sourd, ni muet de naissance, et nous affirmons avec la conviction la plus profonde, d'accord avec les savants les plus illustres, qu'il n'est rien, absolument rien, dans la sainte Bible, qui soit contraire à la science, en opposition avec une vérité scientifique quelconque. Voyons les preuves de M. de Castelnau, elles sont à mourir de rire, et il n'a pas à craindre que nous nous irritions sérieusement contre son excès d'audace.

1o La Bible enseigne que tous les êtres organisés ont été créés en quelques jours après la terre! — Non, mille fois non ! Les jours de la Bible peuvent être des périodes de temps aussi longues qu'il plaira à M. de Castelnau.

2o La Bible enseigne que la terre est plate. Non, mille fois non! La Bible parle des extrémités de la terre, des bouts du monde, comme nous en parlons encore aujourd'hui, avec la conviction que la terre n'est pas un bâton à deux bouts. La Bible parle souvent des gonds et des pôles de la terre; Job, dans son magnifique langage, nous montre Dieu prenant la terre par les deux extrémités de son axe et la secouant pour en faire sauter les impies. Lorsqu'il dit que tout ce qu'il voit est à lui, le marquis de Carabas ferait-il donc acte de foi à la terre plane? Ce serait une platitude que de le dire.

3o La Bible enseigne que le ciel ou le firmament est une voûte, où sont comme fixés, enchâssés, le soleil, la lune qui tournent autour de la terre. Mensonge! La Bible parle des étoiles, nous le rappellerons ailleurs, comme en parlent les astronomes les mieux inspirés, de leur multitude innombrable, de leur lumiêre propre, variant de l'une à l'autre en nature et en éclat, de leurs mouvements, etc., etc.

4° La Bible considère. la lune comme un corps lumineux par lui-même; les

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