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mot, la chose, l'événement, la croyance, etc. Les commentateurs récents, Heyne, Lemaire, etc., ont pu mettre plus de critique, plus de solidité, mais aucun n'a réuni de plus longues et de plus complètes explications; ajoutons que sur les marges se trouvent isolés les mots expliqués, et l'on aura une idée de la grandeur de cette œuvre immense. Le dernier volume contient trois index, le 1er de tous les mots grecs expliqués dans les notes, le 2o des matières, le 3 l'index de tous les mots de Virgile donné par Erythraus, et accommodé par Ant. M. Bassus à toutes les éditions de Virgile.

9. Défense de Virgile par le P. Galluzzi. Après l'œuvre du P. La Cerda, vient celle bien plus adulatrice du P. Tarquin Galluzzi.

Le P. Galluzzi avait longtemps professé cette morale d'Aristote, sur laquelle le Ratio studiorum de sa compagnie lui défendait de faire aucune digression dans la théologie1; c'était la morale sans le Dieu médiateur. C'est sans doute ce qui lui avait ôté le sens chrétien si profondément absent de son apologie de Virgile; le fruit de ses leçons fut publié en 1632, à Paris, en 2 vol. in-fol., sous le titre suivant :

« In Aristotelis libros quinque priores moralium ad NicomaD chum, nova interpretatio, commentarii, quæstiones. »

Et en 1645, en un vol. in-fol. pour les quinque libros posteriores. 3 énormes volumes in-fol., pour enseigner la morale d'Aristote, avec exclusion de l'Écriture et de la Théologie. - C'était la méthode. On voit qu'elle a réussi !

En 1621, ce même père publia l'ouvrage suivant :

a

Tarquinii Gallutii, Sabini, e Societate Jesu, Virgilianæ › vindicationes, et Commentarii tres, de tragœdia, comœ» dia, elegia, cum privilegio; Romæ 1621, superiorum perDmissu 2; vol. in-4° de 510 p. »

Ce livre singulier renferme 3 parties: la 1r comprend 16 défenses des poëtes en général et d'Homère en particulier, contre les critiques de Platon. Il y prétend que tout peut être

1 Voir le texte, Annales, t. vi, p. 241 (4a série).

2 Les supérieurs invoqués ici sont le P. Mutius Vitellescus, général des jésuites, et le P. Donatus, dominicain, qui, dans son approbation, appelle Virgile divinus poeta (p. xii).

justifié d'après les règles posées par Aristote, après quoi, alors, il n'y avait plus rien à dire; la 2o comprend' 12 chapitres correspondant aux 12 livres de l'Enéide. « Le P. Galluzzi, comme » le dit Baillet, y cherche à justifier Virgile, à quelque prix » que ce soit. Mais il y a plusieurs objections qu'il n'a point » proposées dans toute leur force, de peur de s'ôter la facilité » d'y répondre 1. » Ainsi il ne dit pas un mot des reproches faits à Virgile par le P. Possevin, son confrère, dont le livre, paru à Rome en 1593, avait eu une édition à Venise en 1603, et une autre à Ausbourg, en 1607; ouvrage également approuvé par les supérieurs 2. Il ne dit rien non plus de ces mœurs contre nature, qui sont ostensiblement chantées dans la 2o Eglogue et ailleurs.

Le P. Galluzzi s'attache surtout à prouver que Virgile n'a commis aucune faute contre les règles posées par Aristote. Ses justifications sont bizarres, puériles et inconcevables en bien des points pour un chrétien et un religieux. Ainsi il explique que lorsque Virgile dit que Didon, au moment de mourir, offre un sacrifice, un pied chaussé et l'autre nu, Ipsa mola manibusque piis, altaria juxta,

Unum exuta pedem vinclis, in veste recincta,
Testatur moritura deos (Enéide, iv, 517),

cela est très-convenable, e parce que le pied nu montre la > crainte de la mort, tandis que le pied qui conserve des liens » et la sandale désigne les autres perturbations de l'âme 3. »

Quant au suicide de Didon, «nous prétendons, dit le P. Gal» luzzi, par l'autorité de Platon même, excuser tout à fait Vir>gile de tout soupçon d'erreur. Je confirme, dis-je, qu'en sui» vant Platon et les platoniciens, il a pensé que Didon avait eu » une très-juste raison de se donner une mort volontaire 4. »

1 Baillet, Jugements des Savants, no 1067, t. 1, p. 296, in-4° 1722.

2 Les approbateurs sont Antoine de Vice Dominis, évêque d'Avellina, vicegérant de Rome, le P. Barth. Miranda, dominicain, maître du Sacré palais et de Claud. Aquaviva, général des jésuites, qui regarde l'ouvrage comme trèsutile à la gloire de Dieu.

3 Itaque alterum pedem qui pavorem illum mortis significat, nudum habet; alterum qui reliquas animi perturbationes designat, vinculis retinet et sandalibus impeditum (Virgilianæ vindicationes, p. 104).

'De Virgilio pergo dicere, quem ipsius auctoritate Platonis eripere ab omni

D'ailleurs, on voit que « Virgile, en nous montrant Didon » sur le point de mettre à exécution la chose la plus dificile » du monde, à sçavoir la mort volontaire, a soin de la repré» senter avec un pied nu, c'est-à-dire libre et délivrée de la » crainte de la mort 1. >>

Il faut voir comment le P. Galluzzi soutient que, malgré ses peccadilles, Énée doit être déclaré probe et pieux. «Quant » à ce qui concerne la probité et la justice, que doivent pos» séder ceux qu'on doit appeler parfaitement et absolument » Pieux, je ne mets aucun doute à prononcer qu'Énée fut très>> innocent et très-juste. En ce qui concerne l'opprobre dont » il couvrit Didon, il est facilement excusé, puisqu'il fut plu» tôt conduit par elle à cette fraude de l'amour, qu'il ne l'y >> conduisit lui-même 2. >>

Pour ce qui est des huit guerriers latins qu'Énée immole aux mânes de Pallas, le P. Galluzzi traite de déclamateur Lactance 3, qui avait blâmé Virgile, et trouve qu'Énée a bien fait.

« Parce que Virgile a regardé cette exécrable superstition » comme la vraie religion, il a fait des choses tout à fait con» formes à cette superstition, et Énée qui, en apparence, pa» raît très-cruel à l'égard de ces captifs et de ces suppliants, a ▸agi très - pieusement et très-miséricordieusement à l'égard » de Pallas 4. >>

Ainsi voilà César absous d'avoir fait inhumer vivants quatre prorsus errati suspicione contendimus. Confirmo, inquam, eum, et Platonem, et Platonicos secutum, existimasse Didonem justissimam voluntariæ mortis habuisse causam (ibid., p. 134).

1 Virgilius rem omnium omnino difficillimam, hoc est mortem voluntariam, aggressuram Didonem inducit uno tantummodo nudam pede, hoc est uno metu mortis solutam ac liberam (Ibid., p. 105).

2 Quod vero de probitate, deque justitia dicitur, qua præditos esse opporteat eos, qui perfecte absoluteque dicendi sunt Pii, pronuntiare non dubitaverim, Eneam innocentissimum, ac justissimum esse. Quantum enim attinet ad compressam Didonem, facile se purget; cum ab ipsa potius in eam amoris fraudem perductus sit, quam eamdem ipse perlexerit (ibid., p. 53).

Voir Lactance, Inst. div., v. 10; Pat. lat., t. vi, p. 580.

4 Sed quia superstitionem execrabilem veram putavit religionem, illi superstitioni maxime congruentia finxit et Æneam maxime pium ac misericordem fecit in Pallantem... maxime dicendus est pius; immò verò etiam clementissimus est habendus (ibid., p. 54).

Gaulois, et Auguste d'avoir sacrifié 300 chevaliers et sénateurs sur l'autel de son oncle.

Or, le bon Père calomnie ici Virgile, en l'accusant de regarder cette exécrable superstition comme la vraie religion. Il oublie ou cache qu'à l'époque de Virgile, cette exécrable superstition n'existait presque plus, et que Virgile par conséquent a eu tort de la faire revivre; que Cicéron, dont les livres couraient alors partout, annonçait déjà qu'à cette même époque, il n'y avait pas de vieille femme assez privée de cœur » qui crût au Tartare païen 1. »

Il oublie ou cache ce que disait peu après Juvénal:

« Qu'il y ait des mânes, un royaume souterrain, un Charon Det de noirs reptiles dans les gouffres du Styx; que tant de » milliers d'hommes traversent l'onde fatale dans une seule » barque, c'est ce que ne croient plus même les enfants à » peine arrivés à l'âge où il faut payer pour se baigner aux > bains publics.

Esse aliquid manes, et subterranea regna,

Et contum, et Stygio ranas in gurgite nigras,

Atque una transire vadum tot millia cymba,

Nec pueri credunt, nisi qui nondum ære lavantur (Satir., II, 149).

La 2o partie se compose de 3 discours:

Dans le 1er, le P. Galluzzi cherche à prouver, par l'examen des poëmes d'Homère et de Virgile, qu'une philosophie trèsprofonde est cachée dans leurs poëmes; et pour en donner une idée, il nous apprend que dans le jugement de Pâris, inventé par Virgile, « Pallas figure la contemplation, Junon l'ac» tion, et Vénus la volupté, et qu'il ne faut pas s'étonner si » Pâris, homme de peu de jugement, non érudit, ni savant, >> mais un berger ignorant, grossier, et menant avec les bêtes » une vie telle qu'il paraît peu différer d'elles, ait donné la » pomme à Vénus 2. »

Le 2e discours est destiné à prouver, en 12 p. in-4°, que Vir

Voir le texte dans les Annales, t. xi, p. 23 (5o série).

2 Contemplantem Palladem, actuosam Junonem, Venerem voluptuariam... auctorem judicii non acutum hominem esse opportuit, non eruditum ac doctum, sed pastorem imperitum ac rudem hominem, belluarum pene convictu. sic utentem, ut parum ab iis differre videretur (ibid., p. 219).

gile dans son poëme n'a pas cherché à décrire les causes cachées de la nature ou des éléments, mais qu'il a déposé dans des allégories, que les ignorants ne savent pas discerner à travers ses fables, « toute la discipline des mœurs et les pré» ceptes de la prudence civile, de sorte qu'on peut le dire le » Théologien par excellence et l'interprète du droit Pontifi» cal 1. »

Or, c'est dans le 3 discours que le P. Galluzzi prouve que Virgile a donné ces préceptes si précieux des bonnes

mœurs.

Et d'abord, il attaque de nouveau en ces termes Lactance, qui avait douté de la sainteté d'Énée :

« Je me déroberai facilement à l'attaque déclamatoire de » Lactance, qui se rue, à bride abattue, sur Virgile, de ce que » ce pieux, cet intègre, ce Saint empereur Énée, n'a pas hé»sité à immoler aux ombres des victimes humaines 2. >>

Voici maintenant comment il prouve que Virgile a fait d'Énée le modèle de la perfection morale. Et ici nous empruntons une page de Mgr Gaume, qui, dans un ouvrage que tous ceux qui désirent connaître les causes de la décadence des esprits et des croyances, devraient lire, méditer, et compléter pour toutes leurs études, dit:

30 Virgile est un très-savant moraliste. « Un très-savant mo» raliste est celui qui connaît à fond et qui décrit parfaite» ment dans leur nature et dans leur rôle les grandes vertus » qui forment les mœurs. Parmi ces vertus, il y en a quatre » qui tiennent le premier rang et qu'on nomme pour cela » cardinales: la prudence, la tempérance, la force, la justice. Or, » Virgile a très-bien connu ces quatre vertus, puisqu'il nous » les montre parfaitement pratiquées par le fils d'Anchise.

1 Ut credam, non ipsas naturæ causas occultas, sed morum disciplinam, civilisque prudentiæ præceptiones allegoriis a Virgilio, tanquam in umbris ac recessu fuisse conditas, quæ ab imperitis in eminentia fabulæ cerni non possunt... Ut quoniam multis apud eum poetam locis antiquorum opiniones de diis et sacrorum ceremoniis continentur, Theologus appellari debeat et Pontificii juris interpres (ibid., p. 233, 227).

2 Adeoque facile me proripiam ab impetu Lactantii declamatorio, qui laxatis habenis, in Virgilium invehitur, quod ille pius, ille integer, ac sanctus imperator Æneas humanas umbris victimas immolare non dubitet (ibid., p. 237).

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