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I. Epoque de Moïse.

1. Avec Moïse (1) commence la littérature hébraïque. Avant lui, il y avait évidemment des documents écrits dont il tira des matériaux pour l'histoire primitive, en particulier pour celle de son peuple. On trouve en effet dans ses œuvres beaucoup d'anciennes expressions, qui, au temps où il les recueillit, n'étaient plus usuelles, et que par suite il dut expliquer luimême (2). Il s'ensuit qu'à cette époque, il existait des documents écrits où la langue était arrivée à un état de développement qui la rendait propre à servir de langue littéraire dans le sens le plus étendu de ce mot. Ce développement avait pu, sans aucune difficulté, se produire en Egypte, où le peuple vivait à l'écart des Egyptiens (3) et ne pouvait subir l'influence d'une langue qu'il ne connaissait pas (4).

Moïse commence une époque littéraire toute nouvelle. Il établit une langue écrite différente de la langue vulgaire; il se sert souvent de la poésie dont il fait un des plus beaux ornements du culte dont il est le révélateur (5). Le Pentateuque, à cause de cela, contient plusieurs modèles de style différents, qui plus tard furent étudiés et imités dans les diverses branches de la littérature.

Le Pentateuque, malgré ces imitations, a cependant un style tout spécial. Ce style est moins apparent, cela va de soi, dans les parties histori ques, où pourtant se manifeste une différence marquée, au point de vue de l'âge, avec les œuvres des derniers historiens, l'auteur des Paralipomènes, Esdras et Néhémias. Il n'en est pas de même de la forme dans laquelle les lois sont promulguées: on y remarque la plus grande clarté, l'exactitude la plus soigneuse, exprimées souvent par la répétition du même mot. employé pour préciser davantage. Les lois deviennent par là plus claires; la langue qui les enchâsse, pour ainsi dire, est si modelée que son expression rappelle souvent les Proverbes, et les imprime par suite plus profondément dans l'esprit et dans la mémoire (6).

A cause de cela, cette langue a atteint un caractère très défini, une précision et une correction frappantes, qui font songer, en lisant le Pentateuque, aux œuvres des jurisconsultes romains. Mais c'est surtout dans les parties poétiques du Pentateuque que les particularités du style se remarquent ; c'est là surtout que nous trouvons une élévation et une force d'expression merveilleuses. Rien de plus original que la forme employée : ce n'est que dans des poèmes comme celui de Débora qu'on pourra trou21 et suiv.), n'admet que deux périodes; mais il part plutôt d'un point de vue préconçu que d'une étude attentive de la langue. - Il va sans dire que toute l'école soi-disant critique n'admet pas ces divisions, puisqu'elle se refuse à admettre une littérature écrite antérieure au VIIIe siècle. V. Reuss, Geschichte... der Alt. Test., p. 472.

(1) Hævernick, Einleitung, § 31.

(2) Gen. XV, 2, 3; XXIV, 2; XVII, 5; la distinction entre 1 et 2, Gen. XVII, 15, 16, mots qui n'ont pas d'étymologie hébraïque. M. Fr. Delitzsch ne les explique pas.

(3) Gén. XLVI, 34; Exod. I, 13, 14.

(4) Ps. LXXX, 6.

(5) Exod. XV; Nombr. XX, 33, X, 35; Ps.. LXVII, 2; Deut. XII, 12, XVI, 11, 14, XXVI, 11, XXVII, 7.

(6) Cfr. Lèrit. XXII, 30-33.

ver un lyrisme semblable. C'est du profond sentiment des choses que nait la poésie du Pentateuque. Le parallélisme ne s'y montre guère encore (1). Même dans les plus légers détails, la langue du Pentateuque montre de remarquables particularités. Les imitations qu'en ont faites les écrivains du temps de la captivité et des époques postérieures, lorsque les circonstances amenaient à recourir plus souvent aux antiques trésors de la révélation, font voir la différence qui existe entre l'œuvre primitive et les essais qu'elle a inspirés. On peut regarder la langue du Pentateuque comme un trésor d'idées et d'expressions particulières, dont le caractère original ne peut échapper; ce qui lui appartient en propre doit être considéré comme ce qu'il y a de plus ancien dans le développement de la langue. C'est ce qu'ont reconnu de nos jours de savants grammairiens (2).

2. Quoiqu'on trouve généralement dans les livres de Moïse la langue du temps où vivait ce grand homme, il n'en est pas moins vrai que le livre de la Genèse contient un nombre considérable de mots et de phrases, qui, dès son époque, étaient tombés en désuétude et avaient été remplacés par d'autres. Quant au point de vue grammatical, il n'y a pas de différences sensibles entre la Genèse et les autres livres de Moïse (3).

Citons quelques principaux exemples: nnnas, sac, employé quinze fois dans la Genèse (4), et qui alterne quelquefois avec pw (5); nan, être bâti sur, c'est à dire avoir des enfants (6); 7, couper pour le sacrifice (7), et le substantifa (8); a, à l'hiphil, donner à boire (9), qui plus tard n'est plus employé que dans la poésie, au piel (10): 27, se multiplier (11); 777, faire un présent et le substantif 727 (12) qu'on ne trouve plus tard que comme nom propre (13); 7 (14) pour 7, qu'on trouve toujours ailleurs; pour an (15); (16), fois, à la place duquel on lit déjà dans les Nombres: (17); p (18), lier, et Tpy (19) marqueté; TMTMTM à l'hiphil (20), disputer; pys (21), voile de femme; mon m2, prison (2);

(1) Exod. XV, 1; Deut. XXXII, 10, etc.

(2) Ewald, Gram. der Hebr. Sprach. in ausf. Kürze, p. 3; Boettcher, Proben; ce der nier blâme avec force la nouvelle hypercritique qui a trop peu considéré le caractère linguis tique des quatre premiers livres de Moïse pour être apte à réfuter leur très haute antiquité. (3) D'après Keil, Einleitung, § 15. V. aussi Hævernick, Einleitung, § 31.

(4) Gen. XLIII-XLIV.

(5) XLII, 25, 27, 35.

(6) Gen. XVI, 2, XXX, 3.

(7) XV, 10.

(8) Ibid. On retrouve ce mot dans Jér. XXXIV, 18, 19, et poétiquement dans Cant. II, 17, au lieu de 12, vallée, II Rois, II, 29. Dans Lévit. I, 6, 12, VIII, 20; Exod. XXIX, 17, nn: est employé pour 102.

(9) Gen. XXIV, 17.

(10) Job, XXXIX, 24.

(11) Gen. XLVIII, 16.

(12) Gen. XXX, 20.

(13) I Par. II, 36, VII, 21, etc.

(14) Gen. XI, 30.

(15) Gen. III, 20, IV, 1.

(16) Gen. XXXI, 7, 41.

(17) Num. XIV, 22.

(18) Gen. XXII, 9.

(19) Gen. XXX, 35, 39, 40; XXXI, 8, 10, 12.

(20) Gen. XXVI, 20.

(21) Gen. XXIV, 65, XXXVIII, 14, 19.

(22) Gen. XXXIX, 20-23, XL, 3, 5.

pina muy (1), la stérilité de la terre; nop "non (2), archers; etc. Parmi les nombreux п уó de la Genèse, il y a sans doute beaucoup de mots qui appartiennent aussi à cette classe.

3. La distinction entre la langue du temps de Moïse et celle de l'époque de Moïse et de Salomon est bien plus grande encore et plus apparente. Dans la langue de Moïse parait un caractère archaïque qui manque dans la seconde. Ainsi :

1o Il y a dans le Pentateuque un grand nombre de mots, de formes de mots et de phrases qu'on ne trouve nulle part ailleurs.

Exemples Le pronom masculin Nest employé pour le féminin en cent quatre-vingt quinze endroits, tandis que le pronom féminin n'est employé que dans vingt et un (3). Il y a dans cette habitude de ne pas distinguer le genre, une preuve indiscutable de la haute ancienneté de la langue. L'emploi du pronom avec l'article préfixe л (4) en est une autre preuve. Dans tous les livres postérieurs au Pentateuque, on ne trouve plus que la forme abrégée 1 (5). La forme pour ne se lit que dans le Pentateuque (6). Une autre particularité de la langue des livres mosaïques est la formation de l'infinitif construit dans les verbes sans , comme ('asso) (7) et l'archaïque wy (8), 12v (9), î×7 (10). Parmi les formes archaïques, citons (11), non (12). On remarque aussi les formes abrégées de l'impératif : pow (13), 187p (14); la terminaison plurielle (oun) au parfait (15); le verbe (16); l'ancienne formation des noms avec (âm et om) au lieu de 7 (an et on), comme dans ho (17), (18), DE (19). Parmi les mots tombés en désuétude après le temps de Moïse, citons: 228, épi (20), le verbe N, haïr (21), 11, dommage (22), 27, la fête de la récolte des fruits (23); N. être réuni à ses peuples (mourir) (24), expression qu'on rencontre aussi avec le

(1) Gen. XLII, 9, 12.

(2) Gen. XXI, 16.

(3) Cela se rencontre si fréquemment qu'il est probable que 7, Deut. XXII, 17, a été introduit postérieurement dans le texte par des copistes.

(4) Gen. XXIV, 65, XXVXII, 19.

(5) Jug. VI, 20; I Rois (Sam.), XIX, 1, XVII, 26, IV Rois (II Rois), IV, 25; XXIII, 17; Dan. VIII, 16; Zach. II, 8, dans Ezechiel, XXXVI, 35, on trouve 1.

(6) Gen. XIX, 8, 25, XXVI, 3, 24; Lévit. XVIII, 27; Deut. IV, 42, VII, 22, XIX, 11. Elle est imitée I Paral. XX, 8, mais encore sans l'article.

(7) Gen. I, 20.

(8) Exod. XVIII, 18.

(9) Gen. XXXI, 28. On ne le trouve plus que dans la poésie, Ps. CI, 3; Prov. XXI, 3. (10) Gen. XLVIII, 11.

(11) Exod. XV, 5.

(12) Gen. XXX, 38.

(13) Gen. IV, 23

(14) Exod. II, 20.

(15) Deut. VIII, 3, 16. Poètiquement dans Is. XXVI, 16.

(16) Gen. III, 22, V, 5; Exod. I, 16; Nombr. XXI, 8.

(17) Gen. XXVIII, 12.

(18) Exod. VIII, 13, 14.

(19) Nombr. III, 49.

(20) Exod. IX, 31, Lév. II, 14.

(21) Exod. XXIII, 22. 17¶8, ennemi, se lit I Rois (Sam.), XVIII, 29.

(22) Gen.. XLII, 4, 38, XLIV, 29; Ex. XXI, 22, 23.

(23) Exod. XXIII, 16, XXXIV, 22. DN ne se trouve plus nulle part.

(24) Gen. XXV, 8, 17; XXXV, 29; XLIX, 33; Nombr. XX, 24, XXVII, 13, XXXI, 2; Deut. XXXII, 50.

nom au singulier (1), et dans l'abrégé 7 (2). Plus tard elle est remplacée par ap- px, être réuni aux sépulcres (3). et plus simplement par sy, dormir avec ses pères (4). Il faut dire que cette dernière formule se trouve aussi dans le Pentateuque (5), mais pour exprimer l'état posthume de la personne réunie à ses pères. y est employé dans le sens de compatriotes, sens qu'il n'a plus dans les livres plus récents. by 108 108, il lia un lien sur son âme (sur lui-même) (6), expression équivalente à se lier par un engagement religieux. 5rra, petit de la colombe (7); ¡na, ventre (8); 1977, mâle (9), et la combinaison de et de nap, mâle et femelle, qui ne se lit que dans la Genèse, le Lévitique et le Deutéronome (10); b, au lieu de (11); won, faux servant à la moisson (12); N, corbeille (13); DD, compter (14) et ses dérivés (15) et

(16), nombre; a, fournaise (17); D, voile (18); D, buisson (19); 2, entre les deux soirs (20); 772, gras (21); by, peler (22); 18, consanguin (23), et NW seul dans le même sens (24); aw, l'animal qui vient d'être mis bas (25). La phrase poétique couvrir l'œil (la surface) de la terre» (26), est aussi extrêmement ancienne.

2o On rencontre aussi dans le Pentateuque des mots, des formes de mots et des phrases dont on ne trouve dans les autres livres que des exemples fort rares et isolés.

Ainsi la forme pleine du suffixe du nom, 1 (éou) (27), ne se rencontre que trois fois dans tout le reste de l'Ancien Testament (28), à l'exception toutefois des noms finissant en (é bref). ♬ (0) au lieu de ↑ (0) est très fréquent dans le Pentateuque (29); plus tard, on ne le voit qu'une fois dans (1) Gen. XLIX, 29.

(2) Nombr. XX, 6.

(3) IV Rois, XXII, 20; II Paral. XXXIV, 28.

(4) III Rois, II, 10, XI, 43, etc.

(5) Gen. XLVII, 30; Deut. XXXI, 16.

(6) Nombr. XXX, 3-15.

(7) Gen. X. 5, 9; Deut. XXXII, 11.

(8) Gen. III, 14; Lev. XI, 42.

(9) Exod. XXIII, 17, XXXIV, 23; Deut. XVI, 16, XX, 13.

(10) Jérémie, XXXI 22 combine 11 avec

(11) Nombr. XVIII, 21, 31.

(12) Deut. XVI, 9, XXVIII, 26.

(13) Deut. XXVI, 2, 4, XXIII, 5, 17.

(14) Exod. XII, 4.

(15) Nombr. XXXI, 28, 37-41.

(16) Exod. XII, 4, Lévit. XXVII, 23.

(17) Gen. XIX, 28; Exod. IX, 8, 10, XIX, 18.

p

(18) Exod. XXXIV, 33, 34, 35. Ce mot est d'origine incertaine. D'après Arnold, ce serait un des mots arabes du Pentateuque. Gesenius (Lexicon, sub vo) n'a pas l'air d'accepter cette hypothèse, contraire à ce que nous avons vu plus haut, p. 215.

(19) Exod. III, 2-4; Deut. XXXIII, 16.

(20) Exod. XII, 6, XVI, 12, etc.

(21) Lévit. I, 8, 12, VIII, 20.

(22) Gen. XXX, 37, 38.

(23) Lév. XVIII, 6, XXV, 49.

(24) Lév. XVIII, 12, 13, XX, 19, XXI, 2; Nombr. XXVII, 11.

(25) Ex. XIII, 12; Deut. VII, 13, XXVIII, 4, 18, 51.

(26) Ex. X, 5, 15,; Nombr. XXII, 5, 11.

(27) Gen. I, 12, 21, 25, VI, 20, VII, 14; Lév. XI, 16, 22, 29; Deut. XIV, 15.

(28) Jug. XIX, 24; Job, XXV, 3; Néh. I, 13.

(29) Gen. IX, 21, XII, 8. XXXV, 21, XLIX, 11; Exod. XXII, 4, 26, XXXII, 17, Lév. XXIII, 13; Nombr. X, 36.

Josué (I), isolément dans les livres poétiques, et par affectation archaïque dans les écrits de l'exil, les Rois et Ezéchiel. na ws, le lit des torrents (2); N, le pays montagneux (3): 717 (4) ne se trouve ailleurs qu'une fois dans Isaïe (5); NED, pâturage (6), etc.

3o On y trouve encore des mots qui ont changé de signification dans une période intermédiaire, et qui ne reprennent leur sens primitif que lorsqu'ils sont employés par des écrivains de la captivité ou postérieurs à la captivité.

Exemples, chef de tribu iduméenne (7), ou chef de tribu en général (8); xx, séparer (9), suivi de , enlever (10), reparait dans Ezéchiel et dans l'Ecclésiaste (11); 1, coupe, goblet (12), calice de fleur (13); nha

, avoir des relations sexuelles (14), expression qu'on ne rencontre plus que dans Ezéchiel (15); y л, longueur du pays (distance) (16); N, employé fréquemment comme substantif, ne se trouve plus que dans les écrits les plus récents (17); 7, espèce, se lit vingt-neuf fois dans le Pentateuque; b, obscurité (18), se retrouve seulement dans Ezéchiel (19);

, proche voisin, qui est onze fois dans le Lévitique (20), ne reparaîtra que dans Zacharie (21); y, sans enfants (22), se trouve dans Jérémie (23); 17p, don offert à Dieu. très fréquent dans le Lévitique et les Nombres (24), ne sera pas employé avant Ezéchiel (25); il en est de même de п, odeur suave (26), de vw, bouc (27), qui se rencontre près de cinquante fois dans la Genèse, le Lévitique et les Nombres. Une autre expression ancienne très commune dans le Pentateuque est celle-ci : « il leva les yeux et vit ; c'est purement une image sensible qui reparaît dans Ezéchiel, Daniel et Zacharie; dans les autres livres elle est très rarement employée, et dans ce cas afin d'indiquer que la chose que l'on voit était inattendue (28).

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(16) Gen. XXXV, 16, XLVIII, 7, expression copiée II (IV) Rois, V, 10.

(17) Esth. I, 11; Neh. V, 11.

(18) Gen. XV, 17.

(19) Ezéch, XII, 6, 7, 12.

(20) Lévit. V, 20, XVIII, 20, XIX, 15, etc.

(21) Zach. XIII, 7.

(22) Gen. XV, 3, Lévit. XX, 20, 21.

(23) Jérém. XXII, 30.

(24) Lévit. II, 1, 4, 12, 13, etc.; Nomb. V, 15, VII, 17, etc.

(25) Ezéch. XX, 28, XL, 43.

(26) Gen. VIII, 21, etc.; Ezéch. VI, 13, XVI, 19, XX, 28, 41; Esdr. VI, 10; Dan. II, 46. (27) Lév. IV, 24, etc.; Ezéch. XLIII, 22, 25, XLV, 23; cfr. Dan. VIII, 21.

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