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ANALYSES ET COMPTES RENDUS

G. H. Schneider. DER THIERISCHE WILLE: systematische Darstellung and Erklärung der thierischen Trieber und deren Entstehung, Entwickelung und Verbreitung im Thierreiche als Grundlage zu einer vergleichenden Psychologie. (La volonté animale, etc.) In-12. xx-446 p. Leipzig, Abel (sans date), 1880.

G. H. Schneider. DER MENSCHliche Wille, vom Standpunkte der neueren Entwickelungstheorien (des Darwinismus.) La volonté humaine du point de vue de la théorie de l'évolution. In-8°, 498 p. Berlin, Dümmler. 1882.

Dans ces deux ouvrages, M. Schneider s'est proposé d'offrir au public un chapitre de psychologie comparée, en retraçant l'évolution de la volonté depuis les formes inférieures de l'animalité jusqu'à l'homme. I. Le premier volume qui a paru il y a déjà trois ans est consacré exclusivement aux animaux. Par ses études de naturaliste et notamment par un séjour, de six mois en Crète et de cinq ans à Naples, consacré à des recherches zoologiques, l'auteur s'était préparé de longue main à ce travail. La dédicace du livre à Hæckel et les emprunts faits à la psychologie de Wundt indiquent suffisamment dans quel esprit il est conçu.

Tous les actes instinctifs et les manifestations de la volonté consciente servent à la conservation de l'individu ou de l'espèce. Comme la conservation de l'individu n'est possible que s'il se nourrit et se défend et comme l'espèce ne se maintient que par l'amour et les soins donnés aux êtres procréés, il y a, en définitive, quatre principes fondamentaux auxquels se ramènent les manifestations multiples de la volonté animale et humaine et entre ces quatre tendances il y en a une que les trois autres supposent nécessairement l'instinct ou le besoin de la nutrition.

Le caractère général de la volonté animale est celui qui se rencontre dans tous les phénomènes de la vie : c'est la conformité au but (Zweckmässigkeit) Cette conformité au but, cette finalité, est pour l'auteur une propriété de l'organisation et rien de plus. Elle a la même étendue et les mêmes limites que le règne organique. Ce qui la détermine c'est la conservation de l'espèce. Imaginer un être organisé qui n'aurait pas

pour tendance fondamentale de se conserver et par là même de conserver son espèce, serait une contradiction dans les termes. Par suite, le problème de l'origine des premiers êtres organisés et celui de l'origine de la finalité sont identiques, et cette origine est, pour l'auteur, dans la possibilité des combinaisons indéfinies produites par la nature. << Les combinaisons organiques en général et, en particulier, les combinaisons organiques avec propriétés vitales ne sont qu'un cas spécial des cas infiniment divers de combinaisons chimiques (possibles); et, puisque nous nommons « conforme au but» la propriété des substances vivantes de produire par certains mouvements la propagation et la conservation de l'espèce, la conformité au but dans la nature n'est qu'un cas de tout ce qui est. (P. 37.) La vie une fois produite avec ses propriétés, l'évolution tout entière repose sur le principe de conservation (hérédité); l'essence de toute procréation étant la division de l'individu, l'adaptation et la sélection naturelle font le reste.

Si maintenant nous considérons les mouvements des êtres vivants, nous verrons que tous, qu'ils soient psychologiques ou purement physiologiques, n'ont qu'un but : la conservation de l'espèce. Les premiers ont pour caractère d'être déterminés par des phénomènes de conscience et ils se produisent sous les deux formes principales de l'attraction et de la répulsion à ce titre, « on peut les appeler des manifestations de la volonté au sens large du mot» (p. 54).

Il est bon d'abord de distinguer la volonté de l'instinct, terme dont on a tant abusé et auquel on a donné tant de significations différentes. «Par instinct, nous entendons la tendance à une action dont le but n'est pas conscient pour l'individu, mais qui malgré cela conduit à ce but. (P. 64.) On en peut donner comme exemple l'instinct de se nourrir inné chez tous les animaux et chez l'homme et qui se laisse toujours reconnaître, quelque modifié qu'il soit par l'éducation. La volonté diffère de l'instinct en ce qu'elle poursuit un but conscient, et chez l'homme, dans tous les cas, ce but est ce qui est lui le plus agréable relativement, c'est-à-dire ce qui paraît conforme à sa nature. Il ne peut donc être question de liberté absolue, mais simplement d'une liberté relative. En quoi consiste celle-ci?

M. Schneider montre très bien que l'homme, même dans les cas en apparence exceptionnels, choisit toujours ce qui lui agrée relativement (le martyr préférant la mort à l'apostasie). Mais, dans tout choix, il y a en jeu des motifs plus ou moins agréables et plus ou moins conformes au but. Jusqu'à quel point l'agréable et l'utile se confondent-ils ? Cela dépend de l'organisation l'individu et de son expérience. Si ces deux derniers éléments sont tels que l'agréable et l'utile coïncident le plus souvent, alors il choisira le meilleur, sa volonté sera relativement libre; et inversement. On doit reconnaître que chez l'homme, beaucoup d'idées nuisibles, non conformes au but, sont les plus agréables relativement; mais ce rapport contre nature est pour une bonne part l'œuvre de la civilisation qui a produit des besoins et des adapta

tions factices. Celui qui sacrifie le plaisir immédiat à un plaisir futur, plus conforme au but, est libre. Les natures ardentes, chez qui l'intensité des tendances conduit tout de suite à l'action, ont moins de liberté que ceux qui sont capables de réflexion. La plupart des cas de volonté non libre sont donc caractérisés par la victoire des tendances sensorielles sur les tendances idéales (p. 81-83) ou des représentations mal appropriées sur les représentations appropriées.

Ni sous la forme instinctive, ni sous la forme consciente, la volonté ne peut être imaginée sans le sentiment (Gefühl). Le sentiment, au sens le plus général, c'est-à-dire le sentir, est la base de toute vie psychique. Les opinions sur sa nature sont fort diverses. La conformité au but est le caractère qui nous importe le plus, au point de vue de phénomènes de la volonté. Tous les sentiments d'une manière ou de l'autre servent à la conservation de l'espèce et ont par conséquent une finalité. Le sentiment est-il une propriété de la matière en général et faut-il, avec certains auteurs, l'attribuer à chaque atome? M. Schneider s'interdit toute affirmation à ce sujet. Nous n'avons de preuves de son existence que chez les animaux; tenons-nous-en là. Quant à savoir comment une combinaison chimique peut sentir, c'est un problème aussi impénétrable que celui de l'essence de la matière, de la gravitation, de l'affinité chimique, etc. Il ne peut donc être question ici des causes dernières de la sensibilité; mais simplement des conditions dans lesquelles elle se produit. « La sensibilité a sa cause dans l'organisation, c'est-à-dire dans le sang, et, d'une manière plus générale, dans les processus vitaux de l'animal» (p. 129), et les diverses manières de sentir ont pour condition des organisations corporelles différentes. Le problème de l'origine de la sensibilité se réduit donc à celui de l'origine de la vie animale. De même que parmi les combinaisons chimiques infiniment diverses qui se sont produites sur la surface de la terre, il s'en est trouvé qui renformaient les conditions d'existence d'une substance vivante capable de reproduire d'autres substances vivantes; de même en un mot que la vie n'est qu'un cas spécial parmi une infinité de cas, de même la propriété de sentir n'est qu'un cas parmi des cas innombrables et il n'est pas plus difficile de concevoir des combinaisons sentantes issues de combinaisons non sentantes que des êtres vivants d'êtres non vivants.

L'auteur passe ensuite à la classification des impulsions (Triebe). Nous avons vu plus haut qu'il les ramène à quatre grandes manifestations. Chacune de ces quatre grandes catégories est divisée par lui régulièrement en trois groupes suivant que les impulsions ou tendances viennent des sensations, des perceptions ou des images et idées (Empfindungstriebe, Wahrnehmungstriebe, Vorstellungs-und Gedankenstriebe). Il présente ainsi dans son ensemble le tableau de la vie animale auquel est consacré le reste du livre.

Nous ne pouvons le suivre dans ce détail. Donnons seulement comme exemple de sa manière de procéder la classification des tendances de

la deuxième catégorie (tendances à se défendre) en abrégeant beaucoup : 1o tendances d'origine sensorielle l'animal resserre tout son corps, se tapit au contact, contracte quelques parties de son corps, etc.; 2o tendances d'origine perceptive: se cacher en apercevant l'ennemi, s'enfuir dans quelque lieu convenable, plonger sous l'eau, effrayer son adversaire par des changements dans la forme de son corps, etc.; 3o tendances dues à des images ou à des idées fuir sa cachette, y revenir, construire des habitations ou des travaux de défense, appeler au secours, chercher de l'appui près d'autres animaux, etc.

L'un des mérite de ce livre, qui nécessairement échappe à l'analyse, c'est l'abondance des faits et des observations. On a beaucoup écrit sur la psychologie animale, mais sans distinguer toujours avec une précision suffisante les formes de l'activité mentale qui sont en jeu, sans apporter une critique rigoureuse et sans s'élever assez au-dessus des apparences. M. Schneider nous montre au contraire, par des exemples bien choisis, comment des actions qui paraissent semblables doivent, d'après une interprétation exacte, être rapportées à des formes psychiques différentes, les unes à la simple sensation, les autres à une certaine réflexion. Ajoutons que s'en tenant à un seul aspect de la vie psychique chez les animaux, le plus facilement observable, les actes, - il a pu en donner un groupement systématique, à la fois clair et compréhensif.

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II. Le livre sur la Volonté humaine, plus volumineux que le précédent est aussi d'une plus grande importance par sa valeur psychologique. L'auteur y parait plus maître de son sujet, entre davantage dans les questions difficiles et, reprenant les doctrines déjà exposées par lui, les complète et les, fortifie. Ce livre aurait gagné pourtant à être plus court; on y trouve des longueurs. Divers points, intéressants en euxmêmes, mais traités hors de propos, interrompent la marche de l'exposition. Il en est de même pour la critique de certaines théories sur la volonté (Schopenhauer, Hartmann, Horwicz, etc.). Enfin l'auteur n'a pas résisté à l'attrait de traiter longuement certaines questions de morale et même de pédagogie qui sont plutôt une suite qu'une partie intégrante de son sujet. Mais, tel qu'il est, ce livre représente un apport considérable à la doctrine de l'évolution appliquée à une partie de la psychologie. C'est, à ma connaissance, la seule monographie qui existe sur la psychologie de la volonté, étudiée de ce point de vue. Aussi l'ensemble des questions traitées pourra-t-il dérouter plus d'un lecteur. Certes, aucune psychologie, si spiritualiste qu'elle soit, n'a complètement séparé la volonté des autres formes de l'activité humaine; mais la tendance à la placer dans un monde à part, à l'isoler en fait et même en droit est manifeste. Il est évident, au contraire, que, pour l'évolutioniste, la volonté ne peut être que la forme supérieure de l'activité, la dernière étape d'un mouvement ascendant, mais qui suppose toutes les autres. Il est donc bien naturel

que, avant d'arriver à la volonté au sens étroit», qui ne tient dans ce livre qu'un chapitre, l'auteur nous fasse parcourir tous les stades antérieurs.

L'ouvrage se divise en quatre parties d'une importance très inégale. La première est consacrée aux généralités » tout d'abord à la distinction entre les mouvements psychiques et ceux qui sont purement physiologiques. Les premiers sont toujours accompagnés d'états de conscience. Les antécédents psychiques les plus élémentaires des mouvements sont des impressions dues au contact immédiat de l'organisme avec les objets extérieurs. Ces états élémentaires sont encore à l'état d'indifférenciation, c'est-à-dire que l'élément cognitif et l'élément affectif, l'acte de discernement le plus simple et l'état de plaisir ou de peine ne sont pas encore distincts l'un de l'autre. Au reste, il est extrêmement difficile de tracer une ligne de démarcation nette entre les mouvements psychiques et les mouvements purement physiques.

Le chapitre qui suit, consacré aux mouvements réflexes, soumet ce phénomène à une étude critique approfondie. Dès qu'on dépasse la pure description de son mécanisme, le sens attaché au mot réflexe varie suivant les auteurs; les uns l'étendent, d'autres le restreignent outre mesure et, en tout cas, ne distinguent pas assez l'élément psychique qui s'y ajoute. Pour M. Schneider, le réflexe peut avoir tous les degrés possibles; être même purement physique, en sorte que l'on peut établir la progression suivante: «Deux phénomènes mécaniques qui ont entre eux un rapport de causalité forment un réflexe mécanique (ainsi une réaction chimique peut s'appeler un réflexe chimique). Deux phénomènes physiologiques qui ont un rapport de causalité forment un réflexe physiologique, et deux phénomènes psychiques qui ont un rapport de causalité constituent un réflexe psychique. Plus explicitement: Les réflexes physiologiques sont des phénomènes de mouvement d'espèce matérielle qui sont causés dans un organisme vivant par des excitations particulières et ont leurs causes logiques. Les réflexes psychiques au contraire sont ceux qui sont causés par des excitations dues à des phénomènes de conscience et ont leurs causes dans les propriétés psychiques de l'organisme.» (P. 25, 26.)

L'auteur étudie ensuite le but des actions volontaires chez l'homme. Revenant à la thèse déjà soutenue dans La Volonté animale, mais qu'il affirme cette fois avec plus de force, il place ce but uniquement dans la conservation de l'espèce. Dans quelques pages pleines de mouvement, il s'efforce de montrer que toutes les préoccupations de l'homme adulte, la fondation d'une famille, le soin des enfants, le sacrifice pour l'Etat, la poursuite de la gloire dans les sciences ou dans les lettres, la recherche du bonheur éternel promis par les religions, fournissent autant de preuves que le but suprême pour l'individu, c'est la conservation de son espèce.

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