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Au lieu de vous payer le prix du cheval que j'ai acheté de vous, je l'impute sur la somme que vous deviez à mon frère, et nous nou trouvons l'un et l'autre quittes, par suite de la compensation.

En admettant la compensation, la loi exige plusieurs conditions. Il faut : 1o que l'objet de l'une et de l'autre dette soit de la même espèce; 2o qu'elles soient liquides, c'est-à-dire claires et constantes. Une dette est liquide, dit Pothier, quand il est constant qu'il est dû, et combien il est dû. Une prétention douteuse, une dette incertaine, ne peut être l'objet d'une compensation. 3o Que les dettes soient également exigibles: «Quod in diem debetur, non " compensabitur antequam dies veniat (1). » 4° Que la dette ou la créance à compenser soit due par la même ou à la même personne qui oppose ou à qui la compensation est opposée. Ainsi, la compensation de ce que je dois à mon créancier ne peut se faire de plein droit avec ce qu'il doit à mes enfants, aux mineurs dont je suis le tuteur, à ceux dont j'administre les biens. Je ne puis non plus opposer en compensation à mon créancier ce que me doivent ses enfants, son père, sa mère, sa femme séparée de biens, etc. (2).

La compensation a lieu, quelles que soient les causes de l'une ou de l'autre des deux dettes, excepté dans le cas, 1o de la demande en restitution d'une chose dont le propriétaire a été injustement dépouillé; 2o de la demande en restitution d'un dépôt et du prêt à usage; 3o d'une dette qui a pour cause des aliments déclarés insaisissables (3).

777. Outre cette compensation, qui peut se faire même légalement, il en est une autre appelée compensation secrète; c'est celle qui ne se fait secrètement que parce que, n'ayant pour elle aucun titre extérieur, aucune preuve, elle ne peut invoquer le secours de la loi. Elle consiste à prendre l'équivalent de ce qu'on nous a pris, ou de ce qu'on nous doit, à raison du tort qu'on nous a fait. Il serait dangereux de conseiller la compensation secrète; mais on ne peut la condamner comme contraire à la justice, lorsqu'elle réunit certaines conditions. Ce n'est pas faire tort à un débiteur que de prendre l'équivalent de ce qu'il nous doit, en le dispensant de la restitution. Les conditions requises pour que la compensation soit légitime au for intérieur sont: 1° que le débiteur ait refusé, malgré nos réclamations, de nous rendre ce qu'il nous doit; 2° que la chose qui est l'objet de la compensation appartienne

(1) L. 7. ff. de Compensat. - (2) Cod. civ. art. 1289 et suiv. — (3) Ibidem.

art. 1293 et sniv.

réellement au débiteur; autrement ce serait un vol; 3° qu'on ne prenne pas plus qu'il n'est dù; l'excédant serait une injustice; 4° que la dette, comme l'enseignent communément les théologiens, soit certaine et pour le droit et pour le fait. Dans le doute, on regarde généralement la compensation comme injuste, parce qu'alors `la condition du possesseur doit avoir la préférence : « In dubio melior est conditio possidentis. »

778. 5° Par la confusion. Lorsque les qualités de créancier et de débiteur se réunissent dans la même personne, il se fait une confusion de droits qui éteint les deux créances : ce qui arrive, par exemple, lorsque le débiteur devient héritier de son créancier, et réciproquement lorsque le créancier devient héritier du débiteur. La confusion qui s'opère dans la personne du débiteur principal profite à ses cautions; mais celle qui s'opère dans la personne de la caution n'entraîne point l'extinction de l'obligation principale (1).

779. 6° Par la perte de la chose due. Lorsque le corps certain et déterminé qui était l'objet de l'obligation vient à périr, est mis hors du commerce, ou se perd de manière qu'on en ignore absolument l'existence, l'obligation est éteinte si la chose a péri, ou a été perdue sans la faute du débiteur et avant qu'il fût en demeure. Et lors même que le débiteur est en demeure, s'il ne s'est pas chargé par la convention des cas fortuits, l'obligation est éteinte dans le cas où la chose fût également périe chez le créancier, si elle lui eût été livrée. Mais quoiqu'il n'y ait ni faute ni retard de la part du débiteur, l'équité exige que, s'il y a quelques droits ou actions en indemnité à exercer relativement à la perte de la chose, il soit tenu d'en faire la cession à son créancier (2).

780. 7° Par la nullité ou la rescision. Quand un contrat est annulé ou rescindé par les tribunaux, conformément aux principes du droit, il n'oblige plus, du moins civilement (3). Les principales causes de nullité ou de rescision sont : l'erreur, la violence, le dol, la lésion, le défaut d'objet, le défaut de cause, une cause fausse, une cause illicite, le défaut d'autorisation pour une femme mariée, la minorité, l'interdiction, et le défaut des formalités requises pour la validité de l'acte.

Dans tous les cas où l'action en nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi parti

(1) Cod. civ. art. 1300 et suiv. —(2) Ibidem. art. 1302 et suiv. — (3) lbidem

art. 1304.

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culière, cette action dure dix ans. Ce temps ne court, dans le cas de la violence, que du jour où elle a cessé; dans le cas d'erreur ou de dol, du jour où ils ont été découverts; pour les actes passés par les femmes mariées non autorisées, du jour de la dissolution du mariage; à l'égard des actes faits par les interdits, du jour où l'interdiction est levée; et à l'égard des mineurs, du jour où ils ont atteint la majorité (1).

CHAPITRE IX.

De la Promesse.

781. Après avoir traité des contrats en général, nous allons parler des contrats en particulier, insistant davantage sur ceux qui ont un rapport plus direct avec la théologie morale. Nous commencerons par ce qui regarde la promesse.

La promesse est un contrat par lequel une personne s'oblige gra. tuitement à donner ou à faire une chose en faveur d'une autre personne. Mais une promesse ne devient parfaite et obligatoire que par l'acceptation de la personne en faveur de laquelle elle a été faite. Il ne faut pas confondre une promesse proprement dite avec ces protestations vagues et indéterminées par lesquelles une personne met ses biens, tout ce qu'elle possède, à la disposition d'une autre. Pour qu'il y ait promesse et obligation, il faut qu'il paraisse clairement, par les termes et la manière dont on s'exprime, cu égard surtout aux circonstances, que celui qui promet a l'intention de s'obliger; de sorte que celui à qui l'on fait la promesse puisse prudemment y compter comme sur un engagement, et agir en conséquence; sans cela ce n'est plus qu'un simple discours, qu'un témoignage d'intérêt, qu'une résolution, qu'un projet, propositum, qui ne renferme pas d'obligation stricte.

782. Une vraie promesse étant une fois acceptée, si d'ailleurs elle réunit toutes les conditions requises pour la validité d'un contrat, devient obligatoire; et cette obligation est plus ou moins grave, suivant l'intention de celui qui l'a faite, et le plus ou moins

(1) Cod. civ. art. 1304

d'importance de la chose qui en est l'objet. Nous disons suivan l'intention; car la promesse est une loi particulière que chacun se fait, et qui n'a de force que celle qu'on veut bien lui donner. Si done on veut contracter un engagement de justice, il est sans difficulté que la promesse produit cette espèce d'obligation dès qu'elle est suivie de l'acceptation. Mais si on n'a pas voulu prendre un engagement aussi strict, l'obligation n'est point une obligation parfaite et rigoureuse, une obligation de justice, mais seulement une obligation d'honnêteté morale; comme aussi l'obligation ne sera que légère, sub levi, même en matière grave, si on n'a pas eu l'intention de s'obliger sub gravi.

783. Mais comment juger de l'intention de celui qui fait une promesse, lorsqu'il ne s'exprime pas clairement à cet égard? Nous l'avons dit: on peut en juger par les circonstances. Ainsi, quand on rédige une promesse par lettre, qu'on prend part à une souscription en donnant sa signature, qu'on a recours à des témoins, ou qu'on confirme sa parole par écrit, ces formalités annoncent une obligation parfaite, stricte, une obligation de justice, plus ou moins grave, suivant la nature des choses qu'on promet. Si, au contraire, la promesse n'est que verbale, si elle se fait comme en passant, si elle n'est point confirmée par serment, ni revêtue d'aucune des circonstances qui peuvent lui donner de la gravité, il ne paraît pas que celui qui l'a faite ait eu l'intention de se lier par une obligation de justice (1). Au reste, dans le doute, au sujet de l'obligation d'une promesse, on doit se prononcer en faveur de celui qui en est l'auteur: « Cæterum, in dubio, dit saint Alphonse de Li« guori, an quis voluerit se obligare ex justitia, vel ex fidelitate, aan graviter vel leviter, probabilissimum mihi dicendum videtur « eum non esse obligatum nisi sub levi (2). » Nous ajouterons que, pour qu'il y ait péché mortel dans la violation d'une promesse, même strictement obligatoire, il faut une matière notablement plus considérable que pour un vol mortel (3).

784. L'obligation contractée par une promesse cesse par le changement qui survient, soit dans l'état des choses, soit dans la position des personnes, lorsque ce changement est tel que, s'il eût été prévu, il eût empêché de faire cette promesse. Par exemple, si on ne peut faire la chose promise sans faire tort au prochain, ou sans

(1) Conférences d'Angers, sur les Contrats, conf, 1. n° 720. Voyez Collet, de Promissione, art. 3. Mgr Bouvier, etc.

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· (3) S. Alphonse, ibidem;

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souffrir soi-même un dommage considérable, ou si la chose a été prohibée depuis par une loi, ou si elle est devenue moralement impossible ou inutile à celui à qui elle a été promise, alors la promesse n'oblige plus en conscience. Il en est de même pour le cas où la cause principale et déterminante, pour laquelle on a promis, vient à cesser : « Si non facit quod promisit, dit saint Thomas, tunc videtur infideliter agerc per quod animum mutat. Potest tamen « excusare ex duobus : uno modo, si promisit quod manifeste est illicitum; alio modo, si sunt mutatæ conditiones personarum et negotiorum. Ad hoc enim quod homo teneatur facere quod promisit, requiritur quod omnia immutata permaneant (1). » Dans les promesses gratuites qu'on fait à quelqu'un, tout est favorable du côté de celui qui veut les faire: elles ont toujours cette condition sous-entendue, que les choses demeureront dans le même état. Ainsi, lorsque, après avoir promis une somme d'argent à quelqu'un, on tombe soi-même dans la pauvreté; ou si on ne la lui a promise qu'à raison du besoin où il était, et qu'une succession inattendue a fait disparaître; ou à titre d'amitié, dont il rompt le premier les nœuds par une ingratitude manifeste : dans ces différents cas, il y a lieu de se refuser à l'exécution de sa promesse. De même, on a promis son cheval à quelqu'un pour faire un voyage; ce projet d voyage est rompu : la promesse tombe d'elle-même. On avait promis une chose pour être employée à un usage saint, honnête; on apprend que c'est à mauvaise intention qu'elle a été demandée, et qu'on se propose d'en faire un usage tout opposé : on n'est plus tenu d'accomplir une semblable promesse.

785. Il en est de la promesse comme de toute autre convention, elle doit être licite dans son objet : toute promesse contraire aux bonnes mœurs est nulle, et ne peut produire aucun effet. Concluez de là que celui qui a promis une somme d'argent ou autre chose pour porter au crime ou à une chose défendue par les lois divines ou humaines, n'a contracté, ni devant Dieu ni devant les hommes, ni avant ni après le crime commis, aucune obligation de payer l'argent ou de faire la chose promise. En promettant quelque chose pour récompense du crime, on pèche; et l'on commet un nouveau péché, ou l'on favorise plus ou moins indirectement le désordre, en exécutant la promesse (2).

(1) Sum. part. 2. 2. quæst. 110. art. 3. — Conférences d'Angers, sur les Con trals, conf. I. · (2) Ibidem, quest. 5. — Voyez, ci-dessus, le n° 753.

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