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la détraction? S'il s'agit d'une simple médisance, il est prudent de ne point faire de réparation, dans la crainte de renouveler les mauvaises impressions qui sont peut-être effacées : nous exceptons le cas où il y aurait un péril évident que d'autres causes ne fissent revivre la diffamation. Mais s'il s'agit d'une calomnie, on doit la réparer; à moins que, tout considéré, l'on n'ait lieu de craindre qu'une rétractation ne soit plus nuisible qu'utile à celui qui a été calomnié. Règle générale dans le doute si la détraction est oublice, chacun doit faire ce qu'il voudrait qu'on fit pour lui-même, s'il avait été victime de la médisance ou de la calomnie (1).

Il faut remarquer que celui qui est dispensé de réparer la diffamation causée par la détraction, n'est pas pour cela dispensé de réparer le dommage temporel qui s'en est suivi. Mais celui qui ne peut rétablir la réputation de la personne qu'il a diffamée, est-il obligé de l'indemniser précisément pour la perte de son honneur et de sa réputation, en lui donnant de l'argent ? Saint Thomas et plusieurs docteurs croient qu'il y est tenu. « Si non possit famam restituere, debet ei aliter recompensare, sicut et in aliis dictum « est in pecunia (2). » D'autres docteurs pensent, au contraire, qu'il n'y est point obligé, se fondant sur ce que la réputation étant une chose d'un ordre supérieur, ne peut être compensée par une somme d'argent. Saint Alphonse se déclare pour ce sentiment, comme lui paraissant plus probable : « Secunda sententia probabilior negat, « quia justitia tantum obligat ad reddendum ablatum vel æquivalens, sed pecunia non est id quod per detractionem ablatum est, « nec æquivalens famæ ablatæ, cum fama sit ordinis superioris ad pecunias, et ideo quibuscumque pecuniis nunquam satisfieri potest (3). » On peut suivre ce sentiment dans la pratique. Cependant, si la personne diffamée est dans le besoin, il convient que le détracteur qui ne peut réparer la médisance lui offre quelques secours pécuniaires, ne fût-ce que comme un témoignage d'estime et de bienveillance, et comme moyen de réconciliation. Nous ajouterons qu'on serait obligé de payer la somme dont on serait convenu par accommodement, de même que l'amende à laquelle on aurait été condamné par le juge.

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(1) S. Alphonse de Liguori, lib. m. no 998. — Voyez aussi l'excellent ouvrage intitulé Examen raisonné sur les Commandements de Dieu, tome 1, ch. 8. (2) Sum. part. 2 2. quæst. 62. art. 2. — (3) Lib. I. n° 1000.

CHAPITRE V.

De la Contumélie.

1082. Par contumélie les théologiens entendent l'injure qu'on fait au prochain en sa présence par paroles ou par actions : c'est un mépris, un affront qui porte atteinte à son honneur. La contumélie peut être par elle-même, ainsi que le vol et la rapine, péché mortel et contre la charité et contre la justice : « Cum convicium seu « contumelia de sui ratione importet quamdam dehonorationem, « si intentio proferentis ad hoc feratur ut per verba quæ profert « honorem alterius auferat, hoc proprie et per se est dicere convi« cium vel contumeliam ; et hoc est peccatum mortale, non minus « quam furtum vel rapina; non enim homo minus amat suum « honorem quam rem possessam (1). » Cependant la contumélie peut devenir vénielle, soit pour cause de légèreté de matière, soit par défaut d'une pleine advertance ou d'un consentement parfait, soit à raison des circonstances. Car, pour juger de la gravité ou de la légèreté d'une injure, il ne faut pas seulement considérer en ellemême la chose injurieuse que l'on dit ou que l'on fait, mais encore la qualité de la personne qui est injuriée, ainsi que celle de la personne qui injurie. Plus la personne qui est blessée dans son honneur est au-dessus de celle qui lui manque, plus l'injure est grave.

On doit aussi, comme le dit saint Thomas, avoir égard à l'intention de celui qui profère des paroles injurieuses: « Si vero aliquis « verbum convicii vel contumeliæ alteri dixerit, non tamen animo «< dehonorandi, sed forte propter correctionem vel propter aliquid hujusmodi, non dicit convicium vel contumeliam formaliter et per se, sed per accidens et materialiter; inquantum scilicet dicit id quod potest esse convicium vel contumelia : unde hoc potest « esse quandoque peccatum veniale, quandoque autem absque omni « peccato. In quo tamen necessaria est discretio, ut moderate homo « talibus verbis utatur : quia posset esse ita grave convicium quod

(1) S. Thomas, Sum. part. 2. 2. quæst. 72. art. 2.

• per incautelam prolatum auferret honorem ejus contra quem ⚫ proferretur ; et tunc posset homo peccare mortaliter, etiam si non « intenderet dehonorationem alterius; sicut etiam si aliquis incaute « alium ex ludo percutiens graviter lædat, culpa non caret (1). › 1083. On se rend coupable tout à la fois d'injure et de médisance, en reprochant à quelqu'un ses fautes ou ses défauts occultes en présence d'autres personnes. C'est encore une espèce de contumélie de railler quelqu'un, de le tourner en dérision, de manière à l'offenser. Si l'offense est grave, la dérision peut être mortelle; si l'offense n'est que légère, l'injure n'est que vénielle. Si ce n'est qu'une simple raillerie qu'on se permet par manière de récréation, il n'y a pas de péché, à moins qu'on ne prévoie que celui qui en est l'objet en sera contristé. « Si aliquis non reformidet contristare « eum in quem profertur hujusmodi jocosum convicium dummodo « aliis risum excitet, hoc est vitiosum (2). ·

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Celui qui a fait une injure à quelqu'un doit la réparer le plus tôt possible. Si l'injure a été publique, la réparation doit l'être également. Quant à la manière de faire cette réparation, elle varie suivant le caractère et la position de la personne qui injurie ou qui est injuriée. Si celui qui a fait l'injure est le supérieur de la personne offensée, il doit lui donner des témoignages de sa bienveillance, des preuves d'une estime particulière; s'il est son égal, il doit lui témoigner du repentir, et lui faire des excuses ou toute autre démarche propre à opérer une réconciliation; s'il est inférieur, il demandera pardon à la personne injuriée, en faisant connaître ses senuments, autant que possible, à ceux qui ont été témoins de l'injure. On est dispensé de réparer une injure pour les mêmes causes qui dispensent de réparer la médisance et la calomnie (3).

1084. Nous ajouterons au chapitre de la contumélie les injures, les invectives et les sarcasmes que certains auteurs se permettent à l'égard de ceux qui ne partagent pas leurs opinions, jusqu'a censurer de leur autorité privée ou noter d'une manière odieuse des opinions que l'Église ne condamne point, qu'elle n'improuve point, mais qu'elle abandonne aux discussions de l'école, sans faire connaître sa pensée. Les Papes blâment sévèrement cette manière d'écrire ou de parler, soit dans les chaires de théologie, soit dans la chaire de vérité. Innocent XI défend expressément aux théologiens de censurer ou de noter , par aucun terme injurieux, les

(1) S. Thomas, Sum. part. 2. 2. quæst. 72. art. 2. — (2) Ibidem.— (3) Voyez le n° 1080.

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opinions controversées parmi les catholiques, jusqu'à ce que le saint-siége ait prononcé : « Ut ab injuriosis contentionibus docto«res seu scolastici aut alii quicumque in posterum se abstineant, « ut paci et charitati consulatur, idem sanctissimus, in virtutc « sanctæ obedientiæ eis præcipit, ut tam in libris imprimendis ac manuscriptis quam in thesibus, disputationibus ac prædicationibus, caveant ab omni censura et nota, necnon a quibuscumque conviciis, contra eas propositiones quæ adhuc inter catholicos hinc et inde controvertuntur, donec a sancta sede recognitæ sint, «<et super iisdem propositionibus judicium proferatur (1). » Benoft XIV déplore et réprouve ce genre de controverse, qui, au lieu de servir à l'éclaircissement de la vérité, ne sert le plus souvent qu'à faire triompher les hérétiques et à scandaliser les fidèles : "Utinam, s'écrie-t-il, in aspectum lucemque hominum libri hujus« modi in hac temporum licentia et pravitate non efferrerentur, in quibus dissidentes auctores mutuis se jurgiis conviciisque proscindunt, aliorum opiniones nondum ab Ecclesia damnatas censura perstringunt, adversariorum eorumque scholas aut cœtus sugillant, et pro ridiculis ducunt, magno bonorum scandalo, ⚫ hæreticorum vero contemptu qui digladiantibus inter se catholicis « seque mutuo lacerantibus plane triumphant (2). » Ce grand Pape loue saint Thomas d'avoir parlé des opinions des autres théologiens de manière à n'offenser personne, et d'avoir gardé la même modération envers les hérétiques, dont il se contente de réfuter les erreurs (3).

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(1) Décret du 2 mars 1679. - (2) Constitution du 8 juillet 1753. — (3) II a paru, l'année dernière, une petite brochure in-18 de 108 pages, intitulée Censure de vingt-deux propositions de morale corrompue, tirées des livres d'un auteur de nos jours, par M. l'abbé Laborde. Cet auteur de nos jours, que M. l'abbé n'a pas cru devoir nommer, est l'archevêque actuel de Reims. Nous ne censurerons ni cet ecclésiastique, ni même la censure qu'il a faite des vingtdeux propositions détachées qu'il a tirées des écrits que nous avons publiés en faveur de la doctrine de S. Alphonse de Liguori; mais il nous permettra de lui mettre sous les yeux le décret d'Innocent XI, et la constitution de Benoît XIV que nous venons de citer; de lui rappeler le décret du saint-siége qui déclare exempts de toute censure les ouvrages de S. Alphonse, et la bulle de canonisation qui en proclame solennellement l'orthodoxie. Nous lui conseillerons aussi de lire avec plus d'attention les livres dont il a cru devoir censurer un certain nombre de propositions, et, si ses occupations le lui permettent, d'étudier encore un peu la théologie morale.

CHAPITRE VI.

Du Secret.

1085. Une chose est secrète lorsqu'elle n'est connue que d'une, de deux ou trois personnes, ou du moins d'un si petit nombre de personnes qu'on ne peut la regarder comme notoire. On distingue le secret sacramentel, dont nous parlerons dans le traité de la pénitence; le secret naturel, qui a pour objet une chose cachée dont nous avons eu connaissance ou pour en avoir été témoins par hasard, ou pour l'avoir apprise par l'indiscrétion de celui qui la connaissait, ou pour l'avoir découverte nous-mêmes; le secret promis, qui nous oblige en vertu de la promesse que nous avons faite de le garder; et le secret confié, qui nous oblige à raison de la confidence qui nous en a été faite.

On pèche quand on viole un secret de propos délibéré, sans cause légitime, de quelque espèce que soit le secret. Si le secret est important, s'il résulte de sa violation un dommage considérable ou une injure grave pour la personne intéressée, la faute est mortelle, et entraîne l'obligation de réparer l'injure ou le tort qu'on a fait. Mais la violation du secret n'est que péché véniel : 1o si le secret n'est que d'une légère importance, ou lorsque de bonne foi on le croit tel, fût-il réellement important dans son objet. 2o Si on ne révèle la chose confiée qu'à une ou à deux personnes prudentes qui en garderont le secret, pourvu toutefois que ce ne soit pas à la personne à qui l'on tient spécialement que la chose demeure cachée. 3o Si la chose est déjà connue de plusieurs autres personnes, de sorte qu'on n'espère plus pouvoir la tenir secrète (1).

1086. Les personnes plus spécialement obligées au secret sont les médecins, les chirurgiens, les officiers de santé, les pharmaciens, les sages-femmes, et généralement toutes personnes dépositaires, par leur état ou leur profession, des secrets qu'on leur confie. Il leur est défendu, même par le Code pénal, de révéler ces secrets (2). Ce que nous disons des médecins s'applique aux avocats, aux casuistes, aux pasteurs, aux curés ou desservants, à tous ceux qui exercent le saint ministère, même hors du sacré tribunal de la pénitence: ils ne peuvent découvrir les secrets qu'on leur confie dans

(1) S. Alphonse de Liguori, lib. ut, no 971; de Lugo, Bonacina, Azor, etc. — (2) Code pénal, art. 378.

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