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Il y a plusieurs sortes de vertus; mais on les réduit toutes à quatre principales, qui sont, la prudence, la force, la tempérance et la justice: la prudence, qui nous fait connaître le bien et le mal; la force, qui nous fait pratiquer l'un; la tempérance, qui nous fait abstenir de l'autre; et la justice, qui nous fait rendre à chacun ce qui lui est dû.

La prudence comprend la science et la prévoyance; la force, l'énergie et le courage; la tempérance, la sobriété et la continence; la justice, l'équité et la probité.

L'équité est la vertu nécessaire à l'homme public, appelé à prononcer sur les droits d'autrui; et la probité, la vertu nécessaire à l'homme privé, appelé à prononcer sur les siens.

On peut également réduire les différents vices à quatre principaux, qui sont en opposition avec les quatre principales vertus. Ces vices sont l'ignorance, la paresse, l'intempérance et l'injustice.

L'ignorance comprend l'aveuglement et l'imprévoyance; la paresse, l'inertie et la lâcheté; l'intempérance, l'avidité et la convoitise; l'injustice, l'iniquité et l'improbité.

L'iniquité est une folie, puisque c'est une violation gratuite des droits d'autrui, sans aucun avantage pour nous-mêmes; et l'improbité, qui est une violation intéressée des droits d'autrui à

notre propre avantage, est une sottise, parce qu'en nuisant aux autres, nous les portons à nous nuire à nous-mêmes, et que nous nous nuisons ainsi par contre-coup.

Les causes qui nous portent à la vertu sont les inspirations de notre raison, et celles qui nous portent au vice sont les affections de notre corps ou nos passions; d'où il suit que la vertu est dans l'empire de la raison sur les passions.

Aristote place chaque vertu entre deux vices ou deux excès contraires, comme la prudence entre l'aveuglement et la présomption, le courage entre la pusillanimité et l'audace, la tempérance entre l'abstinence et l'avidité, la libéralité entre l'avarice et la prodigalité, la modestie entre l'humilité et l'orgueil; en sorte que chaque vertų se trouve au milieu de deux vices.

On peut aussi diviser les biens et les maux en deux espèces, en bien et mal physique, en bien et mal moral. Le bien ou le mal physique est celui qui donne du plaisir ou de la douleur au corps, et le bien ou le mal moral est celui qui donne du contentement ou de la peine à l'ame. Le bonheur est la continuité du bien, et le malheur la continuité du mal. La vertu produit donc le bonheur, et le vice le malheur, comme la cause produit son effet; et quand cet effet n'est pas produit, c'est uniquement à cause des acci

dents auxquels notre corps est exposé par son contact avec d'autres corps, et qui ne dépendent pas de notre volonté. Mais, dès que ces accidents n'existent plus, le bonheur est l'effet nécessaire de la vertu, comme la lumière est l'effet nécessaire du soleil. Le malheur ne vient donc jamais que de nous-mêmes, et l'homme n'est malheureux que par sa propre faute, puisqu'il peut avec sa raison éviter la plupart des maux auxquels il est exposé, et adoucir par sa résignation ceux qu'il ne peut éviter.

L'homme doit donc se résigner aux maux qu'il ne peut éviter, et qui sont inséparables de la condition humaine, parce que ces maux ne sont que passagers, et que Dieu, qui est essentiellement juste, lui tiendra compte de sa résignation; mais cette résignation ne doit point être, comme celle des animaux, une résignation stupide, et l'homme doit employer, pour adoucir son sort, tous les moyens que lui indique la raison.

C'est dans l'invention et l'usage de ces moyens que consistent tous les arts humains. Le premier de ces arts est celui qui apprend aux hommes à mettre tous leurs moyens, en commun, ou l'art social.

L'art social est si nécessaire aux hommes, que sans cet art ils ne pourraient pas vaincre la plupart des maux qui sont attachés à la condition

humaine, ni se conserver. Ils doivent donc vivre en société les uns avec les autres. Tout leur en fait un devoir, et leur faiblesse individuelle, et leurs penchants mutuels. L'attrait d'un sexe vers l'autre et le plaisir de se reproduire dans ses enfants, qui firent établir la famille, firent établir aussi la société, dont la famille est le premier élément. Mais l'homme, dans la famille, eut de nouveaux devoirs, fondés sur ses rapports avec les autres associés. Les devoirs de l'homme s'étendirent même de proche en proche par les rapports des différentes sociétés entre elles, et finirent par embrasser tout le genre humain. C'est ainsi que tous les hommes furent liés entre eux par la loi d'amour, comme tous les corps le sont par la loi de l'attraction.

Lorsque Dieu, dit Platon, eut créé les animaux qui peuplent la terre, il créa l'homme, le plus parfait de tous; mais, au lieu de lui donner la force en partage, il lui donna la raison. Animé de ce feu divin, l'homme fut le seul des êtres créés qui s'éleva par la pensée jusqu'à Dieu, et qui reconnut son créateur. Il se fit un langage pour lui exprimer son amour, se bâtit des maisons pour se défendre contre l'inclémence des éléments, et força la terre de le nourrir; mais en proie aux animaux, qui étaient plus forts que lui, il s'unit à d'autres hommes pour leur faire la

guerre. Les hommes ainsi réunis bâtirent des villes, et y vécurent des fruits de leurs travaux. Mais bientôt la discorde s'introduisit parmi eux, et au lieu de faire la guerre aux animaux, ils se la firent à eux-mêmes pour se ravir leurs biens. Alors, pour rétablir la paix entre eux, Dieu leur envoya la justice, qui rendit à chacun son bien, et qui garantit les droits de tous. De là l'origine des gouvernements, qui ne furent institués que pour garantir aux hommes leurs droits. La fin des gouvernements est donc la garantie des droits, la fin de la garantie des droits la garantie des devoirs ou la vertu, et la fin de la vertu le bonheur. L'homme n'a donc été créé, la famille formée, la société instituée que pour le bonheur. Telle est la destination de l'homme, et tel a été le but de la création, par laquelle Dieu a voulu en quelque sorte élever l'homme jusqu'à lui, et l'associer à sa propre félicité.

CHAPITRE II.

Des droits de l'homme, et des pouvoirs de la société.

La loi naturelle, en donnant à l'homme la conscience de ses devoirs, lui donna aussi celle de ses droits.

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