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leur pays, dépourvu de forteresses; tandis que les Athéniens, après avoir défendu le leur, pied à pied, eussent pu trouver un asile dans toutes leurs places fortes.

Mais ce qui surtout perdit ces deux cités, fut la même cause qui perdit toutes les autres cités de la Grèce, la corruption de leurs gouvernements et leurs funestes divisions. Elles ne surent jamais s'unir entre elles contre les Barbares. La fédération amphictyonique ne fut qu'une fédération imparfaite, parce qu'au lieu de règler et de garantir les intérêts communs de toute la Grèce, elle n'en régla et n'en garantit que le culte public; et la fédération achéenne ne fut qu'une fédération incomplète, parce qu'au lieu d'embrasser tous les états libres de la Grèce, elle n'embrassa que ceux du midi, et que la liberté, écrasée dans l'un, dut l'être successivement dans tous.

La Grèce périt dans sa lutte contre la Macédoine, non que cet état fùt mieux constitué que les autres, mais parce qu'il était plus peuplé et surtout plus riche, depuis que Philippe eut découvert les mines d'or du mont Pangée; et les Macédoniens eux-mêmes périrent dans leur lutte contre les Romains, parce qu'au lieu d'avoir les autres Grecs pour alliés, ils les eurent pour ennemis. La Grèce fut toujours vaincue dans sa lutte contre les Barbares, parce qu'elle fut tou

jours désunie: vain exemple, donné aux peuples libres, et dont ils n'ont jamais su profiter, parce qu'ils sont presque toujours conduits plutôt par leurs passions que par leur raison.

CHAPITRE V.

Des arts d'Athènes et de sa grandeur.

TELLES furent les principales causes qui perdirent les deux plus célèbres cités de la Grèce, et, en particulier, la république d'Athènes. Mais s'il faut juger de cette république par les grandes choses qu'elle fit dans sa courte durée, on peut juger de ce qu'elle eût fait, et quel essor elle eût donné à la civilisation humaine, si elle avait eu une durée plus longue.

Son territoire était à peine de quatre-vingts lieues carrées de superficie, et il était pierreux, inégal et aride; mais il était cultivé avec tant d'art, que l'on en évaluait annuellement le revenu, sans y comprendre celui des terres réservées aux dieux, à six mille talents ou à trente-deux millions quatre cent mille francs, en évaluant le talent à cinq mille,quatre cents francs. L'industrie manu

facturière, en façonnant les produits de la terre, et le commerce, en les exportant aux lieux où ils étaient le plus recherchés, en avaient, en quelque sorte, doublé la valeur; et on estimait le revenu général de l'Attique à environ douze mille talents, sur lesquels le gouvernement, en prélevant chaque année un centième ou un cinquantième suivant les besoins de la cité, et quelquefois même jusqu'à un vingtième dans les besoins pressants, pouvait prélever jusqu'à six cents

talents.

Mais ce revenu n'était pas le seul revenu du gouvernement; il était encore augmenté par celui qui provenait des tributs des pays alliés ou conquis, de la capitation imposée aux esclaves, aux étrangers et aux courtisanes, des taxes sur les importations étrangères, sur les salines du Pirée et sur les mines du Laurium; et l'on portait le revenu du gouvernement en temps de guerre jusqu'à douze cents talents ou à six millions cinq cent mille francs. C'est avec ce revenu qu'Athènes arma pendant la guerre du Péloponèse, trois cents triremes et quatorze mille hommes de troupes nationales, savoir: huit mille hoplites, quatre mille peltastes, mille cavaliers et autant d'archers, et qu'elle soudoya quatorze mille hommes de troupes étrangères; et c'est avec une armée et une flotte aussi formidables qu'elle soumit toutes

les îles de la mer Égée, ainsi que toutes les côtes de la Thrace, de l'Hellespont et de l'Asie mineure, et qu'elle osa porter la guerre jusqu'en Sicile pour soumettre de là tout le pourtour occidental de la Méditerranée, comme elle en avait déja soumis tout le pourtour oriental.

Mais l'art de la guerre ne fut pas le seul qui concourut à la grandeur d'Athènes, tous les autres arts y concoururent à l'envi.

L'agriculture ne se borna pas à multiplier les produits de la terre, elle fouilla jusque dans ses entrailles pour en extraire le marbre du mont Pentélique et l'argent du mont Laurium. Les manufactures donnèrent à tous ces produits les formes les plus variées et les plus attrayantes, et le commerce les échangea avec les produits de tous les autres pays. Toutes les richesses de la terre affluèrent à Athènes, attirées par l'étendue de son marché, et surtout par l'argent du Laurium, qui était la marchandise la plus propre à étre échangée contre les autres et à les faire toutes circuler. Cette ville devint alors l'entrepôt de toute la Méditerranée. La Macédoine lui envoyait son or, la Thrace ses troupeaux et ses esclaves, la Tauride ses blés, l'Asie mineure son cuivre et ses laines, Milet ses draps moelleux et légers, Sardes ses brillants tapis, la Syrie ses bois, Tyr sa pourpre, l'Arabie ses drogues et ses par

fums, l'Égypte ses grains et ses dattes, toutes les iles de la mer Égée leurs vins et leurs fruits; et elle exportait dans tous ces pays son huile, son miel, ses pâtes parfumées, ses meubles élégants, ses poteries diaprées, ses vases d'or et d'argent, ses marbres, ses bronzes, ses statues et ses tableaux.

Un commerce aussi étendu avait tellement multiplié la population dans l'Attique, que l'on y comptait jusqu'à cinq cent mille habitants, savoir vingt mille citoyens, et, en donnant à chaque citoyen une femme et trois enfants, cent mille hommes libres et quatre cent mille esclaves. Athènes seule avec ses ports renfermait cent mille habitants, et les quatre cent mille autres étaient dispersés dans la campagne.

Située au centre de l'Attique, au pied d'une colline couronnée par une citadelle où l'on voyait les plus beaux édifices de la Grèce, Athènes était fermée par une enceinte circulaire qui avait soixante stades de tour et d'où partaient, en se dirigeant vers l'occident, deux murs parallèles, dont l'un, qui avait quarante stades de long, allait aboutir au port Pirée, et l'autre, qui en avait trente-cinq, au port Phalère. Ces deux ports étaient séparés l'un de l'autre par la forteresse de Munychie, fermée elle-même le long du rivage, par un troisième mur de soixante stades de long,

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