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La Conférence de 1894 n'a été qu'une suite de la Conférence de 1893. Elle comprenait à peu près les mêmes déle. gués. Elle a soumis à une revision les textes adoptés en 1893 et abordé d'autres matières dont les plus importantes sont la séparation de corps et le divorce, la tutelle et la faillite. Le résultat des délibérations fut, comme en 1893, consigné dans un Protocole final.

Il n'y avait encore là que des matériaux pour l'œuvre projetée et on pouvait se demander de quelle façon ils seraient employés. Tous les gouvernements n'étaient pas également disposés à s'approprier les projets arrêtés par leurs délégués et il y avait même dans l'esprit de plusieurs d'entre ceux-ci incertitude sur le point de savoir si ces projets devaient être transformés en conventions internationales ou devaient servir à guider les législateurs respectifs qui voudraient édicter des dispositions sur les conflits de lois. On trouverait des traces. de cette incertitude dans les délibérations et même dans quelques textes.

Après la clôture de la deuxième Conférence, le gouvernement néerlandais eut à examiner la suite qu'il convenait de donner à ses travaux. Il résolut de détacher de l'ensemble des projets celui qui concernait la procédure civile et de proposer aux Puissances de conclure une Convention s'appropriant les règles adoptées par la Conférence. C'était très habile les dispositions du projet ne pouvaient soulever de graves objections, elles présentaient un véritable intérêt pratique et elles avaient été déjà l'objet d'assez nombreuses conventions particulières qui avaient frayé la voie à une convention générale. Dès novembre 1894, le gouvernement des Pays-Bas avait saisi les divers gouvernements de son projet. Une convention fut signée le 14 novembre 1896 entre huit des Puissances représentées aux Conférences; cette convention était acceptée par les autres à la fin de 1897 et elle entrait en vigueur le 25 mai 1899. Pour comprendre

ces retards, il faut se rendre compte de la nécessité qui existe en plusieurs pays, comme en France, de faire intervenir le parlement pour donner effet aux conventions de ce genre. C'était un résultat appréciable que d'être arrivé à établir pour quatorze États des règles communes concernant : 1o la communication d'actes judiciaires ou extrajudiciaires; 2° les commissions rogatoires; 3° la caution judicatum solvi; 4° l'assistance judiciaire; 5° la contrainte par corps. Je ne relèverai que ce dernier point qui a fait disparaître une mesure rigoureuse encore maintenue dans plusieurs États à l'égard des étrangers. C'est un correspondant de l'Académie, M. Legrand, qui eut l'honneur d'en proposer la suppression.

La Convention de 1896 n'est pas parfaite; des difficultés ont surgi dans son application, mais ces difficultés sont d'ordre trop technique pour qu'il y ait lieu de les aborder ici. Elles seront examinées dans une Conférence qui se réunira l'année prochaine. Le Gouvernement des Pays-Bas n'en était pas moins encouragé à persévérer dans son entreprise. Dès qu'il eut été assuré de l'adhésion des divers États à la Convention sur la Procédure, il songea à une œuvre autrement importante et difficile, la transformation en conventions des projets qui touchaient au fond du droit, au mariage, au divorce, à la séparation de corps, aux successions, à la tutelle des mineurs. Pour cela, une préparation spéciale était nécessaire et voici comment il y fut procédé. Il est utile de montrer quelle sérieuse élaboration a précédé la signature des conventions actuellement soumises à l'examen de plusieurs Parlements, spécialement du nôtre.

En février 1897, le Gouvernement des Pays-Bas institua, sous la présidence de M. Asser, une Commission royale chargée de préparer les Conférences ultérieures de droit interna-t tional privé. Cet exemple fut bientôt suivi en Belgique, en France, en Russie, où des commissions spéciales comprenant des hommes compétents à divers titres furent également

constituées. La Commission néerlandaise se mit sans retard à l'œuvre et adopta un projet de programme pour une troisième Conférence. Ce projet fut adressé aux divers Gouvernements avec prière de faire connaître leurs observations et amendements. Quand les réponses furent parvenues à La Haye, la Commission néerlandaise dressa un tableau systématique, indiquant sur chaque article du projet de programme le texte des propositions et des amendements. formulés par les différents Gouvernements. Ce tableau, accompagné du texte même des notes et rapports, fut, en mars 1900, communiqué à tous les Gouvernements qui avaient pris part aux Conférences de 1893 et 1894 (1). De cette façon, chaque Gouvernement connaissait à l'avance les vues des autres Gouvernements sur les projets qui devaient venir en discussion et pouvait munir ses délégués d'instructions précises; cela était indispensable, puisqu'il s'agissait cette fois d'arriver à une entente ferme sur des points d'une grande importance théorique et pratique. On ne peut qu'être reconnaissant à la Commission néerlandaise du grand labeur qu'elle s'est imposé pour arriver à rendre les délibérations le plus fructueuses possible.

La troisième Conférence se réunit le 29 mai 1900. Tous les États qui avaient pris part aux précédentes Conférences étaient également représentés, mais le personnel était un peu modifié. Sur 24 délégués, douze seulement avaient figuré aux Conférences antérieures. Les nouveaux membres ont eu, dans la mesure où j'ai pu m'en rendre compte, l'influence la plus heureuse en soumettant à une critique pénétrante les textes précédemment adoptés, en faisant apparaitre des difficultés d'interprétation auxquelles leurs devanciers n'avaient pas songé, parce que, comme il arrive souvent, ils avaient

(1) Documents relatifs à la troisième Conférence de La Haye pour le droit international privé, La Haye, imprimerie nationale, 1900 (fascicule in-fo de 184 p.).

eu en vue plutôt ce qu'ils voulaient dire que ce qu'ils disaient réellement. Cette fois, il n'y avait plus d'incertitude sur le caractère des projets arrêtés par la Conférence, c'étaient bien des projets de conventions soumis par les délégués à leurs Gouvernements respectifs. Il y en avait quatre distincts concernant 1° les conflits de lois en matière de mariage; 2° les conflits de lois et de juridictions en matière de divorce et de séparation de corps; 3° les conflits de lois et de juridictions relativement à la tutelle des mineurs; 4° les conflits de lois relativement aux successions, aux testaments et aux donations à cause de mort. Je mentionne pour mémoire que la Conférence émit en outre un vœu pour la transmission aux divers Gouvernements de rapports et d'avant-projets concernant d'autres matières qui avaient été l'objet de ses délibérations, mais dont le règlement ne pouvait être considéré encore comme définitif; il s'y ajoutait l'expression du désir que, pour la quatrième Conférence, on suivit le procédé si heureusement pratiqué pour la troisième.

Peu de mois après la clôture de la troisième Conférence, le Gouvernement néerlandais déclara accepter pour son compte les quatre projets de conventions et demanda aux autres Gouvernements s'ils étaient dans les mêmes dispositions. La Commission française de droit international privé chargea l'un de ses membres, particulièrement compétent, d'étudier les projets de La Haye, afin d'arrêter les résolutions à proposer au Gouvernement de la République. M. Lainé a fait des divers projets l'examen le plus approfondi; sa participation à la troisième Conférence lui permettait de se rendre un compte exact de ce qui s'y était passé et le temps écoulé depuis donnait le recul nécessaire pour en apprécier les résultats avec toute liberté d'esprit. Sur son rapport et après discussion, la Commission (1) conclut à l'unanimité qu'il y avait lieu de pro

(1) Elle était ainsi composée en 1900 MM. Louis Renault, ministre plénipotentiaire, président; La Borde, conseiller à la Cour de cassation;

poser au Gouvernement: 1° de donner son adhésion aux trois premiers projets; 2° d'ajourner au contraire l'adhésion au projet relatif aux successions. Bien que plusieurs Gouvernements fussent disposés à accepter même le quatrième projet, le Gouvernement néerlandais, tenant compte des objections présentées par la France, réserva ce projet pour le soumettre à une révision dans une quatrième Conférence.

Le 12 juin 1902, les représentants de l'Allemagne, de l'Autriche-Hongrie, de la Belgique, de l'Espagne, de la France, de l'Italie, du Luxembourg, de la Roumanie, de la Suède et de la Suisse, réunis dans la salle historique de la Trève, signaient les trois conventions sur le mariage, la séparation de corps et le divorce, la tutelle des mineurs. C'est une date importante dans l'histoire du droit privé et du droit international. Rien d'analogue n'avait encore été fait en Europe, c'est ce qui constituait l'intérêt et la difficulté de la tâche. Ce n'est pas une œuvre hâtive; c'est, au contraire, comme j'ai tâché de le montrer, la consécration d'efforts persévérants, le résultat de la collaboration d'hommes de nations et de professions très différentes, diplomates, administrateurs, magistrats, avocats ou professeurs. Je comprends parmi ces collaborateurs non seulement ceux qui ont effectivement pris part aux délibérations des Conférences internationales officielles, mais ceux qui, par leurs travaux, ont élucidé les problèmes à résoudre. Une place à part doit être faite à l'Institut de droit international (1) auquel M. Asser, alors son

de Boislisle, président de Chambre à la Cour d'appel de Paris; Ditte, directeur des Affaires civiles au Ministère de la Justice; Lainé, professeur de droit international privé à la Faculté de Paris. Depuis, M. Ditte, devenu président du Tribunal civil de la Seine, a continué de faire partie de la commission où est entré le nouveau directeur des Affaires civiles, M. Mercier.

(1) En 1888, à Lausanne, en 1891, à Hambourg, il adoptait un règlement international sur les conflits de lois en matière de mariage et de divorce et un règlement international sur la tutelle des mineurs.

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