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Mémoire sur Les Universités allemandes en 1838, d'après les souvenirs inédits de M. Dubois, de la Loire-Inférieure.

M. Luchaire communique à l'Académie, au nom de M. Gerspach, ancien administrateur de la Manufacture des Gobelins, une courte notice sur La Cité minuscule de Campione, située au bord du lac de Lugano et enclavée dans le territoire suisse.

M. Boutroux donne lecture d'un rapport destiné à l'Association internationale des Académies et concluant à la proposition suivante présentée par l'Académie des Sciences morales et politiques et l'Académie des Sciences de l'Institut de France, conjointement avec l'Académie royale des Sciences de Berlin, au sujet de la préparation d'une édition internationale des Euvres de Leibniz » :

« L'Association continue aux trois Académies la mission de pré« parer la publication d'une édition de Leibniz qu'elle leur avait <attribuée par sa résolution du 18 avril 1901, et les invite, en « particulier, à publier, d'ici à la prochaine Assemblée générale de « l'Association, le Catalogue critique des manuscrits de Leibniz « dont elles possèdent actuellement les matériaux. »

L'Académie approuve le rapport et la proposition qui seront imprimés et envoyés aux Académies faisant partie de l'Association.

Le Gérant responsable,

HENRY VERGÉ.

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Lue dans les Séances des 20 et 27 Février 1904

MESSIEURS,

Jean-Gaspard-Félix Laché Ravaisson est né le 23 octobre 1813 à Namur, alors ville française, chef-lieu du département de Sambre-et-Meuse. Son père, trésorier-payeur dans cette ville, était originaire du midi; Ravaisson est le nom d'une petite terre située aux environs de Caylus, non loin de Montauban. L'enfant avait un an à peine quand les événements de 1814 forcèrent sa famille à quitter Namur. Peu de temps après, il perdait son père. Sa première éducation fut surveillée par sa mère, et aussi par son oncle maternel, Gaspard-Théodore Mollien, dont il prit plus tard le nom. Dans une lettre datée de 1821, Mollien écrit de son petit neveu, alors âgé de huit ans: « Félix est un mathématicien complet, un antiquaire, un historien, tout enfin (1) ». Déjà se révélait chez l'enfant une qualité intel

(1) Nous empruntons ce détail, avec plusieurs autres, à la très intéressante notice que M. Louis Leger a lue à l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, le 14 juin 1901.

Nous devons divers renseignements biographiques à l'obligeance des deux fils de M. Ravaisson: M. Louis Ravaisson-Mollien, bibliothécaire à la Bibliothèque Mazarine, et M. Charles Ravaisson-Mollien, conservateur adjoint au Musée du Louvre.

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lectuelle à laquelle devaient s'en joindre beaucoup d'autres, la facilité.

Il fit ses études au collège Rollin. Nous aurions voulu l'y suivre de classe en classe, mais les archives du Collège n'ont rien conservé de cette période. Les palmarès nous apprennent toutefois que le jeune Ravaisson entra en 1825 dans la classe de sixième, qu'il quitta le collège en 1832, et qu'il fut, d'un bout à l'autre de ses études, un élève brillant. Il remporta plusieurs prix au concours général, notamment, en 1832, le prix d'honneur de philosophie. Son professeur de philosophie fut M. Poret, un maître distingué, disciple des philosophes écossais dont il traduisit certains ouvrages, fort apprécié de M. Cousin, qui le prit pour suppléant à la Sorbonne. M. Ravaisson resta toujours attaché à son ancien maître. Nous avons pu lire, pieusement conservées dans la famille de M. Poret, quelques-unes des dissertations que l'élève Ravaisson composa dans la classe de philosophie (1); nous avons eu communication, à la Sor bonne, de la dissertation sur « la méthode en philosophie qui obtint le prix d'honneur en 1832. Ce sont les travaux d'un écolier docile et intelligent, qui a suivi un cours bien fait. Ceux qui y chercheraient la marque propre de M. Ravaisson et les premiers indices d'une vocation philosophique naissante éprouveraient quelque désappointement. Tout nous porte à supposer que le jeune Ravaisson sortit du collège sans préférence arrêtée pour la philosophie, sans avoir aperçu clairement où était sa voie. Ce fut votre Académie qui la lui montra.

L'ordonnance royale du 26 octobre 1832 venait de rétablir l'Académie des Sciences morales et politiques. Sur la proposition de M. Cousin, l'Académie avait mis au con

(1) Nous devons cette communication, ainsi que plusieurs détails biographiques intéressants, aux deux petits-fils de M. Poret, eux aussi professeurs distingués de l'Université, MM. Henri et Marcel Bernès.

cours l'étude de la Métaphysique d'Aristote. « Les concurrents, disait le programme, devront faire connaître cet ouvrage par une analyse étendue et en déterminer le plan, - en faire l'histoire, en signaler l'influence sur les systèmes ultérieurs, rechercher et discuter la part d'erreur et la part de vérité qui s'y trouvent, quelles sont les idées qui en subsistent encore aujourd'hui et celles qui pourraient entrer utilement dans la philosophie de notre siècle. C'est probablement sur le conseil de son ancien professeur de philosophie que M. Ravaisson se décida à concourir. On sait comment ce concours, le premier qui ait été ouvert par l'Académie reconstituée, donna les résultats les plus brillants, comment neuf mémoires furent présentés dont la plupart avaient quelque mérite et dont trois furent jugés supérieurs, comment l'Académie décerna le prix à M. Ravaisson et demanda au ministre de faire les fonds d'un prix supplémentaire pour le philosophe Michelet de Berlin, comment M. Ravaisson refondit son mémoire, l'étendit, l'élargit, l'approfondit, en fit un livre admirable. De l'Essai sur la Métaphysique d'Aristote le premier volume parut dès 1837, le second ne fut publié que neuf ans plus tard. Deux autres volumes étaient annoncés, qui ne vinrent jamais; mais, tel que nous l'avons, l'ouvrage est un exposé complet de la métaphysique d'Aristote et de l'influence qu'elle exerça sur la philosophie grecque.

Aristote, génie systématique entre tous, n'a point édifié un système. Il procède par analyse de concepts plutôt que par synthèse. Sa méthode consiste à prendre les idées emmagasinées dans le langage, à les redresser ou à les renouveler, à les circonscrire dans une définition, à en découper l'extension et la compréhension selon leurs articulations naturelles, à en pousser aussi loin que possible le développement. Encore est-il rare qu'il effectue ce développement tout d'un coup: il reviendra à plusieurs reprises, dans des traités différents, sur le même sujet, suivant à

nouveau le même chemin, avançant toujours un peu plus loin. Quels sont les éléments impliqués dans la pensée ou dans l'existence ? Qu'est-ce que la matière, la forme, la causalité, le temps, le lieu, le mouvement? Sur tous ces points, et sur cent autres encore, il a fouillé le sol: de chacun d'eux il a fait partir une galerie souterraine qu'il a poussée en avant, comme l'ingénieur qui creuserait un tunnel immense en l'attaquant simultanément sur un très grand nombre de points. Et, certes, nous sentons bien que les mesures ont été prises et les calculs effectués pour que tout se rejoignît; mais la jonction n'est pas toujours faite, et souvent, entre des points qui nous paraissaient près de se toucher, alors que nous nous flattions de n'avoir à retirer que quelques pelletées de sable, nous rencontrons le tuf et le roc. M. Ravaisson ne s'arrêta devant aucun obstacle. La métaphysique qu'il nous expose à la fin de son premier volume, c'est la doctrine d'Aristote unifiée et réorganisée. Il nous l'expose dans une langue qu'il a créée pour elle, où la fluidité des images laisse transparaître l'idée nue, où les abstractions s'animent et vivent comme elles vécurent dans la pensée d'Aristote. On a pu contester l'exactitude matérielle de certaines de ses traductions; on a élevé des doutes sur quelques-unes de ses interprétations; surtout, on s'est demandé si le rôle de l'historien était bien de pousser l'unification d'une doctrine plus loin que ne l'a voulu faire le maître, et si, à réajuster si bien les pièces et à en serrer si fort l'engrenage, on ne risque pas de déformer quelques-unes d'entre elles. Il n'en est pas moins vrai que notre esprit réclame cette unification, que l'entreprise devait être tentée, et que nul, après M. Ravaisson, n'a osé la renouveler.

Le second volume de l'Essai est plus hardi encore. Dans la comparaison qu'il institue entre la doctrine d'Aristote et la pensée grecque en général, c'est l'âme même de l'Aristotélisme que M. Ravaisson cherche à dégager.

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