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FRAGMENS DU IX. CHANT.

SONGE DE NASSAU; TEMPLE DE LA GLOIRE.

Les rois qui s'enivraient d'un encens odieux,

Et, n'ayant rien d'humain, se sont déclarés dieux,
Sont à jamais bannis du vénérable temple;
Mais la Gloire y reçoit, et ton œil y contemple
Les rois hommes encor, les mortels généreux,
Qui, soumis à des lois, n'ont point régné pour eux.
Tu vois Codrus, Agis, ces deux chefs magnanimes,
Des saints devoirs du trône héroïques victimes;
Sésostris et Numa, princes législateurs ;

Là, Titus et Trajan, sous qui les délateurs
Perdirent le pouvoir de vendre l'innocence;
Empereurs citoyens, plus grands que leur puissance,
Et dont le nom chéri, si doux à mériter,

Est le surnom des rois quand on veut les flatter.
Sur les cheveux blanchis du sage Marc-Aurèle,

Le laurier des Césars, couronne paternelle,

N'est point souillé des pleurs et du sang des humains; Mais le pouvoir suprême, adoré dans ses mains,

Sous Commode, son fils fut l'effroi de la terre:

Admire ce Julien, dans Bysance élevé,

Né pour l'honneur du monde, et trop tôt enlevé,
Rassemblant les vertus, les talens d'un grand homme,
Survivant aux Romains, mais digne encor de Rome.
Ce sultan que tu vois est le fier Saladin;
Il rendit le repos aux rives du Jourdain,
Des chrétiens oppresseurs délivra la Syrie,
Et devint conquérant pour venger sa patrie.
Plus bas est Louis neuf, dont l'équitable voix
D'un sommeil léthargique a réveillé les lois.
Hélas! en d'autres temps sa pieuse ignorance
Perdit aux bords du Nil les trésors de la France:
Mais des vertus sans tache et trente ans de malheurs
A la sévère histoire ont arraché des pleurs;
En condamnant son siècle elle absout sa mémoire,
Et ne lui ferme point le Temple de la Gloire.
Le souvenir du pauvre et l'amour des Français
Au clément Louis douze en permettent l'accès.
A côté de Julien tu vois briller Gustave,
Ce roi libérateur de la Suède esclave:

Sage, vaillant, heureux, il sut vaincre à la fois
L'imposture romaine et le tyran danois.

Les premiers de leur temps dans le premier des arts, Ces mortels inspirés appellent tes regards.

L'harmonieux Lucrèce, élève d'Épicure,

Chante en vers immortels l'immortelle nature :
Ovide en vers plus doux, et sans peine enfantés,
Des fables de la Grèce embellit les beautés :
Sublime sans orgueil, enjoué sans délire,

Horace à tous les tons soumet sa docte lyre;
Et Virgile aux bergers, aux descendans des dieux,
Consacre tour à tour ses chants mélodieux.
De la plaine olympique et des bois de Némée
Pindare élève aux cieux la poussière enflammée;
Euripide et Sophocle, en vers mouillés de pleurs,
Des tragiques héros illustrent les malheurs;
Et Ménandre, épurant l'autre scène avilie,
Sourit à la Sagesse en peignant la Folie.
Parmi ces vrais talens, rivaux et non jaloux,
Contemple ce vieillard qui les surpasse tous :
Une envieuse nuit a fermé sa paupière;
Mais son âme reçoit et répand la lumière :
Son front large et pensif, par les ans sillonné,
S'élève de lauriers et de feux couronné;

C'est Homère. Aux héros, aux poëtes, aux sages,
11 chante encor ses vers, il dicte ses ouvrages,
D'un art qu'il inventa modèles éclatans,.
Rajeunis tous les jours par les rides du temps.

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ESSAI

SUR LES PRINCIPES DES ARTS.

POÈME.

CHANT PREMIER.

J'EXPOSE dans mes vers les principes des arts.
Toi, dont la France obtint les propices regards,
Par qui la Grèce et Rome ont produit des miracles,
Apollon, dieu du jour, dieu qui rends les oracles,
Qui, de rayons couvert, et tenant l'arc vengeur
Sous qui du noir Python succomba la fureur,
Guides le vol hardi de ce coursier rapide

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Dont le pied fit jaillir la source Aganippide,
Daigne inspirer ma voix! Et vous, pudiques soeurs,
Muses, de vos accords prêtez-moi les douceurs;
Laissez-moi d'Hélicon parcourir les ombrages,
Où, ceintes de lauriers sous l'abri des bocages,
Vous formez en dansant ces chants mélodieux

Qui montent vers l'Olympe, et vont charmer les Dieux :

Je vous implore aussi, Grâces enchanteresses;
Vous égayez le coeur des neuf chastes Déesses;
De vos jeux élégans vous ornez leurs concerts:
Eh! que seraient sans vous et le chant et les vers ?
Donnez-moi ce talent dont l'heureuse souplesse
S'élève avec vigueur, descend avec noblesse,
Sait badiner, instruire, émouvoir, raisonner,
Et prendre tous les tons sans jamais détonner.

Les arts n'ont qu'un objet, d'imiter la nature :
Poésie, Éloquence, et Musique, et Peinture,
Marchent au même but par des sentiers divers :
Mais, comme ils sont voisins, un esprit de travers
De les confondre ensemble a souvent la manie,
Et voit dans ses écarts les élans du génie.
En vain le mauvais goût s'empresse d'applaudir:
Dénaturer les arts, n'est pas les agrandir.

Ainsi qu'aux vers bien faits, il faut à l'éloquence Les sons harmonieux, le nombre, la cadence, Les termes enrichis d'un sens plus étendu, Des termes rapprochés l'hymen inattendu, Ces tours, ces mouvemens, ces figures pressées, Qui font agir les mots et peignent les pensées. Bossuet, Fénélon, leur devancier Pascal, Buffon leur successeur, et Rousseau leur égal, Des lecteurs délicats méritant les suffrages, De ces trésors du style ont paré leurs ouvrages.

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