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SATIRE SIXIÈME

DES BIENS DE LA FORTUNE.

VII.

ARGUMENT

DE LA SIXIÈME SATIRE.

L'ART d'user des biens de la fortune était encore généralement ignoré des Romains au siècle de Néron : les uns, colorant du nom de frugalité antique leur sordide avarice, se refusaient le nécessaire à eux et à leurs esclaves, condamnaient l'introduction dans Rome des arts de la Grèce, et gémissaient des progrès de l'économie domestique; les autres sacrifiaient un riche patrimoine pour flatter les caprices de la tyrannie impériale et populaire; quelques-uns avaient la sottise de ne travailler que pour des héritiers avides ou dissipateurs; un bon nombre, plus insensés encore, aimaient le gain pour le gain, amassant par toute sorte de moyens sans fin ni mesure.

A tant de vices la philosophie opposait ces préceptes d'une modération vertueuse : il faut que les intérêts suffisent à l'entretien personnel, il faut prendre sur le capital pour secourir le malheur et l'amitié; préférer à soi-même des vauriens d'héritiers, et mettre de côté pour quand on ne sera plus, c'est sottise et duperie; enfin amasser pour amasser, c'est se condamner à des fatigues continuelles et à des sentimens inhumains.

Cette doctrine, qu'on retrouve à peu près la même dans les meilleurs moralistes latins, Perse a su la faire valoir par les tours d'un style original et varié : tantôt il s'entretient avec son ami Césius Bassus, renfermé comme lui dans les travaux de l'étude, et se félicite d'être au-dessus du besoin, comme exempt des soucis de la passion d'acquérir; tantôt il prend à partie son héritier, lui montrant le malheur d'avoir de la fortune sous un gouvernement

despotique, et se riant des préjugés de la naissance, des droits de succession, de l'usage des testamens; partout il s'élève contre les pratiques d'une basse cupidité, et particulièrement contre les rigueurs envers les esclaves.

SATIRA SEXTA.

ADMOVIT jam bruma foco te, Basse, Sabino?
Jamne lyra, et tetrico vivunt tibi pectine chorda,
Mire opifex numeris veterum primordia vocum
Atque marem strepitum fidis intendisse latinæ,
Mox juvenes agitare jocos, et pollice honesto
Egregios lusisse senes? Mihi nunc Ligus ora
Intepet, hibernatque meum mare, qua latus ingens
Dant scopuli, et multa littus se valle receptat.
Lunaï portum est operæ cognoscere, cives :
Cor jubet hoc Ennî, postquam destertuit esse
Mæonides Quintus pavone ex Pythagoreo.

HIC

Hic ego securus vulgi, et quid præparet Auster
Infelix pecori securus, et angulus ille

Vicini nostro quia pinguior; etsi adeo omnes

Ditescant orti pejoribus, usque recusem

Curvus ob id minui senio, aut coenare sine uncto,

Et signum in vapida naso tetigisse lagena.

DISCREPET his alius. Geminos, horoscope, varo

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E

SATIRE SIXIÈME.

Le froid vous a déjà rapproché, Bassus, de votre foyer du Sabinum1. Avez-vous déjà ranimé sous l'archet mordant les cordes de votre luth endormi, habile compositeur qui faites revivre dans vos chants les élémens de la langue primitive et les mâles accords de la lyre des Latins3, qui célébrez et les ris de la jeunesse, et, sur un ton plus grave, les vertus du vieil âge 4? Pour moi, je me réchauffe sur la côte de ma Ligurie5 : la mer prend avec moi ses quartiers dans ce golfe profond où elle s'enfonce, et sous la vaste enceinte de rochers qui lui sert de retraite.

Il faut voir, citoyens, de Luna le beau port:

ainsi parle le bon Ennius 7, quand il est sorti de son rêve et qu'il n'est plus Homère-Ennius, comme Pythagore avait été oiseau 8.

Je n'ai point à m'inquiéter du vulgaire 9; je n'ai à m'inquiéter ni si l'Auster menace de la contagion les troupeaux 1o, ni si le champ du voisin est plus fertile que le nôtre11 : quand tous ceux qui sont nés au dessous de moi viendraient à s'enrichir 12, je ne voudrais pour cela ni sécher et vieillir de chagrin 13, ni retrancher quelque chose de mon ordinaire, ni flairer avaricieusement le cachet d'une bouteille attaquée 14.

Libre à d'autres de vivre autrement. Horoscope, tu fais

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