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les essais variés des traducteurs du Nord '; Dryden et Monti eux-mêmes, avec toute l'audace et la souplesse de leur talent et de leurs idiomes, ne l'ont qu'imparfaitement saisie, et notre Boileau, dans ses imitations, est resté bien loin de la rapidité énergique de son modèle 2.

1. Perse a été traduit en allemand, en polonais, en danois, et dans presque toutes les langues de l'Europe. Dans la nôtre seulement on en compte vingt ou vingt-cinq traductions, tant en prose qu'en vers; cinq ont paru depuis le commencement de ce siècle; huit ou dix pendant le siècle dernier, et à peu près autant pendant les deux siècles précédens.

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2. M. L. Parelle a publié en 1827, chez M. Lefèvre, les Satires de Perse et de Juvénal, expliquées, traduites et commentées par Boileau. Je veux croire avec M. Parelle que ce travail sur les satiriques latins est bien réellement de Boileau. M. Parelle atteste qu'il est extrait d'un manuscrit entièrement écrit de la main de Boileau, laquelle est bien connue. Je veux croire encore que ce travail a été fort utile au père Tarteron pour sa traduction de Perse et de Juvénal, puisque cette traduction n'est le plus souvent qu'une servile copie du prétendu travail de Boileau. Mais ce que je ne saurais admettre, c'est que ce travail de Boileau ait toute l'importance que paraît y attacher M. Parelle. Les notes ne sont qu'une compilation abrégée des meilleures notes de Britannicus, de Casaubon, du vieux scoliaste, et des meilleures éditions de Perse et de Juvénal avant Boileau; et la traduction est si incomplète, si diffuse, et si peu fidèle même, qu'elle ne mérite réellement pas le nom de traduction. Ce travail de Boileau n'est autre chose que l'ensemble des notes et abréviations de notes qu'il avait copiées des ouvrages des commentateurs et traducteurs sur son exemplaire des satiriques latins, pour les lire avec plus de facilité; c'était son vade-mecum, son livre de poche, ainsi que l'observe fort bien M. Parelle lui-même. Comme tout ce qui vient des hommes à talent a son intérêt, M. Parelle a cru bien faire de publier l'exemplaire de Boileau; mais, dans la pensée de ce grand écrivain, ce travail tout particulier n'était point des

Il y a des auteurs qu'une traduction ne rendra jamais; seulement, à mesure que les travaux sur les textes se multiplient, que les connaissances sur l'antiquité s'étendent, et que nos langues deviennent plus riches et plus flexibles, il est possible de rapprocher insensiblement davantage des originaux les imitations. On remarque dans les traductions de Virgile une amélioration progressive; on peut faire la même observation sur celles de Perse. Ainsi, les vers de Foulon, qui datent de 1544, ne valent pas ceux de Le Noble, qui sont du commencement du dix-huitième siècle, ni ceux-ci ceux d'un traducteur, notre contemporain. De même, pour la prose, Durand le cède à Marolles, Marolles à Tarteron, Tarteron à Lemonnier et à Sélis. C'est que l'art de traduire va se perfectionnant, et que, dans ce genre, toutes choses égales d'ailleurs, les derniers venus ont nécessairement l'avantage.

3o. NOTICES LITTÉRAIRES. -Le progrès doit être le même pour les notices littéraires : la plus récente peut toujours être la meilleure, parce qu'elle peut toujours se composer de ce qu'il y a de mieux dans celles qui l'ont précédée. Mais, lorsque la critique s'est exercée sur un livre autant que sur celui de Perse, il devient difficile, je ne dis pas de concilier et de résumer tous les jugemens, mais seulement de les enregistrer. Déjà, au

tiné au public. Il est de mode aujourd'hui de rechercher curieusement et d'imprimer jusqu'aux moindres lignes sorties de la plume des grands écrivains, jusqu'à leurs lettres les plus insignifiantes aux gens les plus inconnus cette mode n'est bonne ni pour les morts ni pour les vivans.

seizième siècle, les opinions sont partagées sur les satires de Perse. Les uns, comme Scaliger', n'y voient que des déclamations écrites dans un style bizarre et de mauvais goût, dignes d'un échappé des écoles, qui ignore le monde et le juge avec les maximes exagérées du stoïcisme; les autres, comme Casaubon 2, n'ont que des éloges pour le fond et pour la forme; ils veulent qu'on rende au poète du Portique toute la considération dont il a joui dans l'antiquité. Le sceptique Bayle a cherché à affaiblir cette admiration que revendiquent les érudits pour leur auteur, et il a opposé, aux autorités favorables à Perse, d'autres autorités qu'il regarde comme irréfragables. Mais il n'a pu empêcher que des écrivains illustres ne rendissent à Perse, en le citant, en l'imitant, en le comparant aux plus grands poètes satiriques de tous les temps, un hommage qu'on ne rend qu'au génie.

Vers la fin du dix-huitième siècle, les discussions sur le livre de Perse ont recommencé plus vives que jamais; l'on n'a guère fait cependant que répéter alors en français ce qui déjà en avait été dit en latin. M. Dussaulx 3, traducteur de Juvénal, était sur la voie pour apprécier mieux qu'on ne l'avait fait avant lui le mérite et l'influence des poètes du stoïcisme; on regrette que, trop

1. Voyez JUL. CÉS. SCALIGER, Poet., lib. vi, cap. 6; MEURSIUS, cité par Bayle; HEINSIUS, Dissertat. sur Horace, p. 138; etc. 2. Isaac. Casaub., Prolegom. in Persium; Turnèbe, Érasme, etc. 3. Voyez son Discours d'introduction à la traduction de Juvénal, et sa Dissertation sur Perse dans les Mémoires de l'Académie des Inscriptions. L'auteur n'a point assez médité la marche de la littérature et l'histoire de la philosophie stoïcienne chez les Latins.

plein de son auteur, il ait été injuste envers ceux qui lui avaient ouvert la carrière. La Harpe a voulu se faire arbitre dans la querelle sur Perse1, comme dans celle sur Homère; mais sa dissertation, écrite d'ailleurs avec cette élégance qui l'abandonne si rarement, manque de profondeur : il ne faut pas y chercher la pensée du livre des satires. On la trouverait plutôt dans l'Essai sur les règnes de Claude et de Néron2, dont l'auteur, éclairé par la position des philosophes du dix-huitième siècle vis-à-vis du pouvoir, a parfaitement compris celle des philosophes contemporains de Sénèque; mais le nom de Perse se trouve à peine dans cet ouvrage. Dans ces derniers temps, des érudits, comme Koenig, Shoëll et Passow, des littérateurs, comme Lebatteux, Gifford et M. Théry, ont multiplié les explications et les jugemens sur le livre des satires; ils ont ajouté aux données du problème, plutôt qu'ils ne l'ont résolu.

VIII. Résumé de la première partie; questions à résoudre dans celles qui suivent. Ainsi, ce petit livre a traversé dix-huit siècles, conservant toute sa gloire, occupant de lui, à toutes les époques littéraires, la plupart des talens qui exploitent les vieux auteurs; et l'on ne sait pas encore bien ce que c'est que ce livre. Non-seulement

1. Lemonnier et Sélis, à l'exemple des commentateurs du seizième siècle, ont été, dans leurs discussions sur Perse, jusqu'aux personnalités : cela n'éclaircit rien.

2. Cet essai de Diderot se trouve en tête de la traduction de Sénèque par Lagrange, et dans le recueil des œuvres de Diderot. Il est singulier que l'auteur n'y dise pas un mot ni de Perse, ni de Cornutus, ni des différens partis philosophiques qui divisaient le stoïcisme et la littérature.

on ignore le sens particulier de beaucoup de passages, mais l'on n'a pas même, sur son ensemble et sur l'esprit qui l'a dicté, une opinion légitime, exacte, arrêtée. On trouve dans toutes les dissertations sur Perse, dans tous les discours d'introduction à sa lecture, des considérations banales sur l'origine et les progrès de la satire ancienne, sur les différens âges de la langue latine, sur les mœurs de la république comparées à celles de l'empire, et enfin le parallèle obligé entre les satiriques latins les plus illustres. Ces généralités ne suffisent point'. Quelle est précisément la langue de Perse, et comment s'est-elle formée? quel est son système de versification? quelles sont les qualités et les défauts de son style? quelle est sa manière de composer? comment a-t-il conçu la satire? ce sont des questions purement littéraires, à peu près neuves encore, après tant d'écrits qui auraient dû les résoudre. Au milieu de quelles circonstances l'ouvrage de Perse a-t-il pris naissance? à quelle nuance d'opinions politiques et philosophiques appartenait l'auteur? quel est le but de son livre? de quoi traite ce livre? jusqu'à quel point renferme-t-il un système de morale, et quel est ce système? ce sont des questions d'un autre ordre, que la plupart des critiques ne se sont pas même pro

1. La plupart sont extraites d'ouvrages spéciaux sur ces matières, ouvrages fort bons en eux-mêmes, comme le traité de Casaubon, de Satirica Græcorum poesi et Romanorum satira, comme l'ouvrage intitulé: Quatuor linguæ latinæ ætates, et surtout comme l'excellent traité de Ruperti, de Satira Romanorum, de Satiricis Romanorum poetis, de Sat. Lucilii, Horatii, Persii et

Juvenalis.

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