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Prêtre d'un Dieu de paix et de miséricorde,

O toi que ses puissantes mains

Avaient mis sur la terre en exemple aux humains,
Pour maintenir entre eux l'amour et la concorde,

Comment as-tu rempli ta sainte mission?
Qu'as tu fait, et pourquoi de ta bouche sacrée,
Comme une hymne de mort par l'enfer inspirée,
Sort-il des cris de haine et de division?

Toi qui sais, maniant la harpe des archanges,

En tirer des sons purs, des modulations

Douces comme un écho du doux concert des anges (1),

(1) Telles, par exemple, que le chapitre xır du « Livre du Peuple, et les

α

As-tu pu ramasser, au milieu de nos fanges,

Le clairon discordant des révolutions?

Tremble qu'en y touchant ta main ne soit rougie
Du sang mal essuyé dont il est encor teint,
Et cesse d'affubler du bonnet de Phrygie
Un front marqué du sceau du Rédempteur divin.

Que veux-tu donc ? Quel est le but que se propose
La virulente ardeur de ton esprit morose?
Pourquoi l'enfer, par toi, parlant au nom du Ciel,
Et ces discours trempés au plus amer du fiel?

. C'est que, dis-tu, le peuple est là que l'on opprime,
Et que ton cœur, au mal qu'endure la victime
Sous le joug d'un pouvoir qui l'écrase du pié,
«Se remplit d'amertume et se fend de piété!

« C'est qu'il te vient à l'âme une rage cruelle

« De voir qu'on mange au peuple et la chair et la moelle,

Qu'on boit son sang, et que, comme au chien mort les vers,

« Le pouvoir va paissant à ses flancs entrouverts!

« C'est que son corps n'est plus rien qu'une immense plaie.

« Qu'un cadavre écorché que traînent sur la claie,
Après l'avoir rongé, les goules du pouvoir;

« Un objet misérable, indicible et difforme,
• Une ombre qui n'a plus de couleur ni de forme,
Et qui fait peur à voir.

« C'est que, sous le fardeau de tant de tyrannie,
Chez un peuple réduit à tant d'ignominie,

« Il ne faut plus parler de lois, de liberté,
« Ni de société,

Et qu'un amas confus d'humaines créatures

« Dont la plupart n'ont pas, pour dormir, un fenil,

. Ne forme plus, en proie à ses mille tortures,

« Une société, mais à peine un chenil (1)! »

chapitres XVII, xxv et XL1 des « Paroles d'un croyant », qui tous, tant sous le rapport du but moral que pour le charme du style, peuvent être mis an rang de ce qui a été écrit de plus suave dans notre langue.

(1) Ce vers et ceux qui précèdent, depuis et y compris celui-ci :

• C'est que, dis-tu, le peuple est là que l'on opprime, »

sont imités de M. La Mennais lui-même.

Et tout cela, dit-il à la page 56 de son pamphlet intitulé: Le Peuple et le

Assez, o prêtre, assez! voilà certe une page
Brûlante plus que l'eau qui sort de l'échaudoir,
Des phrases à jeter au cœur le désespoir;
Mais d'un prêtre chrétien est-ce là le langage?
Était-ce là, dis-moi, les tableaux, les discours
Que tu devais au peuple? Est-ce là le secours,
Le baume bienfaisant, le généreux dictame
Qu'attendent ses douleurs, qu'il faudrait à son âme,
Contre le poids des maux que tu lui peins si lourds?
Le pélerin, s'il trouve un mourant sur sa voie,
Au lieu de le remettre aux bras du médecin,
Le va-t-il retournant sans cesse pour qu'on voie
Et qu'on puisse compter les coups de l'assassin?
Lui va-t-il,
sans piété des douleurs qu'il endure,
Faire en style effrayant une horrible peinture
Des blessures, des coups dont il le voit souffrir,
Et du danger qu'il court de n'en jamais guérir?

Non

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Lui fait trouver des mots dont la douceur console

Et rend, malgré le mal dont leur charme est vainqueur,
Le sourire à la lèvre et l'espérance au cœur.

Celui-là plus que toi se montre charitable,
Plus que le tien surtout son zèle est véritable;
Aider et consoler ceux qui souffrent, voilà
La mission du prêtre et la tienne; c'est là

Pourquoi le Créateur, de trésors d'éloquence
T'avait rempli le sein,

Et non pour exciter le peuple à la vengeance
Par le glas incessant d'un infernal tocsin.

Gouvernement *, et tout cela pourquoi ? pour se jeter à son tour sur la proie que l'on convoite, pour, à son tour, dévorer le pays, s'engraisser de sa chair el de sa moelle ».

« Et nous, dit-il à la page 92, nous vous disons que votre société n'est pas une société, qu'elle n'en est pas même l'ombre, mais un assemblage d'êtres, qu'on ne sait comment nommer ».

. Chez un peuple qui en est là, dit-il à la page 80, on ne doit plus parler ni de liberté ni de société, et ce n'est pas une société qu'un amas de créatures humaines réduites à cette extrémité, c'est à peine un chenil ».

L'auteur s'est trompé sur le titre : l'ouvrage auquel il répond est intitulé ; le Pays et le Gouvernement ». Voilà ce qui nous a conduit à placer sa critique parmi celles du « Livre du peuple ».

Le peuple! oh! que lui sert l'anathème farouche
Qu'en son nom ta voix lance à la Société ?

Quel bien lui fait le fiel qui, sorti de ta bouche,
Tombe à si larges flots sur son cœur irrité?

S'il est vrai que, courbé sous des lois homicides,
Le pauvre est là qui meurt de faim,
Pour apaiser le cri de ses entrailles vides,

De grands mots galoppant sur des coursiers sans brides
Ne valent pas un peu de pain.

Et du pain, ce n'est pas des phrases factieuses,
Des déclamations furibondes et creuses,

Effets tirés sur lui par la mauvaise foi.

Tes pamphlets qu'il achète à l'étal de Pagnerre (1),
Sont un dernier impôt levé sur sa misère,

Et ne font quelque bien qu'à Pagnerre et qu'à toi.

Puis, l'image des maux dont ton ardeur s'effraie
N'est-elle pas vingt fois plus terrible que vraie?
El ces maux que sans cesse à ses tristes regards
Tes pinceaux apocalyptiques

Se plaisent à charger de couleurs sataniques,
N'en as-tu pas, dis-moi, rêvé plus des trois quarts?

Quoi donc ce beau pays de France,

Où j'étais si fier d'être né,

Est-il vrai? ne serait plus rien qu'un parc immense,
Où quelques oppresseurs, sous un chef couronné,
Couchés dans la mollesse et la fainéantise,

Tiendraient un peuple emprisonné,

Vil bétail par eux destiné

A repaître leur convoitise!

Quoi! pour comble d'impiété,
Serait-il vrai que la justice,
Cette émanation de la divinité,

De tant d'horreurs se fit complice,
Et que, vendue à l'or d'un pouvoir détesté,
Elle jetât en proie aux atroces sentences

(1) Pagnerre est, comme on sait, l'éditeur des pamphlets politiques de M. l'abbé de La Mennais, du ci-devant vicomte de Cormenin, de MM. Cabet, Altaroche et autres personnages dont la spécialité consiste à aimer le peuple en paroles.

De ses hommes-potences (1),

L'innocence livrée à leur iniquité ?

Grâce au ciel! tout cela n'est point la vérité,
Et, n'en déplaise aux fous que ta voix persuade,
N'existe nulle part qu'en ton esprit malade,
Qui prend à son réveil, pour la réalité,

Les rêves dont la nuit tu fus épouvanté ;

Et le peuple,
non pas cette oisive canaille,
Peuple des mauvais lieux et des estaminets,
Vagabonds, culotteurs de pipes, valetaille
Heurlant la Marseillaise, en cuvant tes pamphlets;
Mais le seul peuple vrai, le peuple qui travaille,
Qui nourrit sa famille et, par la probité,
L'ordre, l'économie, à la propriété

Arrive honnêtement, s'il ouvrait, pour les lire,
Les écrits où tu peins son prétendu martyre,
Serait fort étonné

De voir jusqu'à quel point il est infortuné.

Fais-nous donc, si tu peux, des contes plus croyables.

Que parles-tu de cruauté,

De potences, d'iniquité

Et de juges impitoyables?

La justice jamais, avec plus d'équité,

Ne se montra moins formidable.

En quels lieux, en quels temps a-t-elle présenté

A l'innocent plus de sécurité

Et plus d'humanité, même pour le coupable?
En quels lieux à l'autorité

Vit-on plus de douceur, de longanimité?
Quand aura-t-on trouvé la clémence royale
Envers ses assassins même plus, libérale ?
En quels jours, sur le front du crime repentant,
La grâce, le pardon, bienfaisante rosée

Que l'on pourrait croire épuisée,
Tombèrent-ils du trône à flot plus abondant?

De monomanie indulgente

Dis donc plutôt que les cœurs sont imbus,

Et qu'il s'en fait chez nous un si grossier abus,
Qu'eût-on coupé, je crois, père et mère, oncle et tante,

(1) C'est sous cette qualification que M. l'abbé de La Mennais désigne les magistrats d'aujourd'hui, magistrats qu'il a bien le courage d'assimiler aux

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