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Vous attaquez la certitude des preu ves de fait par des exemples. S'il y a dans le monde une hiftoire atteftée, c'est celle des Wampirs. Rien n'y manque ; procès-verbaux, certificats de Notables, de Chirurgiens, de Curés, de Magiftrats. La preuve juridique eft des plus complettes. Avec cela, qui eft-ce qui croit aux Wampirs? Seronsnous damnés pour n'y avoir pas cru? (a)

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Je vous nie d'abord que ces atteftations foient auffi authentiques ni la preuve juridique aufli complette que vous le prétendez, puifqu'après des informations exactes, les faits ne fe font pas trouvés fuffifamment conftatés. Quand ils le fe roient, que prouveroient-ils ? Qu'il a régné en Hongrie une maladie de cerveau, caufée par la peur, dont plufieurs personnes ont été attaquées ; que les ma¬ lades croyoient voir des efprits ou des revenans, qui leur fuçoient le fang; que l'effet de ce délire étoit de les confumer peu-à-peu, jufqu'à ce qu'ils en mouruffent, & qu'effectivement plufieurs en font morts. Voilà les feuls faits qui pourroient réfulter de la preuve. Qu'il y eût du furnaturel dans tout cela, ce feroit une autre queftion qui eft du reffort de la phyfique,

(#) Lettre, P. 191,

& qui ne fe décide point par des atteftations. L'hiftoire des Wampirs eft donc une objection pitoyable contre les miracles de Jefus-Chrift & ceux des Apôtres.

Quelqu'atteftés que foient, dites-vous, au gré même de l'incrédule Cicéron, plufieurs des prodiges rapportés par Tite-Live, je les regarde comme autant de fables, & furement je ne fuis pas le feul. Mon expérience conftante & celle de tous les hommes, eft plus forte en ceci que le témoignage de quelques-uns ( a ).

Vous fuppofez très-gratuitement que les prodiges rapportés par Tite - Live, étoient fuffifamment atteftés ; & que Cicéron les a jugés tels. L'un & l'autre font également faux. Cicéron les appelle en propres termes des contes forgés à plaifir, commentitiis fabulis. Tous ces prodiges, loin d'être rapportés par des témoins oculaires, ou confirmés par des monumens auffi anciens que le fait, ne font appuyés que fur des on dit. La plupart même font des phénoménes très-naturels

comme

des pluies de pierres ou de fang, des monftres, &c. Ce n'eft donc point l'expérience qui décide ici contre des témoignages, ce font les témoignages qui man

(a) Lettre, p. 101

quent dans les uns, & qui ne prouvent point le furnaturel dans les autres. Aucune de ces deux exceptions ne peut être appliquée aux miracles qui prouvent la révélation.

Après avoir attaqué la certitude des faits furnaturels, vous en conteftez les conféquences; vous prétendez qu'ils ne prouvent rien. Refte enfin l'examen le plus important dans la doctrine annoncées car, puifque ceux qui difent que Dieu fait ici-bas des miracles, prétendent que le Diable les imite quelquefois, avec les prodiges les mieux conftatés, nous ne fommes pas plus avancés qu'auparavant ; & puifque les Magiciens de Pharaon ofoient, en préfence même de Moyfe, faire les mêmes fignes qu'il faifoit par l'ordre exprès de Dieu, pourquoi, dans fon abfence, n'euffent-ils pas, aux mêmes titres, prétendu la même autorité ? Ainfi donc, après avoir prouvé la doctrine par le miracle, il faut prouver le miracle par la doctrine, de peur de prendre l'œuvre du Démon pour l'œuvre de Dieu. Que faire en pareil cas pour éviter le dialèle ? Une feule chofe; revenir au raisonnement, &laiffer-là les miracles. Mieux eût valu n'y pas recourir (a),

(#) Emile, tome 3, p. 135. Lettre, p. 1ose

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Pour éclaircir plus aifément toutes ces difficultés, il eut fallu les féparer ; mais vous m'auriez accufé d'affoiblir vos raifons. Cette plainte n'aura pas lieu. Repre nons, Monfieur.

Refte l'examen le plus important dans la doctrine annoncée. Je vous ai prouvé, & même plus d'une fois, que dans le cas où Dieu a révélé une doctrine incompréhenfible, cas non-feulement poffible, mais réel, cas où nous fommes, de votre propre aveu, l'examen de la doctrine eft la chofe du monde la plus inutile & la plus ridicule. De quoi peut fervir un examen dont tout le résultat doit être de dire : je ny comprends rien? De ce résultat que conclurai-je ? Mon ignorance, & riem davantage. Si j'en conclus; donc cette doctrine eft fauffe, donc je ne dois pas la croire quelles feront les prémiffes de ces deux conclufions? Voici celles de la pre miere. Je comprends tout, & il n'eft aucune vérité que je ne comprenne or, je ne comprends pas cette doctrine; donc elle eft fauffe. L'argument eft en forme ; je vous laiffe tout le plaifir de vous prouver' à vous-même la majeure. Pour la feconde, le raifonnement ne fera pas moins fort. Je ne dois croire que ce que je congois; or je ne conçois pas cela; donc je

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ne dois pas le croire. Vous me forcez de répéter que j'ai démontré la fauffeté de la premiere propofition.

Je vous ai repréfenté auffi plufieurs fois que cet examen de la doctrine annoncée eft abfolument impraticable au peuple, c'est-à-dire, aux trois quarts du genre humain : fi Dieu n'a donné d'autre moyen pour s'affurer de la vérité d'une Religion que cet examen il veut que les trois quarts du genre humain n'en aient aucune, ou qu'ils la reçoivent aveuglément du premier impofteur qui voudrra leur en don

ner une.

,

Puifque le Diable imite quelquefois les miracles, avec les prodiges les mieux conftatés, nous ne fommes pas plus avancés qu'auparavant. Je nie abfolument, Monfieur, que le Diable puiffe imiter aflez parfaitement les miracles opérés au nom de Dieu, pour que l'on ne puiffe plus diftinguer l'opération divine de l'œuvre du démon ; & j'ofe vous défier de me citer un feul cas où il l'ait fait. Celui des Magiciens de Pharaon que vous apportez, prouve pour moi & contre vous; ils ne purent contrefaire que quelques-uns des miracles de Moyfe. Envain ils vouJurent tenter d'imiter les autres ; ils furent

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