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Et pourquoi cela? demandera cet homme. Pourquoi ma raison, qui jusqu'à présent a été, selon vous, un instrument infaillible de vé

rité, devient-elle un instrument non moins infaillible d'erreur ? C'est que l'Eglise en

seigne des dogmes qui sont au-dessus de la raison *. - Vous vous moquez, car je ne vois

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⭑ Lorsqu'un homme a reconnu la divinité du christianisme et l'infaillibilité de l'Eglise, ou lui dit avec raison : <«< Dieu a parlé, soumettez-vous; l'Eglise décide, croyez. » C'est une conséquence très juste du principe avoué, mais ce n'est pas une réponse à cette question : « Pourquoi ma raison, qui pouvoit et devoit décider infailliblement << certains points de doctrine avant que je fusse entré dans l'Eglise, perd-elle son infaillibilité lorsque je suis entré « dans l'Eglise, de sorte qu'elle s'égarera indubitablement, << si elle veut alors décider ces mêmes points de doctrine? » L'Eglise, éclairée de l'esprit de Dieu, les décide infailliblement, on en convient; mais, ou ma raison conserve sa propre infaillibilité, et dans ce cas elle les décidera certainement comme l'Eglise, ou il est possible que, de bonne foi, elle les décide autrement que l'Eglise, et alors elle a perdu son infaillibilité. Or, pourquoi l'auroit-elle perdue? Voilà ce que je demande. Si on nie qu'avant d'être convaincue de la vérité du christianisme la raison individuelle fût infaillible, et qu'on soutienne néanmoins qu'elle est le moyen donné à chaque homme pour discerner la vraie religion, l'embarras est encore plus grand.

rien dans la doctrine de l'Église qu'il soit plus difficile à la raison de pénétrer que la plupart des questions que j'ai dû décider avant d'entrer dans l'Église. Que dis-je ? Plusieurs de ses dogmes ne dépendent-ils pas de ces questions mêmes? L'origine du mal, le libre arbitre, l'accord de la prescience avec la liberté, n'est-ce pas là le fond de toutes. les disputes et de toutes les hérésies sur la grâce? Or, expliquez-moi, je vous prie, comment il se fait que, pouvant et devant résoudre infailliblement ces questions lorsque je n'étois pas encore dans l'Église, je me tromperai à peu près aussi infailliblement, si je cherche à les résoudres, après être entré dans l'Église.

Il nous semble que ces réflexions suffisent pour faire sentir les graves inconvéniens de la méthode philosophique. Nous avons éclairci, autant que nous le pouvions sans anticiper sur notre troisième voluine, les difficultés qu'on a proposées contre la méthode d'autorité. Si nous ne répondons pas à tout ce qu'on a écrit, à propos de notre ouvrage, c'est que nous ne voulons répondre qu'à ce qui tient au sujet que nous avons traité. Le temps est trop précieux pour le

perdre en disputes inutiles, ou en justifications superflues, et nous avons pensé ne pouvoir mieux faire que de nous conformer à ce conseil de Malebranche: « Quand un auteur ne « se contredit que dans l'esprit de ceux qui <«< cherchent à le critiquer, et qui souhaitent « qu'il se contredise, il ne doit pas s'en mettre « fort en peine et s'il voulait satisfaire, par « des explications ennuyeuses, à tout ce que « la malice ou l'ignorance de quelques per<< sonnes peuvent lui opposer, non seulement « il feroit un fort méchant livre; mais encore «< ceux qui le liroient se trouveroient cho« qués des réponses qu'il donneroit à des « objections imaginaires, ou contraires à << une certaine équité dont tout le monde se < pique. Car les hommes ne veulent pas

qu'on les soupçonne de malice ou d'igno<«<rance; et pour l'ordinaire il n'est permis << de répondre à des objections foibles ou ma« licieuses que lorsqu'il y a des gens de « quelque réputation qui les ont faites, et << que les lecteurs sont ainsi à couvert du re« proche que de telles réponses semblent « faire à ceux qui les exigent1. »

De la recherche de la vérité. Éclaircissement sur

Nous devons avertir, au surplus, qu'on auroit tort d'accuser de mauvaise foi tous ceux qui attaquent des vérités très certain es et très évidentes; car, d'un côté ou peut avoir beaucoup de sincérité avec peu de lumières; et d'un autre côté il se trouve, comme l'observe Pascal, des esprits excellens en toutes autres choses, mais qui, absolument incapables de concevoir certaines notions, ne peuvent, en aucune sorte, y consentir, quoique rien ne les surpasse en clarté. Ces frappans exemples de la foiblesse et de la limitation de l'esprit humain nous sont donnés pour nous apprendre à nous défier de notre propre jugement, et pour nous faire comprendre la nécessité d'une règle supérieure à notre raison, si débile, si incertaine, si bornée.

le Ier livre; IV éclaircissement, tom. IV, p. 48. Paris, 1721.

CHAPITRE XV.

Conformité de la méthode des philosophes avec la méthode des hérétiques.

Dieu est un, et tout dans les œuvres de Dieu et dans l'ordre qu'il a établi porte ce grand caractère d'unité qui lui est propre. Plus la pensée de l'homme s'étend, plus il découvre de rapports, et plus aussi il aperçoit leur liaison entre eux, et avec la loi universelle d'où ils découlent. Depuis l'athée qui ne voit des effets isolés et sans nombre, jusqu'à que l'esprit qui contemple la première cause de tous les effets, il existe des degrés infinis d'intelligence, qui se développe et s'élève à mesure qu'elle approche de la vérité ellemême, de l'éternelle et immuable unité. Je suis la voie, la vérité, la vie', a dit la Vérité

I

Ego sum via, et veritas, et vita. Joann. XIV, 6.

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