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$ CXLVII.

2. L'ancienne et la nouvelle loi.

La loi de l'Ancien Testament se divisait en trois parties: en loi morale, loi rituelle et préceptes judiciaires, selon qu'elle se rapportait aux actes moraux du peuple juif, aux cérémonies du culte institué par Moïse, ou aux droits politiques de la théocratie judaïque. Cette division, expressément marquée dans le Deutéronome (1), répond évidemment aux trois ordres de pouvoirs divins dont Jésus-Christ a investi son Église, dans la nouvelle alliance. Relativement à la durée de leur force légale, il existe, entre ces trois éléments de la législation ancienne, une différence notable. Il n'y a d'immuable et d'éternel que les prescriptions morales (2); elles renferment en principe la haute loi morale que le Christ, dans son apparition parmi les hommes, est venu accomplir et non abolir (5), compléter et non supprimer (4).

Il en est tout autrement des autres préceptes de la loi ancienne; les principes liturgiques du Lévitique et du Deutéronome n'étaient que l'ombre et la figure du culte futur, et devaient s'effacer et disparaître aux premiers rayons du soleil de justice. Ainsi, non-seulement ces pratiques sont mortes pour le nouveau peuple de Dieu, mais leur observation actuelle donnerait la mort, parce qu'elle serait une grave prévarication contre la loi nouvelle (5). On pourrait peut-être nous opposer ici une objection tirée de la conduite des apôtres et de celle de l'Église primi

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(1) Deuter. VI, 1. Hæc sint præcepta, ceremoniæ et judicia. Thom. Aquin., Summa theol. I, 2, q. 99, art. 5 (edit. Paris., tom. II, col. 764). (2) Thom. Aquin., loc. cit., q. 100, art. 8, col. 701. — Schmalzgrueber, Jus eccl. univ. Dissert. procm., n. 95, tom. I, p. 24. (3) Ev. Matth. V, 17. Tertull. adv. Marcionem, c. 36. Resciditue Christus priora præcepta non occidendi, non adulterandi, non furandi, non falsum testandi, diligendi patrem et matrem? An et illa servavit et quod deerat, adjecit? Catech. Roman. P., 3, c. 1, n. 3, de Dei præceptis. Devoti, Jus canon. univ. Proleg., c. 14, § 9 (tom. I, p. 300). (4) Thom. Aquin., loc. cit., q. 107, not. 2, col. 888. (5) Augustin., Epist. 82, n. 18, col. 283.

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tive; Paul, qui soumit Timothée à la circoncision et allait luimème, comme Nazaréen, prier dans le temple, blâmait le prince des apôtres en l'accusant de judaïser, parce qu'il forçait les idolatres convertis d'observer le cérémonial du culte mosaïque (§ 87). Cette apparente contradiction a donné lieu à une correspondance instructive pour la postérité entre saint Jérôme et saint Augustin (1). Bien que celui-ci, tout évêque qu'il était, soumît volontiers son jugement à celui du prêtre Jérôme (2), il maintint néanmoins énergiquement son interprétation, qui pouvait seule sauver l'honneur de la sainte Écriture (3). Sa manière de voir a été partagée aussi par saint Thomas d'Aquin (4).

Augustin ne distingue que deux périodes dans l'histoire des lois rituelles de l'ancienne alliance, tandis que Jérôme en admet trois (5). Ces lois restèrent en pleine vigueur jusqu'à l'accomplissement de l'œuvre rédemptrice du Christ; elles furent dès lors virtuellement abolies. Mais la synagogue défunte était encore là comme un cadavre gisant sur la terre; elle méritait, comme précurseur de l'Église, d'être au moins ensevelie d'une manière décente. Tant que les apôtres donc vécurent parmi les Juifs, ils devaient à l'origine de la loi, qu'ils considéraient avec raison comme divine, de ne pas la vouer au déshonneur et au mépris ; ils devaient l'observer fidèlement parmi les Juifs pour ne pas les éloigner, mais ils l'abandonnaient parmi les païens. Cependant,

(1) Augustin. Ep. 28, c. 3, ann. 394 vel 395 (edit. Paris., tom. II, col. 112; Hieronymi Opera, ep. 56, tom. I, col. 566). Ep. 10, c. 3, ann. 597, col. 566 (Hieron. Ep. 102, ann. 402, col. 830 (Aug. Op., ep. 68, col. 258); ep. 105, ann. 403, col. 834 (Aug. Op., ep. 72, col. 245). Augustin. Ep. 70, ann. 407, col. 245 (Hier. Op., ep. 110, col. 904). — Hier. Ep. 112, c. 3, ann. 404, col. 916 (Aug. Ep. 75, col. 251). Augustin. Ep. 82, ann. 405, col. 275 (Hier. Op., ep. 116, col. 656). Möhler, Vermischte Schriften, vol. I, p. 1-18.

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(2) Augustin. Ep. 82, c. 4, n. 3, col. 290: Quanquam enim secundum honorum vocabula quæ jam Ecclesiæ usus obtinuit episcopatus presbyterio major sit, tamen in multis rebus Augustinus Hieronymo minor est.

(3) Can. Ego solis, 5. Can. Si ad scripturas, d. 9 (Augustin. Ep. 82, not. 6).

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- Augustin. Ep.

(4) Thom. Aquin., Summa 1. 2, q. 103, art. 4, col. 850. 260, ad Oceanum, n. 5, col. 779. Möhler, loc. cit., p. 16.

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(5) Lupoli, Prælectiones jur. eccles., tom. I, p. 228 sqq.

III.

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par égard pour les Juifs, les apôtres prescrivaient aux Gentils de s'abstenir des mets offerts aux idoles, du sang, des chairs étouffées et de la fornication (1), que les païens ne considéraient pas comme un crime (2). Mais, une fois les apôtres éloignés de la Judée, le chrétien qui eût encore obéi aux lois cérémoniaires du culte juif, au lieu d'être encore un membre pieux du convoi funèbre, n'aurait plus été qu'un criminel profanateur du tombeau (3). Toutefois on ne saurait accuser l'Église de s'être rendue coupable de ce crime, en conservant dans sa législation quelquesunes des cérémonies judaïques, comme, par exemple, la consécration des édifices destinés au culte divin. Ces pratiques n'ont plus, comme autrefois, le caractère d'une prescription divine, mais seulement celui d'un droit humain (4). Elles ont, d'ailleurs, reçu de la foi de l'Église une tout autre signification (5).

Il en est tout à fait de même pour les prescriptions de l'ancienne loi relatives aux droits et aux prérogatives de la théocratie juive. Elles n'avaient pas, il est vrai, le caractère figuratif des lois rituelles; leur objet essentiel était de façonner le peuple hébreu pour la société chrétienne (6). A la déchéance de la synagogue, elles tombaient naturellement en désuétude; cependant l'Église, en vertu du pouvoir législatif qui lui est propre, a fait revivre plusieurs de ces prescriptions qu'elle a jugées utiles aux fins de sa mission divine (7).

(1) Act. Apost. XV, 20.— Lupoli, loc. cit., p. 231. J. Spencer, de Legibus Hebræorum ritualibus, diss. in Act. XV, 29, p. 435 sqq.

Il est évident que ce dernier point, la défense de la fornication, n'est pas un de ceux que les apôtres ont réglé par pur égard pour les Juifs. (Note du Traducteur.) sqq., col. 852.

(2) Thom. Aquin., loc. cit., q. 10, 3, art. 4 (3) Augustin. Ep. 82, c. 2, n. 16, col. 282.

(4) Schmalzgrueber, loc. cit., n. 95, p. 24. Devoti, loc. cit., not. 2. p. 299.

(5) Augustin. contra Faustum, lib. XX, c. 25 (tom. VIII, col. 386). (6) Galat. III, 24.

(7) Par exemple: Exod. XXI, 14, in Cap. Si quis, X, de Homic. (V, 12), 16, in Cap. Qui furatur, 1, X, de Furtis (V, 18), 18 sqq., in Cap. Si rixaii, 1, X, de Injur. (V, 56); XXII, 2, in Cap. Si perfodiens, 3, X, de Homic. supra § 56); 16, in Cap. Si seduxerit, 1, X, de Adult. (V, 16).

La loi nouvelle est venue avec Jésus-Christ prendre la place de l'ancienne, dont elle est l'accomplissement et dont elle se distingue par les dénominations caractéristiques (1) de loi de foi (2), loi de l'esprit de vie (3), loi de grâce ou simplement grâce (4), loi d'amour (5), loi de liberté (6), loi nouvelle (7). Cette loi sc compose principalement d'un grand nombre de prescriptions morales (8), telles que, par exemple, l'amour des ennemis; puis, de préceptes cérémoniaires pour l'oblation du sacrifice de la nouvelle alliance et l'administration des sacrements en général. Elle ne contient pas de prescriptions juridiques proprement dites; le Christ a institué une royauté spirituelle pour le gouvernement de son Église et donné à son royaume, par l'établissement de principes fondamentaux, une constitution fixe et immuable dans ce qui touche à ses éléments généraux. Cette puissance gouvernementale, d'institution divine, implique donc nécessairement le pouvoir législatif (§ 66), et elle fait, en vertu de son mandat divin, toutes les lois, prescriptions et règlements qui lui paraissent appropriés, selon la différence des lieux et des temps, à l'éducation du genre humain. Ses œuvres législatives ne sont pas divines en elles-mêmes, elles ne constituent qu'un droit humain, mais un droit humain intimement uni au droit divin, en ce qu'il en émane comme de sa source. Dans ce sens, ce sont par-dessus tout les traditions apostoliques, se rattachant immédiatement à l'Évangile, qui ont servi à former le point de jonction entre le droit divin et le droit canonique.

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§ CXLVIII.

3. Evangile et canon.

Si ce principe, Salus populi suprema lex esto (1), est vrai et applicable quelque part, c'est dans l'Église chrétienne, royaume fondé par le divin Rédempteur. Cette Église n'a d'autre sollicitude, d'autre ambition, que le bonheur de tous les hommes qu'elle porte dans son sein. Là sont le principe suprême et le terme de toutes les prescriptions de la nouvelle alliance, promulguée dans l'Evangile. Ces prescriptions aboutissent toutes à ces deux points de vue l'homme doit penser d'une manière qui soit digne de Dieu, c'est-à-dire, croire en lui, et il doit agir conformément à cette croyance (2). L'Évangile étant la mesure et la règle suprême de ces deux ordres de devoirs, il est, par là même, le véritable, l'universel canon (3).

C'est en se réglant sur ce canon du grand architecte, le Christ, que les Apôtres, avec le secours de l'Esprit-Saint, ont posé les premières assises de l'Église (4), et qu'ils ont donné une série nombreuse de prescriptions, émanant des sources évangéliques et, conséquemment, s'harmonisant avec elles, pour servir de base, à leur tour, dans la construction ultérieure de l'Église chrétienne. Ils ont établi des règles (5) pour que tout fùt à la place convenable et que, chaque partie de leur œuvre s'adaptant parfaitement à l'ensemble de cette même œuvre (6), aucune

(1) Cavallari, Institutiones juris canonici. Proleg., c. 1 (tom. I, p. 5). (2) Hormisd. P., Reg. fid. in Epist. 10 ad Joann. Nicop. Ep. (Hardouin, Concil. II, 1030): Prima salus est, regulam rectæ fidei custodire et a constitutis Patrum nullatenus deviare. Nicol. I, P., Respons. ad Consult. Bulgar. 1 (Hardouin, loc. cit., V, 353): In fide et bonis operibus lex Christianorum subsistit. Lupoli, Prælectiones juris ecclesiastici, tom. I, p. 203. Devoti, Jus canon. univ. Proleg., c. 13, § 5, tom. I, p. 289. (3) Supra § 3. 176 p. sqq. - Devoti, loc. cit., § 1, not. 2, p. 287. - Bened. XIV, de Synod. diœc., lib. 1, c. 3, n. 2. (4) Cavallari, loc. cit., § 5, p. 3.

Lupoli, loc. cit.,

(5) Can. Regula. 2, d. 3 (Isid.).

(6) I Cor. XIV, 40. Cum ordine et decenter.

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