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Ce n'était pas, d'ailleurs, pour des opinions que les martyrs souffraient et mouraient avec une tranquille constance; et c'est là une observation des plus importantes. Mais ils souffraient et mouraient pour des faits éclatans et publics, dont la certitude était à la portée de tous les esprits. On peut s'entêter pour des opinions; mais un homme sensé ne s'entête pas jusqu'à sacrifier sa vie pour attester qu'il a vu ce qu'il n'a pas vu: il faudrait pour cela être enragé, suivant l'expression de l'auteur lui-même des Pensées philosophiques; et cette fureur, pût-elle s'emparer d'un homme, de quelques hommes, ne peut évidemment devenir la manie universelle d'hommes innombrables, de tout âge, de toute condition et de tout pays. Or, les premiers martyrs chrétiens sont morts pour des faits qu'ils avaient vus et touchés de leurs mains: ainsi sont morts les Apôtres, et les autres premiers disciples de JésusChrist; et une foule de chrétiens, immolés dès le commencement de l'Église, avaient été aussi témoins oculaires des miracles de Jésus-Christ ou de ceux des Apôtres. Ceux qui sont morts immédiatement après, attestaient qu'ils avaient appris ces mêmes faits de témoins oculaires qui avaient scellé de leur sang leur témoignage. Les martyrs suivans ont transmis ce même témoignage, de sorte que leurs diverses générations perpétuent la chaîne de dépositions irrécusables en faveur des faits qui étaient le fondement de leur religion. Peut-on trouver ailleurs rien de semblable ?... Les prétendus martyrs des

autres religions, qu'avaient-ils vu? Qu'avaient-ils entendu ? Que pouvaient-ils attester ?... Différence décisive entre eux et ceux du Christianisme, et d'autant plus que nos martyrs étaient des hommes de tous les âges, de tous les caractères, de tous les états; qu'ils souffraient, non dans les accès d'un enthousiasme furieux, mais avec tout le sang-froid de la réflexion et une inaltérable patience; qu'ils se soumettaient librement, non à une mort prompte et facile, mais aux plus effroyables douleurs, au milieu des tortures les plus lentes et les plus recherchées (Exquisitissimis pœnis, ditTacite, Annal. lib. XV, c. 44); et qu'ils les enduraient, non avec un certain courage, mais avec une sérénité si merveilleuse, qu'elle touchait les païens et les bourreaux et les attirait à la Religion plus efficacement qu'ils n'en étaient détournés par la crainte des supplices. En vérité, Dieu pouvait-il se choisir des témoins plus dignes de lui, et donner à leurs souffrances et à leur mort des traits plus manifestement surhumains?

S VI. Perpétuité de l'Église.

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Allez, dit Jésus-Christ à ses Apôtres, avant de >>> les quitter; enseignez toutes les nations, les bap>> tisant au nom du Père, et du Fils, et du Saint>> Esprit ; leur enseignant à garder tout ce que je » vous ai confié; et voilà que je suis avec vous, » tous les jours, jusqu'à la consommation des siè»cles (Matth, XXVIII, 19, 20). »

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Que cette promesse de Jésus-Christ est grande et humainement incroyable! Qu'une société d'hommes doive avoir une immuable durée ! Qu'il y sous le Ciel quelque chose qui ne change pas ! Toutes les autres puissances s'élèvent et tombent; après avoir étonné le monde, elles disparaissent. Que sont devenus ces Romains qui persécutaient l'Église? Ce peuple, qui se vantait d'être le peuple-roi, a été livré aux nations barbares : cet empire, qui se flattait d'être éternel, s'est écroulé. Rome est enseve'ie dans ses ruines avec ses divinités : il n'en reste plus de mémoire que par une autre Rome sortie de ses cendres, qui est devenue à jamais le centre du royaume de l'Homme-Dieu.

Cependant Jésus-Christ a prédit que son Église serait persécutée par les puissances du monde; qu'elle serait déchirée par les schismes et par les hérésies; qu'il y aurait des vices et des scandales jusqu'à la fin,

Il est sensible qu'étant ainsi attaquée de toutes parts, elle ne pouvait pas plus subsister, qu'elle n'a vait pu s'établir, sans le secours d'une main toutepuissante, et sans une protection divine continuelle. Il fallait qu'elle trouvât tout l'univers conjuré contre elle; qu'elle parût sur la terre sans force, sans secours humain; et qu'elle triomphât cependant de toutes les doctrines répandues sur la surface du globe, et de tous les obstacles que les hommes ont opposés à sa conservation, pour leur persuader que c'était l'ouvrage de Dieu seul. La Providence a permis ces obstacles pour convaincre le monde, par une

si longue expérience, que l'Église, qui ne doit son établissement ni au crédit, ni à la force, ni à l'éloquence, ni à l'intérêt, ne doit sa durée qu'à la main invisible dont elle est soutenue.

Sans cette protection divine,

Elle aurait dû périr sous le glaive des persécuteurs qui, durant 300 ans, se sont efforcés de l'étouffer dans son berceau. Mais les persécutions, au lieu de la détruire, n'ont servi qu'à l'étendre et à la multiplier. L'Église est demeurée libre dans ses chaînes, et invincible au milieu des tourmens: Dieu, nous l'avons vu, a inspiré à une foule de héros un courage et une patience bien supérieurs à notre faible nature; et l'admiration qu'ils excitaient a converti leurs bourreaux mêmes.

Elle aurait dû périr par les efforts des hérétiques. qui ont successivement attaqué les divers dogmes de la foi; mais leurs efforts, souvent appuyés de toute la puissance des Empereurs et des Rois, loin de les altérer, n'ont servi qu'à les affermir et à les mettre dans un plus grand jour. Dieu a suscité une foule de saints Docteurs pour confondre chaque erreur, aussitôt qu'elle a paru; il a facilité la tenue des Conciles, où la nouveauté a été solennellement proscrite, où la tradition pure de la révélation a été consacrée par des décisions authentiques, et attachée à des expressions précises, qui ont écarté toute équivoque, tout subterfuge. Chose admirable! Toute la question contre les hérétiques s'est toujours réduite à un fait précis et notoire que croyait-on et qu'ensei

gnait-on, quand vous êtes venus? Et jamais il n'y a eu d'hérésie qui n'ait trouvé l'Église en possession de la doctrine contraire : c'est un fait constant, public, universel et sans exception.

Elle aurait dû périr par les scandales et par le relâchement qui se sont introduits, dans certains temps, parmi ses enfans et même parmi ses ministres. Voici, à cette occasion, ce que Madame de Sévigné écrivait à Monsieur de Coulanges, qui se trouvait à Rome, lors de la tenue d'un Conclave: «<Vous >> vous sentez embarrassé dans votre religion, sur » ce qui se passe à Rome et au Conclave. Mon pau» vre cousin, vous vous méprenez; j'ai ouï dire » qu'un homme d'un très bon esprit tira une con>>> séquence toute contraire, au sujet de ce qu'il voyait » dans cette grande ville. Il en conclut qu'il fallait >> que la Religion chrétienne fût toute sainte et toute >> miraculeuse, de subsister ainsi par elle-même, au >> milieu de tant de désordres et de profanations. >> Faites donc comme lui; tirez les mêmes consé>>quences, et songez que cette même ville a été bai>>gnée autrefois du sang d'un nombre infini de » martyrs; qu'aux premiers siècles toutes les intri>> gues du Conclave se terminaient à choisir, entre » les prêtres, celui qui avait le plus de force pour » soutenir le martyre; qu'il y a eu 37 Papes qui le

souffrirent, l'un après l'autre, sans que la certi>>tude de cette fin leur fit fuir ou refuser une place » où la mort était attachée; et quelle mort! Vous » n'avez qu'à lire cette histoire pour vous persuader

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