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révéler son être, car le langage même n'est que l'expression générale de l'être, ou de l'Etre universel; et l'on ne sauroit parler sans nommer Dieu, puisqu'on ne sauroit parler sans prononcer ou sans concevoir le mot est ; et ce mot merveilleux, le verbe, raison du langage comme le Verbe substantiel est la raison de l'Etre infini, est dans le discours ce que Dieu même est dans l'univers, le fonds dont tout émane, le lien qui unit tout, la lumière, la vie, et l'expression propre de la certitude, puisqu'il n'y a même pas d'autre affirmation.

Ainsi l'homme n'a pu exister comme être intelligent, n'a pu parler sans connoître Dieu, et ne l'a pu connoître que par la parole. Donc il est impossible que la parole soit une invention de l'homme. Et si l'on en veut une autre preuve puisée dans sa nature particulière, qu'on observe qu'attendu la liaison intime des deux substances, la pensée, comme toutes les autres opérations humaines, a ses organes propres; en sorte qu'à chaque pensée correspond une certaine modification du cerveau, par conséquent quelque chose de sensible, tel que la parole, qui, soit orale, soit écrite, a rapport à plusieurs de nos sens. Une idée donc sans expression, seroit une idée qui ne formeroit point de trace dans le cerveau, qui n'af

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fecteroit point l'organe de la pensée; ce qui est contradictoire. Nous nous représentons les objets sensibles à l'aide de leurs images; les mots sont les images des idées.

Donc, par une suite de sa nature, l'homme, être corporel et intelligent, ne peut pas plus penser sans mots, que voir sans lumière (*); donc il n'a pu inventer la parole, puisque cette invention suppose des idées préexistantes, et le besoin, et même le moyen de les communiquer. Donc il a fallu qu'il reçût à la fois et les idées et les mots ; car les mots étant d'institution arbitraire, ne réveillent nécessairement par eux-mêmes aucune idée, comme cela se voit tous les jours de peuple à peuple par la diversité des langues.

Ainsi la pensée, la parole, ont été révélées simultanément; et comme toutes vérités sont en Dieu, qui les connoît ou se connoît lui-même, par sa pensée, sa parole, son Verbe; la parole extérieure n'est que le moyen de communication. entre notre intelligence et la parole divine, ou la vérité essentielle; et soit que nous remontions à l'origine de la race humaine, soit que nous en con

(*) Sur l'impossibilité que l'homme ait inventé le langage, voyez l'excellente dissertation de M. de Bonald. Recherches philosophiques, tom. I.

sidérions à part chaque individu, la parole, le verbe est véritablement, et en tous sens, la lumière qui éclaire tout homme venant en ce monde (1), et ce souffle de vie qui anime son intelligence (2).

Mais, , pour mettre en sa pleine évidence la grande loi de l'autorité, et la réduire à un fait palpable; qui doute que l'homme ait reçu, au moment où il sortit des mains du Créateur, tout ce qui lui étoit nécessaire pour se conserver et se perpétuer comme être intelligent, aussi-bien que comme être physique? Donc la pensée, donc la vérité, donc la parole, nécessaire au moins pour communiquer la pensée et transmettre la vérité, noble héritage de vie substitué à toutes les générations humaines; et cette première révélation, en nous expliquant notre existence, incompréhensible sans elle, explique encore notre intelligence, et nous en montre le fondement dans les vérités essentielles reçues à l'origine, et invinciblement crues sur le témoignage de Dieu, dont l'autorité devient ainsi la base de la certitude, et la raison de notre raison.

(1) Erat lux vera, quæ illuminat omnem hominem venientem in hunc mundum. Joan. I, 9.

(2) Et inspiravit in faciem ejus spiraculum vitæ, et factus est homo in animam viventem. Gen. II, 7.

Dieu ne dira pas tout à l'homme, mais il lui dira tout ce qu'il est nécessaire qu'il sache, et qu'il ne peut apprendre que de lui. Il lui révèle d'abord son être, sans quoi la pensée comme la parole seroient impossibles; il lui révèle les rapports qui existent entre lui et Dieu, entre lui et ses semblables, parce qu'il doit vivre en société avec Dieu et avec ses semblables, et qu'il ne peut même vivre que dans cette société; et l'on voit ici la raison de ce mot profond de l'Evangile : Cherchez premiè rement le royaume de Dieu et sa justice, et le reste vous sera donné par surcroît (1). Le royaume de Dieu, c'est la société des intelligences dont il est le monarque; et sa justice, c'est l'ordre ou la réalisation de la vérité. Voilà l'unique nécessaire (2). Le reste, qui n'a de rapport qu'aux organes et à un point imperceptible de notre existence, nous est donné par surcroît. Peu digne d'occuper la pensée, et moins encore de fixer l'amour d'une créature qui connoît et contemple Dieu, le monde physique marche sans notre concours et pourvoit à nos besoins selon des lois invariables, comme si le Tout-puissant lui eût dé

(1) Quærite ergo primùm regnum Dei, et justitiam ejus et hæc omnia adjicientur vobis. Matt. VI, 33. (2) Porrò unum est necessarium. Luc. X, 42.

fendu de troubler dans ses hautes fonctions l'être

qu'il fit à son image; et telle est la grandeur de l'homme, que l'univers tout entier a été livré, comme un jouet, à sa dispute (1).

Mais la vérité, mais Dieu ne s'est pas révélé à l'homme seulement pour être l'objet d'une stérile contemplation. Actif par sa nature, et assujetti à des devoirs comme être social, si l'homme connoît c'est pour agir, par conséquent pour aimer; car l'amour est le principe naturel d'action. La vérité naît dans l'entendement par la parole; mais une fois connue, elle produit l'amour, qui détermine les actes par lesquels nous concourons librement au maintien de l'ordre de la société établie entre Dieu et nous, entre nous et les autres hommes. Il y a donc des vérités ou une loi morale écrite dans le cœur ; vérités qu'on appelle de sentiment, non qu'il en soit le principe, mais parce qu'il en est l'effet, parce qu'elles sont tout ensemble, et par une sorte d'union substantielle, lumière dans l'esprit et amour dans le cœur. Toutes les vérités qui doivent régler immédiatement la conduite sont de cette classe ; donc les vérités sociales, et rien les vérités sociales; les erreurs oppo

que

(1) Mundum tradidit disputationi eorum. Eccles.,

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