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des et dans les lacs des hérétiques, et demeurer dans la foi et dans la sainte doctrine, il faut avec le secours de Dieu appuyer sa foi sur deux fondements: premièrement, sur l'autorité de la loi divine; secondement, sur la tradition de l'Eglise catholique, l'universalité, l'antiquité et le consentement universel des Eglises. Que doit donc faire un homme qui veut être catholique? Si quelque partie de l'Eglise s'est séparée de la communion de la foi universelle, il doit préférer la santé de tout le corps à la pourriture et à la maladie d'une partie et si quelque nouveau poison s'efforce de s'emparer non seulement d'une petite partie, mais de presque toute l'Eglise, il s'attachera en ce cas à l'antiquité, qui ne peut être séduite par le mensonge de la nouveauté. Si enfin il ne se trouve dans l'antiquité que deux ou trois personnes, ou même une ville et une province qui aient eu des sentiments particuliers, il aura soin de préférer à la témérité ou à l'ignorance de quelques-uns les dogmes reçus universelle ment dans l'ancienne Eglise, s'il y en a sur ce point. Si enfin il s'élève quelque question qu'on ne puisse décider de cette manière, alors il aura soin de consulter et de comparer ensemble les sentiments des anciens qui ont vécu dans différents lieux et dans différents temps, et qui ayant toujours été reçus dans la communion et dans la foi de l'Eglise catholique, doivent être considérés comme maîtres recevables, et ce qui se trouvera qu'ils auront non pas un ou deux seulement, mais tous d'un consentement unanime ouvertement, fréquemment, persévéramment tenu et enseigné, doit être cru sans aucun doute.» Cette règle est un préservatif général contre les hérésies, les schismes et les erreurs, et le moyen sûr de les éviter. Ce qui fait que l'on y tombe est qu'au lieu de la suivre on préfère le raisonnement à l'autorité de l'Ecriture sainte et de la tradition. On veut juger des mystères par les principes de la raison et de la philosophie. C'est ce qui a fait dire souvent aux Pères que les philosophes étaient les patriarches des hérétiques.

La seconde cause des hérésies est qu'on se fie trop à ses propres lumières pour l'intelligence de l'Ecriture sainte, sans consulter la tradition ni l'Eglise. La plupart des hérésies ne sont venues que de l'Ecriture sainte mal entendue; et il n'y a point eu d'hérétique qui u'ait prétendu soutenir son erreur par des passages des livres sacrés. « Mais ces personnes, comme remarque saint Hilaire (1), donnent aux paroles divines, dont la simplicité est admirable, le sens qu'elles veulent, et les interprètent d'une manière opposée à la force des termes. Car ce qui fait l'hérésie, ce n'est pas l'Ecriture sainte, mais la manière dont elles l'entendent; ce ne sont pas les paroles, c'est leur sens qui est criminel: De intel

(1) S. Hilarius, l. 1, de Trin. Exstiterunt enim plures, qui elestium verborum simplicitatem pro voluntatis sure sensu pon pro veritatis ipsius absolutione susciperent, aliter interpretantes quam dictorum virtus postularet. De intelligentia enim hæres.s, non de Scriptura est: et sensus non no fh crinkų.

ligentia enim hæresis, non de Scriptura est; et sensus, non sermo fit crimen.» Če Père d't encore en un autre endroit (1) que a les héréti ques s'imaginent soutenir leurs sentiments par de bonnes raisons, parce qu'ils appuient ioules leurs propositions par des témoignages des livres sacrés, dont ils corrompent le sens pour donner quelque apparence de vérité à leurs opinions, et tromper par là les ignorants.» « Ce n'est pas, comme dit Vincent de Lérins (2), que le canon des livres sacrés ne soit parfait, et qu'il ne soit plus que suffisant; mais le sens de l'Ecriture sainte étant trèsrelevé, tout le monde ne l'interprète pas de la même manière, les uns y donnant un sens, les autres un autre. Novatien, Photin, Sabellius, Donat, Arius, Eunomius, Macédonius, Apollinaire, Priscillien, Jovinien, Pélaga, Celestius et Nestorius, l'entendent chacun de leur manière. C'est à cause de ces différentes erreurs qu'il faut que l'interprétation prophétique et apostolique soit réglée par le sens universel de l'Eglise, par l'antiquité, par l'universalité, par le consentement à toutes les Eglises du monde. » C'est par ce moyen que l'on évite les écueils où tombent ceux qui se fiant à leurs propres lumières, interprètent l'Ecriture sainte selon leur propre sens, ce qui se doit entendre, comme nous l'avons remarqué, dans les choses qui regardent la foi et la doctrine des mœurs.

Troisièmement, la trop grande curiosité a souvent jeté les hommes dans l'erreur. Ils veulent pénétrer et développer des mystères obscurs et impénétrables. Au lieu de s'en tenir à la simplicité de la foi, ils veulent subtiliser; ils se plaisent à se former des difficultés et des questions obscures et difficiles, et se perdent en les voulant résoudre. Ils passent de question en question, et ces questions dégénèrent en des disputes si métaphysiques et si abstraites, que personne n'y entend rien. Enfin à force de vouloir subtiliser et approfondir les matières, n'ayant plus de règle certaine, ils s'écartent de la vérité, et parlent un langage inconnu aux apôtres et aux Pères. C'est par là qu'Abailard," Roscelin, Gilbert de la Porrée et tant d'autres se sont insensiblement engagés dans des opi

(1) Idem, ibid., lib.IV.Videntur (hæretici) sibi de singulis quæ asserunt præstare rationem, quia singulis assertionibus suis quædam ex divinis voluminibus testimonia subdiderunt que corrupto intelligentiæ sensu solis tantum ignorantibus blandiantur, speciem veritatis secundum pravitatem interpretantium præstitura.

(2) Vincent. Lir. in Commonit. adver. Hæret. Cum sit perfectus scripturarum canon sibique ad omnia satis superqie sufficiat, quid opus est ut ei ecclesiasticæ intelligentie jungatur auctoritas? Quia videlicet Scripturam sacram pro ipsa sua altitudine non uno eodemque sensu universi accipiunt; sed ejusdem eloquia aliter atque aliter, alius atque alius interpretatur; ut pene quot homines sunt, tot illine Sententie erui posse videantur. Aliter namque illam Novatianus, aliter Photinus, aliter Sabellius, aliter Donatus exponit aliter Arius, Eunomius, Macedonius, aliter Apollinaris, Priscillianus, aliter Jovinianus, Pelagius, Cule.dius, aliter postremo Nestorius. Atque idcirco multum necesse est, propter tantos tam varii erroris aufractus, ut propheticæ et apostolicæ interpretationis linea secundum eccle siastici et catholici sensus normam dirigatur. In ipsa ite catholica Ecclesia magnopere curandum est, ut id teneamus quod ubique, quod semper, quod ab omnibus ert átum est.

nions erronées que l'on a été obligé de proscrire. Le moyen de ne point tomber dans cet excès est de s'en tenir précisément à la foi de l'Eglise; de l'exposer dans les termes que l'Ecriture sainte, les conciles et les Pères l'ont exposée, et d'éviter toutes les questions obscures et subtiles sur le quomodo, comme nous avons déjà remarqué.

La quatrième cause qui porte les hommes à s'éloigner de la vérité, c'est le trop grand allachement pour ses maîtres ou pour les sentiments d'un auteur. Cette prévention fait que l'on n'examine plus la vérité avec le désintéressement nécessaire, et que non seulement on embrasse aveug'ément des opinions fausses, mais qu'on les défend avec chaleur, qu'on les outre et qu'on les porte à un excès qui devient très-dangereux. Un principe sera soutenable; cependant pour combattre un adversaire on en tire une conséquence erronée, quelquefois sans examiner si la conséquence est nécessaire ou non. La prévention et la chaleur de la dispute font embrasser et soutenir la conséquence, toute erronée qu'elle est, en sorte qu'il arrive que les maîtres ne sont point dans l'erreur, et que des disciples y tombent en soutenant leurs sentiments. Pour éviter cet écueil il ne faut jamais agir par esprit de parti, et quelque respect que l'on ait pour ses maîtres, examiner toujours leurs sentiments par les règles, et les soutenir sans chaleur et sans entêtement.

Cinquièmement, l'invention de nouveaux termes et de nouvelles manières de parler pour expliquer les mystères porte souvent à l'erreur. Rien n'est plus nécessaire pour conserver la pureté de la foi que la propriété des expressions. Car, comme dit saint Augustin, il n'en est pas de même des théologiens comme des philosophes ceux-ci ont la liberté de se servir des expressions qu'ils veulent, et ils ne craignent pas comme les premiers d'offenser les oreilles pieuses en expliquant des choses très-difficiles. Pour nous il nous faut toujours parler suivant une règle exacte. Liberis verbis loquuntur philosophi, et in rebus ad intelligendum difficillimis offensionem piarum aurium non pertimescunt: nobis autem ad certam regulam loqui fas est. On a tenu dans l'Eglise comme suspects d'hérésie ceux qui ne voulaient pas se servir des termes consacrés par l'usage de l'Eglise ou par les définitions des conciles, et il est bien à craindre que ceux qui inventent de leur chef de nouveaux termes, et qui se servent de nouvelles manières pour exprimer les mystères, ne tombent dans l'erreur.

Les visions et les révélations des particuliers sont souvent cause de la séduction des hommes. Il faut y joindre les fausses histoires et les faux miracles, qui peuvent être complés pour la sixième cause. Mais rien en ce genre n'a causé plus d'erreur que les expressions des mystiques. Une infinité de gens ont été entraînés dans des erreurs par ces trois voies. On peut voir là-dessus Gerson dans ses ouvrages de l'examen de la doctrine, de l'épreuve dos esprits et de la distinction

des vraies et des fausses visions, sa lettre sur le traité de Jean de Rusbroeck et l'apologie qu'il en fait, où il traite amplement de ces points et enseigne en même temps les moyens de ne s'y pas laisser tromper. C'est pourquoi nous ne nous étendrons pas davantage sur cet. article.

Nous ne parlerons point non plus des causes morales des erreurs qui viennent plutôt de la corruption du cœur que de la séduction de l'esprit, telles que sont l'ambition, la vanité, l'intérêt et les autres passions qui ont souvent porté les hommes à se faire chefs de sec-te, à enseigner des nouveautés et à se séparer de l'Eglise. Les anciens temps et les modernes nous en fournissent une infinité d'exemples, et il est rare que quelques-unes de ces passions n'aient possédé les premiers hérésiarques. La coutume, l'habitude, le point d'honneur, les liaisons d'amitié retiennent aussi bien des gens dans l'hérésie, qui en sortiraient s'ils étaient délivrés de ces liens, et qui préféreraient leur salut et la vérité à toute autre chose. L'esprit de désobéissance, le désir de secouer le joug des lois, et de se délivrer des peines, des austérités et des autres pratiques pénibles de l'Eg'ise, le libertinage et la licence d'enfreindre le vœu du célibat, ont été encore des motifs qui ont dans les derniers temps porté bien des personnes à sortir de l'Eglise. Par une raison contraire, les mœurs déréglées des catholiques, et principalement l'ignorance et le déréglement des ecclésiastiques, le relâchement de la discipline de l'Eglise, les superstitions assez communes, les abus dans la distribution des indulgences et des dispenses, en ont porté d'autres plus religieux, mais trop crédules, à quitter l'Eglise pour embrasser des sectes qui faisaient profession de réformer ces abus et de mener une vie tout évangélique. Enfin Dieu qui punit par l'aveuglement de l'esprit les cupidités désordonnées du cœur, Spargens pœnales cæcitates super illicitas cupiditates, prive les pécheurs, en punition de leurs crimes, des lumières nécessaires pour connaître la vérité et pour y persévérer; et s'en rendant indignes par leurs déréglements, ou négligeant de les demander, ils tombent par leur faute dans un aveuglement fatal qui les conduit dans l'erreur.

CHAPITRE XXIII.

De la manière d'étudier, d'enseigner et de traiter la théologic.

Quelque science que ce soit que l'on veuille apprendre, il est nécessaire d'étudier les principes et les fondements sur lesquels elle est établie. La théologic, comme nous avons dit, est fondée sur la révélation, et cette révélation nous est connue par l' Ecriture sainte et par la tradition. Ainsi la principale occupation d'un homme qui veut devenir bon théo logien est d'étudier à fond l'une et l'autre.

La lecture de l'Ecriture sainte est utile à tous les chrétiens pour leur instruction et pour leur édification: mais les théologiens en doivent faire une étude particulière pour

établir les dogmes de la religion, pour réfuter les erreurs et pour y apprendre les règles de la morale chrétienne.

Pour en avoir une parfaite intelligence il faut étudier l'hébreu, le grec et le latin. Mais avant qu'on soit en état de s'appliquer à cette étude il faut avoir quelque connaissance de l'histoire sainte et des livres sacrés. On doit apprendre à tous les enfants dès leur plus tendre jeunesse, et particulièrement à ceux que l'on destine à l'état ecclésiastique, l'histoire de l'Ancien et du Nouveau Testament: c'est une des premières choses qu'on leur doit enseigner. Dans la suite on peut leur faire lire les livres historiques et moraux de l'Ancien et du Nouveau Testament. Mais quand on veut les appliquer à l'étude de la théologie il serait bon de commencer par leur faire lire des prolégomènes qui leur fissent connaître le nombre, la division et les auteurs des livres sacrés, et qui les instruisissent des questions principales sur l'Ecriture sainte; après quoi il faudrait leur faire lire. avec application tous les livres de l'Ancien et du Nouveau Testament, y joignant quelque bon commentaire latin qui les éclaircisse des difficultés qui les peuvent arrêter, et leur donne l'intelligence du vrai sens de l'Ecriture sainte. Ils pourront changer de commentateur chaque fois qu'ils relíront le texte sacré (car c'est une étude qu'il ne faut point interrompre), et choisir sur chaque livre ceux qui ont le mieux réussi. C'en est assez pour ceux qui ne veulent être que médiocrement savants. Mais pour ceux qui veulent savoir à fond l'Ecriture sainte, il faut qu'après avoir appris l'hébreu et le grec, ils lisent les livres de critique des anciens et des modernes sur les livres sacrés ; qu'ils étudient la chronolo gie et la géographie saintes; qu'ils allient l'histoire de l'Ecriture sainte avec l'ancienne histoire profane, qu'ils lisent exactement le texte original et les diverses leçons; qu'ils les comparent avec les versions; qu'ils entreprennent la lecture des commentateurs anciens et modernes, catholiques et protestants, qui en ont expliqué la lettre; qu'ils voient les dissertations qui ont été faites sur les différentes questions qui concernent l'Ecriture sainte; qu'ils examinent toutes les difficultés qui se présentent, et qu'ils découvrent autant qu'il est possible le vrai sens des endroits les plus obscurs des livres saints.

L'étude de la tradition n'est pas moins vaste. Elle comprend trois chefs les écrits des saints pères, les définitions des conciles, l'histoire de l'Eglise. Avant que d'entreprendre de lire de suite les ouvrages des Pères, il est bon d'avoir au moins une teinture de la théologie; mais il est inutile d'employer plusieurs années à la lecture des théologiens scolastiques, il suffit d'avoir lu le Maitre des Sentences, et quelque bon commentateur, comme Estius, ou quelque autre nouveau théologien; il faut en même temps lire quelque abrégé de l'histoire de l'Eglise, dans lequel on puisse apprendre ce qui s'est passé de plus considérable dans chaque siècle, les personnes éminentes en sainteté et en savoir

qui y ont fleuri, les hérésies et les schismes qui s'y sont élevés, les décisions des conciles et les règles les plus générales de la discipline. On doit encore lire les traités particuliers des théologiens nouveaux, soit de controverse, soit de dogme, soit de discipline, pour apprendre quels sont les points controversés, afin d'apercevoir, en lisant les Pères, les choses qui peuvent servir à la décision de ces questions. Avant que d'entre prendre la lecture des ouvrages des pères, il faut nécessairement étudier l'histoire de leur vie, et la critique de leurs ouvrages, afin de ne pas se tromper en prenant un auteur des derniers siècles pour un auteur ancien, et un ouvrage supposé pour un yéritable. Il est même bon de savoir sur quelle matière est composé chaque ouvrage, et d'avoir un sommaire de ce qu'il contient. Cela est d'un grand usage pour lire utilement les Pères. C'est à quoi je crois que ma Bibliothèque des auteurs ecclésiastiques sera de quelque usage. Quand on aura connu par là les auteurs et les ouvrages des pères, on pourra lire d'abord ceux qui sont les plus nécessaires pour s'instruire des vérités essentielles de la religion. On pourra même faire choix de ceux qu'on veut lire par rapport aux différents emplois auxquels on se destine: car tous les ouvrages des Pères ne sont pas également nécessaires à tous les ecclésiastiques. Ceux qui sont obligés d'enseigner les dogmes de la religion s'arrêteront aux traités que les Pères ont faits pour les établir; ceux qui s'appliquent à la discipline ecclésias tique liront les ouvrages qui y ont rapport; ceux qui doivent annoncer la parole de Dieu feront leur étude particulière des homélies des Pères et des autres œuvres morales; chacun choisira ainsi les ouvrages des Pères qui conviennent à sa profession et à son enploi. Mais ceux qui voudront se rendre habiles en tout genre, et savoir à fond la doctrine de l'Eglise, se donneront tout entiers à la lecture des Pères de siècle en siècle. Ils commenceront par lire les écrits des premiers Pères contre les païens, et les apologies de la religion chrétienne, et joindront à cette lecture celle des auteurs modernes qui ont fait des traités sur la vérité de la religion chrétienne. Ils liront ensuite les ouvrages des Pères contre les premiers hérétiques; et en suivant l'ordre des temps ils verront tous les ouvrages polémiques des Pères. Ils auront soin de remarquer les paroles qu'ils y trouveront touchant la discipline de l'Eglise, tant à l'égard des sacrements que par rapport au gouvernement de l'Eglise, et aux coutumes et cérémonies qui ont été en usage dans chaque siècle. Ils ne négligeront pas non plus les traités de morale, et les commentaires sur l'Ecriture sainte, où l'on trouve plusieurs points de doctrine, de morale et de discipline. Enfin i ́s auront soin de tout lire et de ne rien laisser échapper de ce qui peut leur donner quelques lumières pour connaître la doctrine et la discipline de l'ancienne Eglise. Ils continueront cette étude jusqu'au douzième siècle : ils pourront néanmoins se dispenser de lire de

longs commentaires allégoriques sur l'Ecriture sainte de quelques-uns des anciens, et les compilations qui ont été faites par les nouveaux, qui n'ont fait que copier les anciens. Quand ils viendront au temps des scolastiques, après en avoir lu quelquesuns des principaux, et de ceux qui sont considérés comme les chefs des différentes écoles, auxquels ils ne s'arrêteront pas néanmoins un temps considérable; ils passeront de là aux auteurs qui ont renouvelé la littérature dans le quinzième et le seizième siècle. Ils trouveront dans ces deux siècles quantité de bons auteurs et d'ouvrages de conséquence, qu'ils parcourront avec plaisir et avec profit. Ceux qui veulent s'appliquer à la controverse auront une ample matière pour s'exercer. Le dix-septième siècle, fournit encore un grand nombre d'écrivains sur toutes les matières de théologie: mais on aura soin de faire dans ce siècle, aussi bien que dans les précédents, un choix des meilleurs auteurs et des plus excellents ouvrages; car le nombre en est si grand qu'il serait impossible de les lire tous, et il y en a qui ne méritent pas d'être lus. On aura soin à chaque siècle de lire les auteurs ecclésiastiques et profanes qui ont écrit l'histoire du temps. Mais la chose à quoi on doit plus particulièrement s'appliquer est la leciure des actes, des histoires, des réglements et des canons des conciles, tant généraux que nationaux ou provinciaux. On ne peut pas se dispenser de lire les collecteurs des canons, le décret de Gratien, les décrétales, les ordonnances des princes qui concernent l'Eglise, et en général toutes les lois ccclésiastiques. Pour les canonistes, un théoJogien doit être fort sobre dans la lecture de leurs écrits: il suffit d'en lire un petit nombre des meilleurs, sans fatiguer sa vue et son esprit à la lecture de plusieurs gros volumes de leurs ouvrages. Je ne dis rien à présent des ouvrages des casuistes, dont j'aurai lieu de parier en un autre endroit; mais je recommande ici surtout la lecture des auteurs du seizième et du dix-septième siècle qui ont traité des questions particulières de controverse, de doctrine, de discipline ou décrétale, par l'Ecriture sainte et par ia tradition, ou qui ont agité et éclairci des points de discipline. Il y en a un très-grand nombre dans ces deux derniers siècles, où l'on trouve quantité de grandes questions décidées, examinées et traitées avec tout le soin et l'exac titude qu'on peut désirer. Au reste il ne faut pas se borner aux auteurs catholiques, il faut qu'un homme qui veut savoir à fond la théologie lise les écrivains de toutes les sectes indifféremment, soit pour profiter de leurs lumières dans ce qu'ils ont de bon, soit pour connaître leur faible et se mettre en état de les combattre.

Mais comme ces études demandent beaucoup de temps et de loisir, et qu'à peine la vie d'un homme y peut suffire, on est heureux de trouver des maîtres consommés dans les études, qui puissent enseigner aux autres, soit de vive voix, soit par écrit, ce qu'ils ont appris

avec beaucoup de peine et de travail. Chacun peut avoir sa méthode d'enseigner, et il y en peut avoir plusieurs bonnes. Je ne prétends imposer aucune loi à personne : voici seulement un plan de l'ordre et de la méthode que je voudrais que l'on gardât en enseignant la théologie. Il faut supposer que ceux à qui l'on entreprend de montrer la théologie savent les langues, qu'ils parlent bien latin, qu'ils entendent le grec, et qu'ils savent un peu d'hébreu ; qu'ils ont des belles-lettres, qu'ils ont lu les bons auteurs profanes, qu'ils sont capables de parler et d'écrire d'uns manière supportable, qu'ils se sont accoutn més à penser et à raisonner juste, qu'ils n'ignorent pas les règles de la dialectique, qu'ils ont quelque connaissance de toutes les parties de la philosophie, qu'ils ont un plan de l'histoire ecclésiastique et profane, qu'ils ont assez étudié la chronologie et la géographie pour ne pas se tromper lourdement sur les temps et les lieux. Ces choses supposées dans les écoliers, je crois qu'il est du devoir du maître de commencer par leur apprendre d'abord l'histoire de la religion, de leur faire connaître les auteurs et les livres de l'Ancien Testament, de leur donner une idée de l'établissement et du progrès du christianisme sous les empereurs païens, et ensuite sous les princes chrétiens; de leur expliquer simplement et distinctement nos mystères, de leur en donner les principales preuves, de leur indiquer les auteurs qui les ont défendus, les hérétiques qui les ont attaqués et les conciles qui les ont définis; de leur faire un plan général de la discipline de l'ancienne Eglise, et des changements qui y sont arrivés, et de les instruire des principes it des maximes de la morale chrélienne. Après cette instruction sommaire, on peut en même temps leur enseigner trois choses: l'Ecriture sainte, l'histoire ecclésiastique, et ce qu'on appelle la théologie. On commencera par les prolégomènes de l'Ecriture sainte, où l'on traitera à fond ce qui regarde les auteurs sacrés et les livres de l'Ecriture sainte; on leur enseignera en même temps la chronologie et la géographie sacrées, qui appartiennent à l'histoire: et pour ce qui regarde la théologie, après avoir traité en général de la vérité de la religion contre les Juifs, les païens et les athées, on expliquera les fondements de la doctrine. chrétienne. Toutes ces matières ayant assez de connexion ensemble, les unes serviront beaucoup à l'intelligence des autres, et toutes ensemble seront comme la base et le fondement de ce qu'on doit apprendre dans la suite. On continuera donc à instruire notre théologien en lui expliquant de suite le texte des livres sacrés par des notes littérales. Pendant qu'on lui expliquera les livres de l'Ancien Testament, on le fera entrer dans les grandes questions de l'histoire sacrée et profane, depuis la création du monde jusqu'à Jésus-Christ. Ces deux études jointes ensemble seront d'un grand secours. Par la même règle, quand on en sera venu aux livres du Nouveau Testament, on traitera en même temps de l'histoire acclésiasti

que des premiers siècles. Quand l'interpréta-
tion des livres sacrés sera finic on substituera
en sa place les ouvrages des auteurs ecclésias-
tiques de siècle en siècle. On fera connaître
leur histoire, leurs ouvrages, et l'on indiquera
ceux qu'on doit lire principalement. Cette
étude ne contribuera pas peu à l'éclaircis
sement de l'histoire de l'Eglise, que l'on fera
marcher d'un pas égal. Elle servira beau-
coup aussi à l'établissement des dogmes
théologiques et de la discipline ancienne,
que l'on enseignera en même temps.

Quant à la manière de traiter les questions
de théologie, il faut suivre les règles que
nous avons expliquées dans le vingtième
chapitre de cet ouvrage, touchant l'usage de
la dialectique, de l'éloquence et des autres
sciences; et fuir la barbarie et la sécheresse
des scolastiques, et cependant ne pas faire
dégénérer des traités dogmatiques en des dé-
clamations. Il faut bien expliquer les dogmes,
les établir sur l'Ecriture sainte, sur les dé-
cisions des conciles, sur les passages des
Pères, répondre aux objections que l'on peut
faire; distinguer ce qui est de foi de ce qui
n'en est pas, réfuter fortement l'erreur pour
ce qui concerne les questions du premier
genre, et défendre modestement ses opinions
dans celles du second, sans condamner ceux
qui ne sont pas de même avis ; il faut enfin

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Quoique les anciens théologiens aient
suivi l'ordre du Maître des Sentences, et la
plupart des nouveaux celui de la Som-
me de saint Thomas, on n'y est pas néan-
moins tellement astreint qu'on ne puisse
en inventer un autre, d'autant plus qu'il est
assez difficile de rapporter tout ce qui con-
cerne la religion aux sujets des questions de
leurs ouvrages. Voici le plan d'une théologie,
selon lequel on pourrait traiter méthodique-
ment de tout ce qui appartient à la doctrine
chrétienne et ecclésiastique. On y traiterait
premièrement de ce qui regarde les dogmes:
secondement, de ce qui concerne la discipline:
et en troisième lieu, de la doctrine des
mœurs. On pourrait diviser le tout en cinq
parties. La première, des dogmes de la re-
ligion; la seconde, des sacrements de l'Eglise;
la troisième, de la hiérarchie et de la disci-
pline ecclésiastiques, quant au gouvernement;
la quatrième, des rites et des cérémonies de
l'Eglise; la cinquième, de la doctrine des
mours. C'est sur ce plan que j'entreprends
de donner un traité de la doctrine chrétienne et
orthodoxe, suivant les principes établis dans
ce premier livre.

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